Huile d’olive: la hausse des prix ravive les inquiétudes sur les pratiques frauduleuses

Mise en bouteille d'huile d'olive.

Mise en bouteille d'huile d'olive. . DR

La hausse des prix de l’huile d’olive fait grincer des dents les consommateurs et ravive les inquiétudes des professionnels de la filière oléicole quant aux conditions de sa commercialisation. Rachid Benali, président d’Interprolive alerte sur les pratiques frauduleuses adoptées par certains commerçants.

Le 11/11/2022 à 15h16

Comme prévu, la campagne de récolte des olives, qui a démarré vers la mi-octobre dernier, est marquée par un faible rendement. Le recul de la production s’est directement reflété sur le prix de l’huile d’olive, qui oscille aujourd’hui entre 80 et 90 dirhams le litre au niveau des unités de trituration.

Si cette flambée du prix de l’huile d’olive vient s’ajouter aux hausses que connaissent d’autres produits alimentaires, fragilisant davantage le pouvoir d’achat du citoyen, elle attise, en outre, d’autres inquiétudes chez les professionnels du secteur.

D’après Rachid Benali, président de la Fédération interprofessionnelle marocaine de l'olive (Interprolive), l’évolution qu’a connue le prix de ce produit risque d’encourager les pratiques frauduleuses de la part des producteurs et commerçants souhaitant augmenter leurs marges de bénéfice. «Au Maroc, l’huile d’olive reste malheureusement largement consommée en vrac. Selon nos estimations, ce mode de consommation représente 85% de la consommation nationale et laisse le champ ouvert à diverses méthodes de fraude, vu qu’il n’y a pas vraiment de moyen de contrôler pour savoir si cette huile est frelatée», regrette-t-il.

S’agissant des pratiques illicites adoptées par certains producteurs et commerçants informels, Benali explique que celles-ci consistent, dans la majorité des cas, à mélanger l’huile d’olive avec des huiles de table d’origine végétale ou avec de l’huile de grignons d'olive. Bien que ces mélanges ne présentent aucun risque pour la santé du consommateur, il s’agit tout de même de pratiques interdites par la loi.

«Ce sont deux pratiques qui ne sont pas nocives pour la santé, et qui sont même tolérées dans certains pays, à condition qu’il soit indiqué sur l’emballage qu’il s’agit d’une huile mélangée. Dans notre pays, ces pratiques sont interdites et entrent dans le cadre de la fraude pure et simple», précise la même source.

Ces producteurs et commerçants malhonnêtes recourraient aussi à une pratique beaucoup plus inquiétante, qui consiste à ajouter des colorants ou d’autres produits chimiques permettant d’obtenir la même saveur que l’huile d’olive. «Aujourd’hui, nous entendons les gens parler de comprimés ou d'autres produits chimiques utilisés pour obtenir de l’huile d’olive avec le même goût et la même couleur que l’huile d’olive vierge. Si ces informations sont vraies, c’est vraiment très grave», s’alarme Benali.

Pour le président d’Interprolive, le seul moyen pour le consommateur de se protéger contre toute forme de fraude est de consommer uniquement de l’huile d’olive conditionnée et dont l’origine est connue. «Le consommateur doit savoir que la loi oblige tout producteur à vendre son produit dans des emballages fermés, étiquetés et qui comportent l’autorisation de l’ONSSA», explique-t-il, soulignant que ces mêmes règles doivent être prises en compte lors de l’achat de l’huile d’olive.

Pour se procurer de l’huile d’olive dont la qualité est sûre, le consommateur a le choix une centaine de marques, indique Benali. Si dans les grandes surfaces, ce sont généralement les produits de grandes marques qui sont commercialisées, il existe aussi de nombreuses coopératives et petites entreprises qui proposent des huiles conditionnées dans des bouteilles qui respectent les normes en vigueur. Ainsi, ce professionnel appelle les consommateurs à «encourager ces petits producteurs qui respectent la loi et qui commercialisent leurs produits dans les règles de l’art».

Les conditions de commercialisation de l’huile d’olive sont une préoccupation de longue date pour les producteurs et une véritable problématique qui entrave le développement de la filière. Selon le président d’Interprolive, «il est urgent de mettre fin aux formes informelles et illicites de commercialisation de l’huile d’olive. Notre pays perd énormément à cause de ces pratiques, aussi bien sur le plan économique qu’en termes de notoriété, vu que c’est un produit marocain emblématique et que plusieurs efforts sont fournis pour booster les exportations marocaines de cette denrée».

L’olivier est la principale espèce fruitière cultivée au Maroc, représentant 65% de la superficie arboricole nationale. Au cours de la campagne 2021-2022, la production d’olives avait enregistré une augmentation de 21% par rapport à la campagne précédente, pour atteindre 1,96 million de tonnes, selon les chiffres officiels.

Pour ce qui est de la campagne 2022-2023, Interprolive prévoit une baisse allant jusqu’à 50% de la production d’olives, au vu du déficit pluviométrique et de la hausse des températures.

Par Lina Ibriz
Le 11/11/2022 à 15h16