La récente nomination de l’artiste Latefa Ahrrare en tant que membre du conseil d’administration de l’Agence nationale d’évaluation de la qualité de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique du Maroc fait des remous. Si certains saluent cette désignation, la majorité des critiques se concentrent sur le manque de pertinence de cette décision.
Latefa Ahrrare, bien que largement connue du grand public en tant qu’artiste et figure du théâtre et de la télévision, est diplômée de l’Institut supérieur des arts dramatiques et de l’animation culturelle en 1995. Elle obtient par la suite un master en réalisation de films documentaires à l’Université Abdelmalek Essâadi de Tétouan. En 2022, elle occupera le poste de directrice de l’ISADAC.
L’artiste et président du Syndicat national des professionnels des arts dramatiques, Messaoud Bouhssine, a exprimé son désaveu des critiques. Selon lui, Latefa Ahrrare n’est pas désignée pour ses talents d’actrice ou de performeuse, mais pour son expertise en pédagogie et en administration artistique: «Elle n’est pas là pour jouer des rôles dans des pièces, des films ou des séries, car ce domaine appartient à la pratique artistique en tant que métier. Elle occupe cette position en raison de ses compétences pédagogiques et administratives dans le domaine artistique.»
Messaoud Bouhssine a souligné l’importance de l’art dans l’éducation, précisant que l’art, en tant que méthode pédagogique, est essentiel pour améliorer la qualité de l’enseignement, notamment en développant la créativité des étudiants. «L’art, en tant que méthode pédagogique, est essentiel pour améliorer la qualité de l’éducation dans toutes les disciplines», a-t-il déclaré. Il a aussi ajouté que l’éducation artistique permet de former des individus capables de résoudre des problèmes de manière créative, une compétence très recherchée dans de nombreux secteurs.
Latefa Ahrrare légitime?
Les opposants à sa nomination estiment, pour la plupart, que Latefa Ahrrare ne possède pas l’expérience spécifique requise pour évaluer le système de l’enseignement supérieur. Bien que l’artiste soit compétente dans son domaine, certains doutent de son expertise en matière d’évaluation de la qualité de l’enseignement supérieur. «Il y a des docteurs plus compétents et expérimentés dans ce domaine spécifique», a déclaré un internaute, ajoutant qu’il ne fallait pas personnaliser la question et faire de cette polémique une opposition à la présence des Amazighs dans les grandes fonctions scientifiques.
Il faut rappeler que des accusations plus graves ont émergé sur les réseaux sociaux, après qu’un extrait d’une ancienne émission télévisée de Latefa Ahrrare, dans laquelle elle avait entonné un texte comme si elle psalmodiait des versets du Coran. Sa manière a été jugée par certains comme moqueuse. Cet incident, qui date, a refait surface et a ravivé les critiques à son encontre, de la part de ceux qui estiment qu’une telle attitude dénigre la religion et n’est pas compatible avec de hautes fonctions publiques.
Soutien populaire: la solidarité s’organise
Face à ces attaques, un soutien massif s’est exprimé sur les réseaux sociaux. La Toile est inondée de message de solidarité. De nombreux collègues et amis de Latefa Ahrrare ont pris sa défense. La metteuse en scène Naima Zitan a exprimé sa solidarité, soulignant que ces attaques sont hostiles envers les femmes ambitieuses, créatives et dévouées : «C’est une hostilité envers la femme ambitieuse, travailleuse et créative ; c’est une hostilité envers le succès et le dévouement».
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L’écrivaine Latifa Baqa a, quant à elle, fait part de son soutien en rappelant que la route du succès est souvent semée d’embûches: «Être une femme cultivée, réussie, responsable, ambitieuse et libre... tu dois t’attendre aux perturbations qui accompagneront ton ascension, perturbations dont le bruit s’intensifie à mesure que l’échec de ceux qui tentent d’entraver tes pas confiants devient évident».
La nomination de Latefa Ahrrare dans ce conseil d’administration, bien que controversée, pourrait offrir un nouveau souffle à l’Agence nationale d’évaluation de la qualité de l’enseignement supérieur instituée en 2015 et qui se trouve sous la tutelle du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique. Ses qualités personnelles, comme sa capacité à communiquer et son esprit d’équipe, ont également été saluées par ceux qui la connaissent de près, notamment Messaoud Bouhssine, qui a souligné: «Elle est connue, influente et excelle dans le contact humain, des qualités indispensables à toute gestion administrative».
Malgré les critiques, de nombreux professionnels du secteur artistique et académique estiment que sa nomination est une occasion pour l’Agence nationale d’évaluation de la qualité de l’enseignement supérieur de bénéficier de ses valeurs humaines.