Tribune. Épilepsie et grossesse: la maternité est possible sous contrôle médical

Une femme enceinte. 

Une femme enceinte.  . DR

L’épilepsie complique la vie reproductive d’une femme. Cependant, l’amélioration du diagnostic et du traitement de cette maladie, ainsi qu’une meilleure adaptation sociale, ont permis à la plupart des femmes épileptiques de se marier et d’avoir des enfants.

Le 26/06/2022 à 07h55

La collaboration entre le neurologue et le médecin obstétricien est importante afin d'optimiser la prise en charge des femmes souffrant d’épilepsie, désireuse de devenir mère. Et c’est par la planification de la grossesse et la sélection avant celle-ci du traitement adéquat afin de répondre au double challenge de maintenir le contrôle des crises convulsives tout en minimisant tout risque tératogène malformatif que des femmes épileptiques peuvent devenir mères.

Comparativement aux femmes enceintes non épileptiques, les femmes enceintes épileptiques ont un taux de mortalité plus important, une incidence (nombre de nouveaux cas) deux à trois fois plus élevée d’accouchement prématuré ainsi que d’autres complications maternelles et fœtales.

Plusieurs complications peuvent s’ajouter au cours du traitement, qui nécessitent une surveillance rigoureuse. Car les antiépileptiques risquent d’entraîner surtout des effets tératogènes malformatifs.

Pour éviter ou minimiser ces complications, les femmes épileptiques doivent être accompagnées dès l’âge pubertaire.

La collaboration entre le neurologue et le médecin obstétricien est importante afin d'optimiser la prise en charge de ces patientes par la planification de la grossesse et la sélection avant celle-ci du traitement adéquat afin de répondre au double challenge de maintenir le contrôle des crises convulsives tout en minimisant le risque tératogène.

Le choix de l’allaitement au sein est individuel, car il n’y a aucune contre-indication formelle de l’allaitement maternel chez les femmes épileptiques sous traitement.

Le respect de ces conditions renforce la confiance et favorise une vie reproductive rassurante des femmes marocaines épileptiques, conclut le travail scientifique supervisé par les docteurs M. Berrada, S. Ennigrou, S. Bellakhdar, B. El Moutawakil et MA. Rafai, publié dans le numéro de juin 2022 de la Revue marocaine de médecine pratique.

Il faut toujours rappeler que la grossesse et l'accouchement sont des moments précieux de la vie d'une femme. Cependant, ils peuvent être responsables de modifications physiologiques qui peuvent jouer un rôle favorisant la survenue ou l'aggravation de certaines pathologies neurologiques, comme l’épilepsie citée plus haut ou d’autres plus ou moins graves.

Ainsi, avec une grossesse, en entraînant une accélération de la coagulation du sang, il y a le risque de survenue d’une thrombose veineuse cérébrale.

La thrombose veineuse cérébrale correspond à une obstruction, localisée ou diffuse, des veines du cerveau, par un caillot sanguin. Cela peut être à l'origine d'un œdème cérébral, pouvant provoquer une ischémie, à savoir la diminution voir l'arrêt de l'irrigation sanguine du cerveau.

Les céphalées représentent également une plainte fréquente durant la période de grossesse, leur prévalence (c’est à dire nombre de cas d’une maladie dans une population à un moment donné) est estimée à 35,%.

La forme la plus fréquente des céphalées est la migraine qui survient essentiellement lors du premier trimestre et en post-partum (après l'accouchement).

D’autres pathologies potentiellement graves peuvent être déclenchées durant la grossesse, et par conséquent il faut les rechercher, les diagnostiquer, afin d'assurer la prise en charge adéquate. Car, certaines peuvent engager, par leurs complications, le pronostic vital de la future maman.

Une pathologie, relativement fréquente chez la femme en âge de procréer, est la sclérose en plaques, dont les rechutes surviennent essentiellement dans les trois premiers mois après l’accouchement, et dont les implications thérapeutiques ne sont pas toujours faciles à manier par les équipes médicales spécialisées.

La sclérose en plaques (SEP), maladie neurologique, est le plus souvent diagnostiquée entre l'âge de 20 et 40 ans. Plus de deux tiers des patients souffrant de SEP sont des femmes. Elles sont jeunes et en âge de procréer. Et l'influence de la grossesse sur le cours évolutif de la sclérose en plaques a été sujette à controverse. Longtemps il a été déconseillé aux femmes atteintes de SEP, d'avoir des enfants, arguant l'aggravation de la maladie au cours de la grossesse, mais surtout juste après l'accouchement. Ce n’est plus le cas aujourd’hui.

Dans une autre étude scientifique coordonnée par les équipes du département de neurologie du CHU Ibn Rochd de Casablanca, du laboratoire de génétique et pathologie moléculaire de la faculté de médecine de Casablanca et du laboratoire de recherche sur les maladies du système nerveux, neurosensorielles et handicaps de la même faculté, parue également dans le numéro de juin 2022 de la Revue pratique de médecine, la grossesse n'est pas contre-indiquée en cas de sclérose en plaques, mais doit être programmée, avec une fixation de la date de l'accouchement.

Et il y a des protocoles thérapeutiques bien définis pour mener à terme la grossesse et assurer l'accouchement dans les conditions les plus optimales.

Les coordinateurs de ce dossier de formation médicale continue sur la grossesse et les maladies neurologiques, le Dr Malika Berrada et le Pr Mohammed Abdoh Rafai, affirment que les différentes maladies neurologiques, découvertes ou déclenchées par la grossesse, requiert une collaboration stricte entre neurologue, médecin généraliste, pédiatre, et pour certaines situations, l'anesthésiste-réanimateur, pour une prise en charge et personnalisée de chaque patiente.

*Le Dr Anwar Cherkaoui est médecin. Lauréat du cycle supérieur de l'Iscae, il a été, trente années durant, le responsable de la communication médicale du CHU Ibn Sina de Rabat.

Par Anwar Cherkaoui
Le 26/06/2022 à 07h55