Il y a des jours et des périodes comme ça, où l’on se sent le cœur léger. C’est peut-être la fin de l’année, peut-être l’effet de la CAN aussi. J’aime le football et j’aime l’Afrique. Et j’aime plus particulièrement cette période de l’année où il fait plus froid que la moyenne, mais où les gens sont plus soigneux, plus attentionnés, se souhaitant plein de belles choses. Même les automobilistes font plus attention et semblent davantage respecter le code de la route (enfin, un tout petit peu plus, n’exagérons rien). Peut-être à cause de la pluie et du risque de déraper. Ou autre chose, allez savoir…
C’est une parenthèse, rien qu’une parenthèse, donc quelque chose d’éphémère, comme une poche de kangourou dans laquelle on se tient au chaud, mais pour un moment, rien qu’un moment. Ça vous donne l’envie d’oublier les trains en retard et le vide dans les verres remplis à moitié.
J’ai croisé un petit groupe de supporters portant les couleurs de différentes nations africaines. Ils ne parlaient pas tous la même langue, certains étant francophones et d’autres anglophones ou lusophones. L’un d’eux m’a abordé: «Assalamou alaykoum». L’autre m’a demandé en français: «Elle va où cette ligne de tram?». Et c’est un troisième qui m’a répondu, avec un sourire radieux: «Thank you sir».
Bien sûr, et comme tous les amoureux des Lions de l’Atlas, je suis porté par l’élan de la victoire lors du match d’ouverture face aux Comores et par la promesse d’une possible victoire finale. Je soupçonne cet élan et cette promesse d’être derrière mon envie soudaine, pour ne pas dire inhabituelle, d’être positif. Béatement positif.
«Comme tous les amoureux des Lions de l’Atlas, je suis porté par la promesse d’une possible victoire finale, que je soupçonne d’être derrière mon envie soudaine d’être positif.»
La dernière fois que le Maroc avait gagné la CAN, en 1976, j’étais trop jeune et les matchs n’étaient même pas télévisés. Il n’y avait pas 24 sélections comme aujourd’hui, mais seulement 8. Quand la radio a annoncé le sacre des Marocains, lors de cette édition de la CAN disputée en Ethiopie, j’ai fait la fête en buvant une de ces marques de soda qui n’existent plus: Judor ou Crush (on prononçait Jidor et Crouch), des limonades colorées qui collaient à l’esprit de fête et de partage. Et je suis descendu dans la rue jouer un match de foot avec les gamins du derb. Certains n’étaient pas au courant de la victoire des Marocains à la CAN: peut-être parce qu’ils n’avaient pas la radio. D’autres ne connaissaient même la Coupe d’Afrique des Nations. Et comme très souvent, notre match s’est terminé dans la confusion, avec un début de bagarre générale, à cause d’un but non accordé ou d’un tacle trop appuyé…
Alors voilà, je faisais partie de ces enfants qui supportaient des joueurs qu’ils ne regardaient presque jamais à la télévision. On avait leurs photos, qu’on collectionnait, et on avait la radio pour nous relater leurs exploits. En forçant le trait, bien entendu…
À l’époque, on ne les appelait pas encore les Lions de l’Atlas: cette désignation est venue bien plus tard, de la bouche de Kamal Lahlou, à l’époque journaliste sportif et professeur d’EPS, un personnage chaleureux, au cœur gros comme ça…
Allez, bonne chance à nos Lions et à nos amis africains, qui nous apportent leurs sourires et leur joie de vivre comme un cadeau de fin d’année. C’est peut-être eux la vraie raison de mon envie d’être positif.





