Vidéo. Consommation de drogues et violences: les liaisons dangereuses

Le360

Souvent les crimes commis au Maroc sont attribués à la consommation de drogues. La corrélation existe même si elle n'est pas systématique. Les explications des spécialistes aux lecteurs de le360.

Le 26/08/2017 à 19h30

L’affaire de l’agression sexuelle dans le bus à Casablanca a défrayé la chronique. Ces jeunes qui ont agressé Zineb, souffrant de troubles mentaux, étaient-ils sous l’effet de la drogue? En tout cas, des voix exprimées sur les réseaux sociaux ont évoqué ce lien entre la consommation de drogue et la violence de ces jeunes.

Plusieurs crimes au Maroc sont d’ailleurs attribués à la consommation de toutes sortes de psychotropes chez une population éclectique. C’est ce que nous confie Abdessamad Touhfi, le coordinateur national de l’association «Non à la drogue». «La majorité des crimes au Maroc sont dus aux drogues. Notre expérience dans le domaine de la lutte contre l’addiction nous l’a révélé, multiples cas à l’appui».

Cette structure qui œuvre au Maroc pour la protection des jeunes contre l’addiction aux drogues vient d’ouvrir il y a trois ans un centre où un traitement gratuit est offert aux jeunes du quartier Aïn Sebaâ. Le docteur Nadia Bousfiha, membre de l’association, suit de près le comportement de plusieurs jeunes. «Elle leur parle, les écoute et si le toxicomane a besoin de passer des nuits dans un centre, on l’envoie pour poursuivre le traitement», explique Abdessamad Touhfi, relevant que la majorité des jeunes ont surtout besoin d’attention, et d’écoute.

Pour lutter contre ce phénomène de consommation massive de drogues chez les jeunes, Abdessamad Touhfi souligne qu’il faut s’intéresser aux écoles et protéger ces jeunes dans le milieu scolaire et dans leur quartier. «Nous sommes au stade où il faut d’abord empêcher ces jeunes d’accéder à la drogue, les protéger de ces dealers qui leurs proposent ces produits toxiques», exhorte le coordinateur national de la campagne «Non aux drogues».

Si pour Abdessamad Touhfi, la raison principale de l’accès de ces jeunes aux drogues est le vide culturel et intellectuel, le psychiatre Driss Moussaoui estime qu’un trouble mental est souvent derrière le comportement toxicomaniaque. «Quand il y a une maladie mentale derrière, comme une schizophrénie ou un trouble bipolaire, on doit soigner le trouble mental car il est le plus souvent derrière le comportement toxicomaniaque».

L’effet de la consommation de drogues est pour le professeur Moussaoui destructeur à plus d’un titre. «Les drogues transforment le psychisme de l’individu. Ces substances effacent les frontières qu’on ne franchit pas habituellement lorsqu’on est en dehors de la drogue». La correlation entre consommation de drogues et violence est certifiée même si l’on peut être violent sans être drogué, et là c’est le psychisme humain qu’il faut interroger.

«Très souvent la drogue va avec un comportement qui n’est pas admis socialement, qui est dans la transgression, et à ce moment-là tous les interdits sautent et on se retrouve à faire toutes sortes de bêtises», indique Driss Moussaoui en ajoutant concernant l’affaire de l’agression dans le bus: «Il faut rappeler que la victime souffre de troubles psychiques depuis une dizaine d’années et qu’elle était probablement perdue en dehors de sa famille, donc c’est une victime facile à agresser, car n’ayant personne pour la protéger. Ces adolescents se sont crus autorisés parce qu’elle avait un comportement probablement de fragilité à devenir prédateur y compris au niveau sexuel, y compris en plein jour devant tout le monde. Car si quelqu’un était intervenu, ils auraient sorti un couteau, ils auraient agressé physiquement le chauffeur du bus… Ce comportement anti-social existe un peu partout dans le monde. Certains se comportent comme si la loi ne s’appliquait pas à eux surtout lorsqu’ils sont en groupe. Il y a même une sorte de compétition de la transgression, celui qui ira plus loin aura une médaille par le groupe».

Driss Moussaoui conclut en disant que dans ce cas bien précis, on ne peut pas accuser la drogue comme étant derrière cette agression. «Je pense que ces jeunes ont senti la fille extrêmement vulnérable et se sont jetés sur elle comme des loups».

Par Qods Chabaa et Khadija Sabbar
Le 26/08/2017 à 19h30