Le tribunal correctionnel d’Aïn Sebaâ, à Casablanca, a entamé un investissement judiciaire approfondi autour d’une affaire qui prend chaque jour plus d’ampleur. Au cœur du dossier, une femme d’affaires opérant dans le domaine du change de devises, soupçonnée d’avoir orchestré, avec son époux actuellement en fuite, un vaste réseau d’escroquerie financière et de blanchiment d’argent, indique le quotidien Assabah dans son édition de ce mardi 30 septembre.
Poursuivie par le parquet pour escroquerie et fraude aggravée, la mise en cause a été présentée à la justice avec un réquisitoire demandant son placement sous contrôle judiciaire. Sa libération provisoire a provoqué la stupéfaction des victimes, qui peinent à comprendre comment une mise en cause arrêtée en flagrant délit peut bénéficier de la liberté, alors que les sommes en jeu atteignent des montants colossaux, lit-on.
Selon les premiers éléments de l’enquête relayées par Assabah, plus de dix personnes figurent parmi les victimes, dont un ressortissant britannique, un Syrien installé au Maroc, ainsi qu’une femme marocaine. Les préjudices financiers sont estimés à près 100 millions de dirhams, une somme qui place cette affaire parmi les plus importantes du genre dans le pays.
Les témoignages recueillis révèlent un mode opératoire sophistiqué, reproduit à l’identique auprès de plusieurs cibles. Le couple aurait d’abord instauré un climat de confiance en empruntant de petites sommes, généralement entre 50.000 et 100.000 dirhams, rapidement remboursées.
Forts de cette crédibilité, ils proposaient ensuite des «opportunités d’investissement» liées à leurs activités de change, garantissant les transactions par des chèques, qui s’avéraient par la suite sans valeur.L’une des affaires emblématiques concerne un Syrien résidant dans le Royaume.
Séduit par la proposition de racheter les parts d’un associé supposément sur le départ, il avait accepté d’investir plus de 5 millions de dirhams dans un bureau de change présenté comme florissant, relate Assabah. Mais, au moment de concrétiser son partenariat, la femme d’affaires aurait exigé des chèques supplémentaires sous prétexte de régulariser certaines formalités. Dès leur remise, elle aurait déchiré les chèques et affirmé lui avoir déjà rendu l’argent, avant de s’éclipser avec l’aide de complices qui auraient retenu la victime quelques minutes, le temps qu’elle prenne la fuite.
Le stratagème a été reproduit à l’encontre d’une autre victime marocaine, délestée de plus de 230.000 dirhams, et d’un Britannique qui, dupé par la promesse d’une association, aurait été contraint de signer une procuration générale permettant à la mise en cause de s’approprier ses fonds.
D’après des sources proches du dossier, citées par Assabah, l’époux de la prévenue, considéré comme le cerveau de l’opération, serait à la tête d’un réseau structuré de changeurs informels. Plusieurs complices se partageraient les rôles: recherche de nouvelles victimes, gestion des transactions frauduleuses, ou encore organisation de mises en scène pour neutraliser les plaignants.
Le parquet a donné instruction de poursuivre les investigations et d’élargir les auditions à tous ceux qui pourraient être impliqués dans ce dossier tentaculaire. Les plaintes continuent d’affluer au greffe du tribunal, laissant présager que l’ampleur des escroqueries pourrait dépasser largement les estimations actuelles.








