Les très graves émeutes-pillages qui ont secoué l’Afrique du Sud à partir du 8 juillet dernier ont été déclenchées par la faction pro-Zuma de l’ANC, avec pour objectif de déstabiliser la présidence de Cyril Ramaphosa. La présidence sud-africaine a d’ailleurs été très claire à ce sujet en parlant de «conspiration ethnique» et en faisant inculper douze hauts cadres zulu de l’ANC qui, selon elle, seraient impliqués dans l’organisation de ces émeutes. Dudane Zuma, un des fils de Jacob Zuma a, quant à lui, clairement appelé les Zulu à se mobiliser.
Tout est parti du pays zulu, le Kwazulu-Natal, avec pour épicentres les villes zulu de Durban et de Pietermaritzburg, et cela, à partir du moment où Jacob Zuma a été incarcéré. Dans la région de Johannesburg, seuls les townships zulu ont été touchés. Les zones non-Zulu n’ont pas suivi le mouvement.
Les raisons de ce soulèvement sont claires: les Zulu n’acceptent pas le coup d’Etat de 2018 qui a abouti à l’éviction de Jacob Zuma par son vice-président Cyril Ramaphosa. Ils l’acceptent d’autant moins que ce coup de force fut suivi de poursuites judiciaires contre Jacob Zuma, considérées par eux comme une vengeance de ses adversaires ethniques au sein de l’ANC. D’autant plus qu’ils accusent à raison l’actuel président, l’ex-syndicaliste Cyril Ramaphosa, d’avoir bâti sa colossale fortune sur la trahison de ses mandants. Nommé dans les conseils d’administration des sociétés minières blanches, il y fut en effet coopté pour son «expertise» syndicale, c’est-à-dire en échange de son aide contre les revendications des mineurs noirs dont il fut le représentant avant 1994!!!
Considérant qu’à travers Jacob Zuma c’est leur peuple qui est attaqué, les Zulu se moquent de savoir qu’il est effectivement corrompu. Englué dans plusieurs affaires de corruption, il a même été pris la main dans le sac d’une gigantesque entreprise de favoritisme d’Etat au profit de la famille Gupta et une commission judiciaire fut désignée pour enquêter sur la gravissime accusation de «State Capture». Ces gangsters affairistes d’origine indienne avaient en effet réussi à imposer leur droit de regard sur les nominations officielles, ce qui leur avait permis de placer leurs agents à tous les rouages de décision de l’Etat et des entreprises publiques.
Estimant que l’Etat-ANC est contre eux, les partisans de Jacob Zuma ont donc pensé qu’ils n’avaient que la violence pour s’exprimer. D’où les premiers évènements du début du mois de juillet, immédiatement suivis, comme toujours en pareil cas, de pillages d’opportunité associés à une puissante et sanglante vengeance contre les commerçants-usuriers indiens qui vivent aux dépens des paysans zulu. Et ce fut alors que la deuxième étape du mouvement se produisit.
Conséquence d’un mouvement politique, ces pillages sont le révélateur de la faillite économique et sociale de la «nation arc-en-ciel». Le bilan économique de bientôt trois décennies de pouvoir ANC est en effet désastreux avec un PIB qui ne cesse de baisser (3,5% en 2011, 2,6% en 2012, 1,9% en 2013, 1,8% en 2014, 1% en 2015, 0,6% en 2016, une entrée en récession en 2017 suivie d’un très léger rebond à 0,2% et 0,1% en 2019 et 2020). Les mines, premier employeur du pays, ont perdu près de 300 0000 emplois depuis 1994. Quant aux pertes de production et de revenus, elles se conjuguent avec des coûts d’exploitation en hausse constants, cependant que les dramatiques coupures d’électricité ont eu pour conséquence la fermeture des puits secondaires et la mise à pied de dizaines de milliers de mineurs.
En réalité, depuis 1994, l’Afrique du Sud vit sur l’héritage légué par le régime blanc. Les nouveaux dirigeants du pays n’ayant pas réalisé les nécessaires et colossaux investissements qu’il était pourtant urgent de faire afin de simplement maintenir les capacités de production. En plus de cela, le climat social a découragé les éventuels investisseurs qui ont préféré faire «glisser» leurs activités vers des pays plus fiables.
L’agriculture avait, elle aussi, perdu plusieurs centaines de milliers d’emplois avant le coup mortel porté aux fermiers le mardi 27 février 2018, quand le parlement sud-africain vota le commencement d’un processus de nationalisation-expropriation sans compensation des 35.000 fermiers blancs.
Résultat, au lieu de se combler, comme l’ANC le promettait en 1994, les inégalités se sont au contraire davantage creusées. Aujourd’hui 75% des familles noires vivent en-dessous du seuil de pauvreté. Quant au chômage, il est officiellement de 30% de la population active alors que les agences indépendantes parlent de plus de 50% avec des pointes à 80% dans certaines régions.
Enfin, chiffre terrible, aujourd’hui, le revenu de la tranche la plus démunie de la population noire est inférieur de près de 50% à celui qu’il était sous le régime blanc d’avant 1994!!! Aujourd’hui, personne ne peut plus nier qu’en 1994, quand le président De Klerk hissa au pouvoir Nelson Mandela, il légua à l’ANC la première économie du continent, un pays doté d’infrastructures de communication et de transport à l’égal des pays développés, un secteur financier moderne et prospère, une large indépendance énergétique, une industrie diversifiée, des capacités techniques de haut niveau et la première armée africaine. Force est également de constater que la «nouvelle Afrique du Sud» fut immédiatement la proie de l’ANC dont les cadres, aussi incapables que corrompus, eurent comme objectif principal leur propre enrichissement.
Aujourd’hui, l’ANC est une coquille vide qui ne survit plus que comme une machine électorale destinée à distribuer des sièges de députés à ses membres, et dont les références idéologiques remontent aux années «1970». Ainsi en est-il de son soutien au Polisario.