C'est l'histoire d'un mec...

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ChroniqueC'est ainsi que Coluche avait l'habitude de démarrer son spectacle. C'était sa manière de nous prévenir qu'il n'allait pas nous raconter d'histoires, mais plutôt des blagues. Moi non plus, je n'aime pas vous raconter d'histoires, car mon boulot ce n'est pas de vous berner, mais de vous faire marrer.

Le 13/12/2016 à 12h02

Aujourd'hui, j'avais envie de commencer ma chronique de cette semaine par:" C'est l'histoire d'un chef". Un chef de gouvernement. Un chef de non-gouvernement. Ou bien un non-chef de gouvernement. Ou même, si on veut pousser l'absurde et la réalité jusqu'au bout, un non-chef de non-gouvernement.

En vérité, je ne sais plus comment l'appeler, je vous assure. Et j'aimerais bien qu'il me croit lui aussi, que cette histoire ne me fait pas rigoler. J'en suis même un peu triste.

J'aurais pu, comme beaucoup d'ailleurs, sauter sur l'occasion et en faire un sujet de rigolade. Mais mon problème, c'est que j'ai beau jouer au clown, au type qui se fiche de tout le monde, qui ne fait partie d'aucun bord, qui ne vote pas parce qu'il ne fait pas confiance ou parce qu'il n'a pas de temps à perdre ou parce que ça le gonfle, qui tape sur toutes les institutions, enfin pas toutes mais presque, qui ricane sur tout et sur rien. Bref, le mec qui n'est là que pour amuser la galerie, mais, à un moment ou à un autre, le démocrate obtus qui sommeille en moi finit toujours par prendre le dessus.

Je ne m'en plains pas et je ne le regrette pas. Bien au contraire. Il n'est dit et il n'est écrit nulle part qu'un amuseur public doit être obligatoirement un être apolitique et doit se limiter à faire le pitre et à se casser. En tout cas, ça n'a jamais été la conception du métier qui est le mien. Je parle du métier que j'exerce en ce moment précis, là, maintenant où je parle, car vous devez bien vous en douter, je n'ai pas que ça à faire. Et heureusement, d'ailleurs!

Je reviens à notre chef qui n'est, du moins pour l'instant, le chef de rien du tout et j'en suis profondément navré, et pour lui, et pour moi. Pour nous tous et toutes, devrais-je dire. Franchement, à quoi ça rime tout ça? On nous dit qu'on négocie et qu'on est d'accord, et puis qu'on négocie plus parce qu'on n'est plus d'accord sur rien, et puis qu'on va reprendre bientôt les négociations, mais pas avant le retour de celui que rien ne se fera sans lui ou... pas. Parce que justement, on ne sait pas s'il va y être ou pas. Et, en attendant, on attend...

Oui, je sais que cette attente sans limites de temps fait beaucoup marrer certains qui en profitent pour chanter partout que c'est la preuve que, je les cite: «Le Maroc n'a besoin ni de gouvernement ni de Parlement» puisque, je les cite toujours: «Tout marche sans eux». N'importe quoi ! Puisque c'est comme ça, eh bien vous n'aviez qu'à ne pas nous casser les oreilles avec vos histoires de démocratie «modèle et spécifique», ne pas nous pousser en nous tapotant le dos et en nous faisant des guiliguili pour pour aller voter, ne pas crier sur tous les toits que les élections ont été une réussite et qu'il va en sortir «le gouvernement idéal que tous les Marocains et toutes les Marocaines attendent». Justement, ça tombe bien! Tous les Marocains et toutes les Marocaines ont en marre d'attendre ce qui semble ne plus vouloir arriver...

En attendant, notre chef de gouvernement, le pauvre, attend aussi. Qui? Peut-être le Messie. Jusqu'à quand? Je ne sais pas. Et lui non plus. Alors quand je lis que M. El Yazghi, vous savez l'ex-numéro1 de l'ex-parti de la Rose, demande à M. Benkirane « la formation immédiate du gouvernement », je me force pour ne pas rigoler. M. El Yazghi, vous êtes sérieux? Vous croyez que ça amuse M. Benkirane de nous faire poireauter comme ça. Vous pensez qu'il joue à la pétanque ou à la belote en sirotant un verre de... thé à la menthe? Vraiment, je ne vous souhaite pas d'être à sa place. A moins que ça vous intéresse, mais, entre nous, je crois que c'est définitivement plus possible pour vous. J'en suis désolé.


Alors, en attendant, et à force d'attendre le tant attendu, notre chef de gouvernement qui n'a toujours pas de gouvernement a décidé d'organiser la réunion du... gouvernement. Non, je vous jure que je ne l'ai pas inventé. C'est vraiment véridique. Ils vont parler de quoi ? Je crois qu'ils vont discuter de budget de je ne sais quoi. Bref, de fric quoi! Mais en fait, qui sont ces ex et toujours ministres qui, normalement, ont quitté leur bureau et n'ont plus, normalement, même plus de voitures de fonction et qui vont quand même discuter de notre sort alors qu'ils sont déjà sortis? Je ne sais pas pour vous, mais moi je vous avoue que je ne pige plus rien. En réalité, je crois avoir compris, mais j'aimerais vraiment me tromper. Je suis un démocrate, vous répété-je. Et un démocrate, un vrai, n'aime pas voir les institutions devenir la risée du peuple, et pis, de l'élite.

J'espère de tout cœur qu'on va arrêter de nous raconter des histoires et que notre très jeune et très fragile démocratie va être bientôt remise sur les rails. En attendant, je n'ai plus qu'à dire vivement la fin de cette mauvaise comédie! Et vivement mardi prochain!

Par Mohamed Laroussi
Le 13/12/2016 à 12h02