Depuis jeudi à Fès, les tambours résonnent, les chants mystiques s’élèvent et la foule s’amasse dès la fin de l’après-midi autour de Bab Boujloud. De là-bas s’est élancé le cortège officiel en direction de la zaouïa Idrissiya. Les ruelles étroites de la médina se parent alors de sons et de couleurs: les confréries Aïssawa, Gnaoua, Hmadcha et Derqawa défilent en entonnant leurs «madihs» et «anashids», ces louanges qui emplissent l’air d’une ferveur contagieuse.
Entre les drapeaux colorés et les encens qui flottent dans l’air, la procession avance lentement, rythmée par les tambours et les youyous des femmes. Fidèles, curieux, touristes, tous se pressent pour assister à cette marche empreinte de dévotion, qui relie symboliquement les participants à leur héritage spirituel.
«La célébration de Moulay Idriss Al-Azhar traduit l’attachement profond des habitants de Fès à leur histoire et à leur foi», déclare Mohamed Hicham Al Moustakim, représentant d’une association locale de la société civile. «Cet attachement s’explique par deux dimensions essentielles: la première, religieuse, car Moulay Idriss est un descendant du Prophète, la seconde, historique et culturelle, puisqu’il est le fondateur de Fès et l’artisan de son rayonnement spirituel et scientifique», ajoute-t-il.
Festivités du Moussem Moulay Idriss Al-Azhar à Fès (Y.Jaoual/Le360).. le360
À l’intérieur de la zaouïa, tout est prêt pour accueillir la «kiswah», la parure destinée à recouvrir le mausolée du saint, symbole d’un héritage transmis de génération en génération. Cet instant solennel est précédé de longues semaines de préparation. «La confection de la kiswah commence environ un mois avant la cérémonie», explique Abdelfattah Bennis, membre du comité d’organisation. «Elle mobilise des artisans expérimentés et s’accompagne d’un grand nettoyage du mausolée, ainsi que des préparatifs spirituels des confréries appelées à y participer», ajoute-t-il.
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Le moussem est aussi un moment de rencontre pour les fidèles venus de tout le pays. Les chorfas (descendants du saint), les disciples et les habitants s’y rassemblent dans un climat de recueillement. La dernière nuit du moussem, connue sous le nom de «Laylat Asaqliyin» marque l’apogée des célébrations. Cette veillée, rythmée par la lecture du Coran et la récitation de Dalail Al Khayrat du lever du jour jusqu’à la prière d’Al-ichae, plonge la ville dans une atmosphère mystique unique. «Cette tradition ancestrale illustre la profondeur du lien spirituel entre Fès et son fondateur», confirme Abdelfattah Bennis.
Pendant ces journées de célébration, la médina tout entière s’anime. Les ruelles grouillent de visiteurs et les commerces et cafés ne désemplissent pas. Les touristes, attirés autant par la dimension religieuse que par le spectacle vivant des confréries, se mêlent aux habitants. «Le moussem apporte une vitalité économique remarquable à l’ancienne médina, tout en ravivant sa dimension culturelle et patrimoniale», conclut Mohamed Hicham Al Moustakim.
















