Nadia Kissi est encore sous le choc du drame qui a frappé sa famille suite au meurtre de son frère Bilal, une des victimes de l’assaut donné par la marine algérienne contre un groupe de quatre jet-skieurs –trois Franco-Marocains et un Marocain résidant en France. Mais cela ne l’empêche pas de penser aux Mchiouer, une autre famille proche également meurtrie par la perte d’un des siens, Abdelali Mchiouer, dont le corps est entre les mains des autorités algériennes.
Attristée mais d’une remarquable dignité, à l’image de toutes les familles endeuillées par un inqualifiable assassinat, Nadia Kissi revient sur les faits. Pour elle, «la réaction des autorités algériennes est tout sauf normale. Ces jeunes se sont juste égarés en mer. Mais ils (les soldats de la marine algérienne, NDLR) les ont assassinés et laissés dans les eaux. Grâce à Dieu, Bilal est revenu et son corps a été retrouvé par un pêcheur. Nous avons ainsi pu faire le nécessaire et l’enterrer. Ce n’est pas le cas d’Abdelali Mchiouer, dont la dépouille a été retrouvée en Algérie et que ce pays refuse de rendre à sa famille. Là encore, ce n’est pas normal. Il faut que la famille puisse faire son deuil. Il faut que sa femme et son fils puissent le voir une dernière fois et lui rendre un dernier hommage. Ce ne sera pas possible tant qu’il est toujours en Algérie.»
Nadia Kissi en appelle ainsi au soutien et à l’appui de la justice, tant marocaine que française. «Il faut que les deux pays soient de notre côté. Ce drame aurait pu arriver à n’importe qui et les victimes n’étaient en rien un danger pour l’Algérie. Ces personnes n’étaient pas armées. Elles ne transportaient absolument rien. C’était une balade en mer entre frères et amis qui se sont égarés en territoire algérien. Mais au lieu de leur montrer le chemin du retour vers le Maroc, l’armée algérienne leur a tiré dessus», insiste-t-elle, visiblement toujours incrédule.
Se trouvant aux côtés des familles, le président du Club des avocats au Maroc, Mourad Elâjoutti, avance la possibilité pour les familles des victimes de poursuivre l’Algérie devant la Cour internationale de justice puisqu’il s’agit d’un «crime contre l’humanité», qui est, de surcroît, loin d’être une première.
«Ces assassinats contreviennent tant à la Convention des Nations unies sur le droit de la mer que la Convention internationale sur la recherche et le sauvetage maritimes», explique l’avocat. Et d’affirmer que l’organisation qu’il préside se saisit de l’affaire pour porter toute l’assistance judiciaire dont les familles des victimes ont besoin.
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Pour rappel, Bilal et Mohamed Kissi, Ismaïl Snabi et Abdelali Mchiouer sont respectivement trois Franco-Marocains et un Marocain résidant depuis 30 ans en France. D’honorables jeunes citoyens sans histoires et tous pères de familles, les quatre ont fait l’objet, mardi 29 août, de tirs nourris de la part des garde-côtes algériens alors qu’ils s’étaient perdus en mer à bord de leurs jet-skis, dans l’espace maritime algérien limitrophe de la côte marocaine, près de Saïdia. Abattu par l’armée algérienne, Bilal Kissi a été enterré jeudi dernier à Bni Drar (province d’Oujda), alors que son frère a eu la vie sauve et pu fuir les tirs.
Abdelali Mchiouer était âgé de 40 ans au moment des faits. Originaire d’Oujda, il est arrivé en France alors qu’il avait 10 ans. Détenteur d’une carte de séjour en France, il travaillait en tant que commerçant dans un marché de Seine-Saint-Denis. Il avait un enfant, Oussama, âgé d’à peine 5 ans.
Âgé de 33 ans, Ismaïl Snabi a, lui, été pris en captif et est toujours en détention chez les autorités algériennes. Contrôleur technique, il est marié à une Algérienne et a trois enfants, de 8 et 6 ans pour les aînés ainsi qu’un nourrisson. Des informations quant à sa condamnation express à de la prison ferme par Alger circulent mais les autorités du pays voisin n’ont jusqu’ici fait aucune réaction officielle.