Coronavirus: la science, le charlatanisme et les défis à relever

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Revue de presseKiosque360. Les courants religieux et les forces populistes ont profité de la propagation du coronavivus pour évoquer la colère de Dieu contre les "infidèles", l’injustice et la dégradation des mœurs. Si la science ne gagne pas contre le virus, l’obscurantisme l'emportera.

Le 21/04/2020 à 21h30

En 2005, quand le tsunami a frappé l’Indonésie, la Thaïlande, l’Inde, le Sri lanka et les Maldives, certains ont attribué la cause de cette catastrophe à une «colère de Dieu» contre le tourisme sexuel et la traite des enfants en Asie. On entend aujourd’hui les mêmes hérésies religieuses chez certains chauffeurs de taxis et autres opportunistes du prêche occasionnel, qui expliquent que la propagation du coronavirus est «une mise en garde divine face à l’injustice et à la dégradation des mœurs». Autant dire que la prophétie des savants et philosophes du 19ème siècle, qui prédisaient la victoire de la science au 20ème siècle, ne s’est pas réalisée. En effet, ils étaient absolument certains que le triomphe de la science contribuerait à la disparition des épidémies et du charlatanisme. C’était sans compter avec l’apparition des virus SRAS, Ebola, Zika, H1N1… Aujourd’hui, c’est le Covid-19 qui défie le monde entier. Car la catastrophe, sans précédent, est d’ampleur planétaire.

Il va sans dire que l’ère de la démocratie a été entachée par la multiplication de courants autocratiques. En effet, autant la politique nazie d’Hitler a été une défaite cuisante des valeurs démocratiques durant le siècle précèdent, autant le monde subit aujourd'hui une nouvelle déroute avec la prolifération des courants religieux, des forces extrémistes de droite et des pulsions populistes destructrices. Quand Georges Bush junior et Donald Trump affirment que le peuple américain a été choisi par Dieu, rien ne les différencie d’Hitler qui avait décrété la supériorité de la race aryenne germanique sur toutes les créatures de la terre.

Dans un éditorial paru dans l’édition d’Al Ahdath Al Maghribia du mercredi 22 avril, Younes Dafkir souligne que l’humanité, qui croyait avoir tourné la page d’une histoire douloureuse, a fait plusieurs pas en arrière. Le progrès des législations internationales et la philosophie de la paix n’ont pas arrêté les guerres, l’esprit n’a pas vaincu la métaphysique obscure et la science n’est pas arrivée au bout des épidémies. Tous les précédents succès de l’humanité sont aujourd’hui réduits à néant comme si les bénédictions d’hier s’étaient transformées, aujourd’hui, en malédictions. Depuis quand le Coran est-il psalmodié dans l’enceinte du Congrès américain? Depuis quand entend-on un président américain demander à ses concitoyens les plus laïcs d’accomplir des prières pour implorer Dieu de les débarrasser du coronavirus?

Certains ont fait de cette pandémie «l’un des soldats de Dieu», d’autres considèrent la fermeture des mosquées comme le verrouillage du dernier sanctuaire à travers lequel les musulmans pouvaient s’adresser à Dieu pour vaincre ce virus. Certains ont eu recours aux plantes et au charlatanisme pour proposer des traitements contre le coronavirus. Beaucoup de musulmans qui n’avaient jamais accompli leur prière sont soudain devenus très pieux, non par obligation mais par peur de la mort. Du coup, si la science tarde à circonscrire cette pandémie et que le nombre des morts continue à augmenter, ce sont les forces religieuses et les groupes politico-ethniques qui finiront par triompher. Ils trouveront dans cette crise épidémiologique un terrain propice à la propagation de leurs idéologies obscures.

Par Hassan Benadad
Le 21/04/2020 à 21h30