Assurance automobile: la vente à crédit est encore pratiquée

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Revue de presseKiosque360. Malgré la circulaire relative au secteur de l'assurance automobile, des facilités de paiement sont toujours accordées par les intermédiaires. Une pratique à laquelle agents, courtiers et consommateurs ont bien du mal à renoncer.

Le 03/06/2016 à 01h54

Encore un texte inapplicable? Tout porte à le croire, selon la Vie Eco dans son édition du 3 juin. La circulaire de l'Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale sur le recouvrement des primes de l'assurance automobile, entrée en vigueur le 1er avril pour interdire aux intermédiaires d'accorder des facilités de paiement aux assurés, n'est pas respectée sur le terrain. Il faut d'ailleurs préciser qu'avant même son adoption, agents et courtiers avaient fait part, à maintes reprises, de leurs inquiétudes par rapport à la suppression de la vente à crédit. “L'entrée en vigueur, brusque, de cette circulaire peut mettre à l'arrêt toute notre activité. Actuellement, au lieu d'étaler le paiement de la prime sur quatre ou cinq échéances comme nous le faisions auparavant, la majorité des agences convient avec les clients de se limiter à des chèques encaissables sur deux mois, tout en leur rappelant le changement de la réglementation”, confie un agent.

En clair, le réseau de distribution n'a pas pu sacrifier cet argument commercial qui répond, selon plusieurs agences, a un réel besoin des clients qui considèrent cela comme un droit. Un constat également partagé par les compagnies d'assurance. D'après l'hebdomadaire économique, le président d'un grand établissement de la place confie qu'en effet, les nouvelles dispositions ne sont pas appliquées comme il se doit. Et selon les informations du journal, plusieurs cas de non-conformité ont été relevés sur le terrain par les contrôleurs de l'Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale qui ont été dépêchés pour mener des visites inopinées auprès des agents et courtiers, en vue de s'assurer de l'application du nouveau texte.

Moins alarmiste, une source très bien placée à la Fédération marocaine des sociétés d'assurance et de réassurance rappelle que, comme pour toute nouvelle réglementation, il existe "des petits soucis au début". Selon les chiffres de la profession, aujourd'hui, entre 40 et 50% des primes ne sont pas recouvrées à la fin de l'année. Leur stock s'élève à près de 7 milliards pour l'ensemble du secteur, toutes branches confondues. De surcroît, les assureurs trouvent une grande difficulté à faire la distinction entre les impayés des assurés et ceux qui relèvent de la pure rétention des primes par les intermédiaires. À ce titre, la nouvelle circulaire, qui précise minutieusement les rapports entre agents et assureurs dans la convention de collaboration, semble se confronter à un autre écueil. Beaucoup d'intermédiaires, qui ont pris l'habitude d'agir avec une certaine flexibilité dans leur versement des primes, ne vont pas pouvoir se conformer immédiatement aux nouvelles dispositions. Il leur faudra du temps pour assimiler les nouvelles règles du jeu, souligne un assureur sur le terrain.

Les agents continuent de négocier avec les compagnies pour ne pas mettre leurs trésoreries sous pression. Les uns proposent de payer avec des effets de commerce, d'autres négocient le paiement en fin de mois, tandis que le reste demande à reverser 50% des primes encaissées en fin de mois et 50% le mois suivant, sachant que, légalement, le réseau de distribution dispose aujourd'hui de 15 jours pour verser les primes encaissées.

L'apurement du stock des anciennes créances figure également en tête des points à négocier. Les compagnies affirment traiter au cas par cas les remboursements des stocks selon le niveau d'endettement, la capacité à rembourser et le niveau des charges de structure de l'intermédiaire. Selon la Fédération marocaine des sociétés d'assurance et de réassurance, plusieurs réunions avec les agents et courtiers et les responsables de l'Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale ont été tenues pour statuer sur les points liés à la trésorerie, évaluer l'entrée en vigueur de la circulaire et dépasser les blocages.

Mais quoi qu'il en soit, l'Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale ne veut pas se faire marcher sur les pieds. Selon des sources très proches du dossier, le gendarme du marché est en train de préparer une nouvelle circulaire qui viendra incessamment ajouter deux apports majeurs à la première: des dispositions coercitives et des pénalités pour pousser les agents récalcitrants à ne plus pratiquer la vente à crédit, et l'obligation pour les compagnies d'assurance de provisionner les primes non encaissées.

Par Sanae El Asrawi
Le 03/06/2016 à 01h54