«Big Data Djihad», c’est une histoire d’amour vache, de réseaux sociaux HS, des émotions édulcorées, un Dieu qui ne compte que les larmes des femmes, un monde «qui pue la merde» car peuplé de «trous de balles». Dans un registre cru, Hicham Lasri dépeint donc une humanité enracinée dans la peur, qui fait le sel du monde moderne.
Le360 vous convie à découvrir les bonnes feuilles d’un roman décrivant un anti-héros génial, qui casse Internet pour punir une influenceuse qui l’a quitté, sans que toutes les polices du monde ne parviennent à savoir ni comment, ni pourquoi.
Je suis de retour dans le hangar, face à mes tortionnaires de la CIA. Un nouveau méchant fait son entrée. Une femme, très femme... À part la froideur dans le blanc des yeux qui te glace le sang et te rapetisse les couilles, je me vois bien l’inviter sous la table pour mon dessert. Elle a l’air terrible... infréquentable, du caca boudin en forme de reine de beauté des années 60.
Elle plante son regard dans ma viande comme un rapace, je suis foutu.- Bonjour !- Bonjour !
Elle a une voix grave, caverneuse, presque inhumaine. Elle semble comme doublée, ce qui donne à sa carrosserie une meilleure voix. Une voix à la Jessica Rabbit, femme fatale, fatalement je suis foutu !- Comment tu as réussi à faire ça ?- Faire quoi ?
Elle marque une pause, laissant le silence se remplir d’un reproche d’autant plus doux qu’il semble dénué de toute colère, de toute violence. Son silence est maternel, chargé d’un reproche d’institutrice consciencieuse. Son ton et son téton durcissent. Ma verge aussi. C’est étrange de bander à un moment aussi critique. Je suis foutu !Alors ?- Je ne sais pas !- Comment ça ?- Je ne sais pas ce qu’on veut de moi depuis hier, on me trimbale de service en service... Je me suis même fait tabasser... Que des clichés de série B...- Tu n’aimes pas le film ou l’histoire ?- Je ne sais pas ce qu’on me veut !Un sourire neutre tire le coin de sa lèvre supérieure, dévoilant une dentition d’origine de rapace. Ce serait presque un sourire si les yeux n’étaient pas plongés dans l’obscurité.
Tu sais que je ne suis pas là par hasard... ni toi... ni les autres... Quelque chose de terrible s’est passé dans le monde... Des effondrements économiques... L’écroulement des bases de la civilisation digitale... Un terrible acte de terrorisme... On a les vidéos des caméras de surveillance, la reconnaissance faciale et tous les algorithmes que tu peux imaginer, qui disent que tu en es responsable !- Il y a des victimes ?- Non !- Ce n’est pas une guerre, ni un acte de terrorisme !- Oui, tu me la joues comme Mao, c’est ça...- Lui, il a tué 36 millions de Chinois...- Non, Mao ne tue pas les vies, il tue le mode de vie...- Ah !- Alors ?Je laisse passer quantité de secondes dans le silence qui s’étire entre nous. Elle ne semble pas satisfaite de mes réponses. Je n’aurai pas un bon point dans cet examen. Je suis foutu ! Elle tente sur moi un coup de phreaking, un coup de phishing ; le phishing ne marche pas sur moi, elle peut la jouer Triade CIA sur ma fraîche, mais ce n’est pas la saison. Elle se pose délicatement sur la chaise surgie de nulle part... Je commence à carafer mes émotions et mes idées pour les laisser respirer et décanter avant de les remettre dans la bouteille de mon faible corps pour affronter le rapace.
Et pourquoi je ferais ça...- Ferais quoi ?- Euh, je ne sais pas... Ce dont on m’accuse et qui semble grave... Tu sais, tous les Arabes ne sont pas terroristes...- S’il te plaît... pas de cliché... pas toi... Please !- Alors quoi ?- Dépouille-moi d’un doute ou deux...- ...- Tu n’es pas débile ?