Le journaliste Ignacio Cembrero suit avec beaucoup d’inquiétude la crise entre le Maroc et l’Espagne. Mais il est loin, le temps où sa signature claquait dans El Pais… Depuis le site d’informations en ligne où il fait désormais des piges, El Confidencial, il lit tous les jours des articles de ses confrères et consœurs sur un sujet dont il pensait pourtant détenir des droits d’auteur: les relations entre le Maroc et l’Espagne. Alors que ses collègues journalistes écument leur carnet d’adresses pour arracher la moindre petite information pour que leur média ne soit pas largué, dans un dossier qui intéresse l’opinion publique espagnole, le soi-disant «spécialiste du Maroc» n’apporte aucune valeur ajoutée à sa publication.
A mesure que la crise entre les deux pays occupe la Une des journaux espagnols, Cembrero craint de perdre son fonds de commerce. Après quelques hésitations et des articles basés sur des informations diffusés par les collègues, Cembrero a décidé de produire un article de fond… à coups d’affabulations et de contrevérités.
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Avec cette accroche «le gouvernement marocain ne joue aucun rôle », Cembrero a publié un article intitulé «Maroc: un roi et trois conseillers, c’est ainsi qu’une crise avec l'Espagne se décide». Sur son compte Twitter, Cembrero a fait la promotion de son article en trois langues: espagnol, anglais et français.
A lire le titre de l’article et le post sur Twitter, on penserait que c’est le Maroc qui a déclenché la crise avec l’Espagne. D’ailleurs, Cembrero décline cette contrevérité tout au long de son article, en omettant de dire, ne serait-ce qu’une seule fois, que c’est l’admission du chef du Polisario sous une fausse identité en Espagne qui est à l’origine de cette même crise. C’est le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez et sa ministre des Affaires étrangères, Arancha Gonzalez Laya, qui ont décidé d’une crise avec le Maroc et non pas le roi Mohammed VI, son conseiller Fouad Ali El Himma, le patron du contre-espionnage marocain, Abdellatif Hammouchi et le patron de l’espionnage marocain, Yassine Mansouri.
Cembrero dispense l’exécutif espagnol de toute responsabilité dans la crise entre le Maroc et l’Espagne. Mieux encore, il ne nomme même pas une seule fois dans son article les vrais protagonistes de cette crise: Pedro Sanchez et Arancha Gonzalez Laya. La crise entre l’Espagne et le Maroc s’intensifie au fur et à mesure que ces deux protagonistes refusent d’initier des actions pour la dénouer. Ils ont minimisé les mises en garde des responsables marocains à seule fin de ne pas admettre la gravité de l’offense faite au Maroc, en déroulant le tapis rouge à l’homme qui a déclaré la guerre aux Marocains.
Il n’est pire aveugle que celui qui ne veut pas voirEn plus du mensonge d’avoir écrit que c’est le Maroc qui a décidé d’une crise avec l’Espagne, Cembrero ne reconnaît aucun rôle au gouvernement marocain. Pourtant, un homme a été sur tous les fronts depuis l’admission de Brahim Ghali en Espagne: Nasser Bourita, le chef de la diplomatie marocaine. A la fois engagé sur les fronts diplomatique et médiatique, il est omniprésent. Il faut s’appeler Ignacio Cembrero pour ne pas voir Nasser Bourita.
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Reconnaître le rôle, ne serait-ce qu’à un seul membre du gouvernement marocain, nuirait à la cohérence du récit déroulé par Cembrero, qui cherche à circonscrire le déclenchement et la gestion de la crise à un cercle restreint de quatre personnes. Aucun autre journaliste espagnol n’avait fourni une analyse aussi brillante de la crise qui oppose le Maroc à l’Espagne. Le supposé «spécialiste du Maroc» a l’impression d’avoir fait le job avec une trame, cousue de mensonges et de sensationnalisme.
Les amateurs de révélations sensationnelles apprendront sur El Confidencial, que le conseiller du Roi, Fouad Ali El Himma, organise ses réunions avec les autres conseillers du souverain dans «la cafétéria d’un luxueux hôtel» à Rabat. Cembrero qualifie de «curieux» cet espace de travail que Fouad Ali El Himma choisit de substituer à la discrétion du palais royal.
On peut comprendre la pression que subit en ce moment Cembrero, dont la voix est devenue inaudible -le média dans lequel il publie ses articles méritant bien, à cet égard, son appellation-, à un moment où il aurait espéré faire une démonstration de force de la qualité de ses sources et de ses analyses. En termes de sources, Cembrero cite «des sources proche du palais Royal marocain». Autant dire, du vent. Quant à l’analyse, elle est tendancieusement orientée pour exonérer l’exécutif espagnol de toute responsabilité dans la crise qui oppose Madrid à Rabat. Ignacio Cembrero s’éloigne donc de plus en plus du journalisme et ne craint plus de proclamer qu’il sert un agenda.