La presse américaine se demande si Bella Hadid, mannequin de grandes marques de mode, va perdre son travail, si les sociétés pour lesquelles elle défile vont la mettre au chômage.
Son crime? Cette belle femme de 24 ans est d’origine palestinienne. Et elle ne l’oublie pas, elle le proclame et en est fière.
Son père est né à Nazareth en 1948. A l’âge de quinze ans, il émigre en Amérique et y travaille sans relâche jusqu’à faire fortune dans l’immobilier. Il a épousé une néerlandaise, très belle. Les deux sœurs Hadid, Bella et Gigi, sont d’une beauté éblouissante.
C’est tout naturel qu’elles aient été choisies par de grandes marques pour faire mannequins. Mais la beauté et le talent n’excusent pas tout. Encore faut-il rester dans le cadre et les règles de ce métier particulier.
Etre mannequin c’est savoir défiler et ne pas ouvrir la bouche. C’est une image qui marche d’une certaine façon et qui doit fasciner les personnes qui s’habillent en s’achetant des habits au prix fort. La fascination pour les habits de luxe ne cesse de progresser. L’industrie du luxe n’a pas souffert des conséquences de la pandémie. L’homme le plus riche de France, spécialisé dans le luxe, Bernard Arnault, a même enregistré des bénéfices exceptionnels.
Etre mannequin c’est être belle, certes, mais aussi ne pas sortir des rails tracés par la firme qui les utilise. On paye ces jeunes femmes assez cher pour qu’elles soient l’objet qui fait rêver. Rien d’inconvenant ne doit venir brouiller cette image idyllique. Surtout pas de politique.
Bella Hadid et Gigi sont sorties de ce cadre. Bella, qui a 43 millions d’abonnés sur son compte Instagram, a osé soutenir les Palestiniens qui sont morts sous les bombes israéliennes. Ce soutien a été jugé inadmissible par le milieu de la mode et du fric.
Ainsi, dans l’édition du New York Times du 22 mai, une pleine page de publicité payée par l’organisation juive américaine ultra Word Values Network, accuse le top model Bella Hadid «d’antisémitisme et de haine envers Israël».
Le 15 mai, Bella Hadid défilait dans les rues de New York pour dénoncer les violences de l’armée israélienne contre les habitants de Gaza. Déjà en 2017, elle avait déclaré: «je suis avec mes frères et mes sœurs palestiniens, je vous protégerai et vous soutiendrai du mieux que je peux. JE VOUS AIME».
En 2018, l’actrice américano-israélienne Natalie Portman avait refusé de se rendre en Israël pour recevoir le prix Genesis. Elle avait justifié ce refus par son opposition à la politique de Netanyahu vis-à-vis des Palestiniens de Gaza. Elle a été menacée de déchéance de nationalité et de voir sa carrière s’arrêter net. Elle est pourtant juive et aime son pays natal. Mais elle n’est pas d’accord avec sa politique coloniale.
Critiquer la politique d’Israël est tout de suite assimilé à l’antisémitisme. Cette nouvelle arme de dissuasion fonctionne bien en France. Des intellectuels ont martelé le fait que l’antisionisme est de l’antisémitisme.
Certes, certains cachent leur racisme, dans leur rejet de l’idéologie sioniste. Mais l’équation ne fait pas de nuances. Tu critiques Israël, tu es antisémite.
Bella sait qu’elle n’est pas raciste. Elle s’exprime en tant que personne lucide et qui n’accepte pas l’injustice. Elle est musulmane, et cela ne fait pas problème. Elle en est même fière. Voici ce qu’elle a déclaré à la presse récemment: «j'ai des origines métissées. J'ai appris que nous sommes tous humains, nous méritons tous le respect et la gentillesse. Nous ne devrions pas traiter les gens comme s'ils ne le méritaient pas à cause de leurs origines. C'est injuste. Et ce message, celui d'être bienveillant chaque fois qu'il est possible de l'être, voilà ce qui est important pour moi».
Ce qui est réconfortant, c’est qu’elle et sa sœur ont reçu des milliers de soutiens de la part d’inconnus qui ne sont pas forcément des militants ou des racistes invétérés.
La polémique s’est amplifiée depuis que le 27 mai dernier, quand l’ONU a lancé «une enquête internationale sur les atteintes aux droits humains commis dans les territoires palestiniens occupés et en Israël». Netanyahu a parlé d’une «enquête honteuse». Le quotidien Le Monde de ce dimanche donne la parole à Jean-Pierre Filiu, un spécialiste du Proche-Orient qui pose la question de «l’apartheid» en Israël, suite à la mise en garde de Jean-Yves Le Drian, ministre français des Affaires étrangères, sur «le risque fort d’apartheid en Israël». Le mot «apartheid», déjà utilisé par Human Rights Watch, n’est plus tabou et cela n’a rien à voir avec l’antisémitisme.