A Taounate, au nord du pays, on trouve difficilement quelqu’un pour dire du mal de Noureddine Kchibel, le député PJDiste sorti de l’anonymat ce week-end pour des soupçons de triche aux examens du Bac (1e année). Normal, dans cette localité où le sens de la famille et de la tribu est très enraciné. La cinquantaine, Noureddine Kchibel est issu d’une modeste famille de Taounate, petite ville qui arrive à se tirer d’affaire grâce aux virements des MRE et aux (quelques-uns) de ses fils qui sont arrivés à se faire une place au soleil.
PJDiste par défautLe député Kchibel ne s’est jamais intéressé à la politique avant les élections communales de l’automne 2015. Son mentor n’est autre que Mohammed Abbou, l’ancien ministre et figure de proue du Rassemblement national des indépendants (RNI) dans la région. Sauf que, d’après nos sources sur place, il n’arrive pas à avoir l’accréditation du parti de la Colombe qui a toujours compté sur l’échiquier politique régional.
«Il a tapé aux portes de l’Istiqlal, mais aussi du Mouvement populaire, en vain», attestent nos sources. Au PJD, on lui déroule presque le tapis rouge. «Sa société emploie des centaines de salariés originaires de la région et une victoire électorale était acquise». Candidat d’abord dans la commune rurale de Moulay Abdelkrim, près de Kariat Ba Mohammed, il parvient à rafler cinq des sept sièges en jeu.
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Pour le scrutin législatif du 7 octobre 2016, c’est Abdelilah Benkirane himself qui se déplace à Taounate faire campagne pour la nouvelle recrue des islamistes. Et le résultat est au rendez-vous. La liste conduite par Noureddine Kchibel arrache près de 22.000 voix et était sur le point de remporter deux sièges.
Au Parlement, on ne connaît pas de faits d’arme notoires à ce député. Si ce n’est celui de bombarder les ministres avec des questions écrites sur des sujets très terre-à-terre: tel imam qui attend son salaire depuis des mois, tel petit douar enclavé ou alors tel dispensaire rural qui manque d’équipements…
Trois diplômes et trois smartphonesNoureddine Kchibel répète à qui veut bien l’entendre qu’il est bardé de diplômes, trois au total dans le secteur des télécommunications et du management.
«Il voulait avoir un nouveau diplôme, mais juste pour pouvoir poursuivre des études. C’est la connaissance qui l’intéresse», explique un de ses proches. Depuis 2004, Noureddine Kchibel est à la tête de la société Noukatel, entité spécialisée dans les télécommunications, l’éclairage public… Sa société a bénéficié du boom du milieu des années 2000. Actuellement, il fait fructifier ses affaires un peu partout au Maroc, mais aussi en Afrique.
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Tout cela sans jamais rompre les liens avec sa région. Il y est connu surtout, en plus d’être un homme d’affaires, en tant que grand mécène à l’écoute des populations et de leurs besoins. Cela peut être un coup de pouce au transport scolaire ou alors des excursions organisées pour les jeunes entre Taounate et Rabat. Et avec un pic d’activités pendant les fêtes religieuses.
De la charité électoraliste? «Il a été ainsi depuis longtemps et même avant de se lancer en politique ou d’intégrer le PJD», répond un de ses proches. Un peu naïf sur les bords aussi? Tout porte à le croire, d’après ses déclarations. Il n’aurait pas eu idée de tricher aux examens (épreuve de lange française), mais avait commis la gaffe de se rendre aux examens avec trois portables sur lui. Chose interdite par la loi.
Le PJD, éclaboussé par une autre et nouvelle affaire de moeurs, a vite réagi en ouvrant une enquête en interne, mais le mal semble déjà fait. La preuve en est une série de violentes réactions émanant de responsables et élus islamistes. Sur sa page FB, la députée islamiste Saoud Boulaich a tout simplement traité de «chiens» ceux qui avaient critiqué son «frère» Noureddine Kchibel…