Les membres de la majorité gouvernementale «se chamaillent» au sujet d’une question de procédure relative à une proposition de loi visant l’interdiction du cumul des mandats des députés et des conseillers. Qui a raison et qui a tort? Le360 a fait le tour de la question avec des responsables politiques.
Le groupe de l’Union socialiste des forces populaires (USFP) à la Chambre des représentants vient de présenter une proposition de loi sur le non-cumul des mandats. Les socialistes estiment qu’une telle mesure est à même d’épargner aux caisses de l'Etat une dépense de plusieurs millions de dirhams. Le texte prévoit que les députés, les conseillers, les présidents de communes, les membres des chambres professionnelles n'aient droit à l'avenir qu'à un seul mandat, sans possibilité de cumul.
Lire aussi : L’USFP appelle à mettre fin au cumul des indemnités électorales
L'initiative est louable. Mais pour y parvenir, il semble que la procédure ne soit pas la bonne. Le groupe USFPiste crie sur tous les toits en accusant les autres acteurs de la majorité de maintenir un blocage sur cette proposition de loi. Il parait se jouer là une sorte de pièce de théâtre où les spectateurs semblent applaudir les socialistes tout en sifflant les autres parties de la majorité, accusées de «tergiversation et de mauvaise foi».
Un «non-sens»
Le Parti de la justice et du développement (PJD), dont nombre de responsable cumulent des fonctions de député et de maire, est particulièrement pointé du doigt, décrié pour les reports répétitifs de la tenue de la Commission parlementaire de l'Economie et des finances, que préside le député PJDiste Abdellah Bouanou. Dans une déclaration à le360, ce dernier estime que la proposition de l'USFP sur l'interdiction du cumul des mandats est un «non-sens, elle roule en sens interdit».
Le chef du groupe istiqlalien, Noureddine Mediane partage ce même avis, assurant que la vraie et seule voie pour parvenir à l'interdiction du cumul des mandats doit passer par «un amendement de la loi organique sur les mandats des élus». Selon lui, c'est la commission parlementaire de l'Intérieur qui est, seule, habilitée à statuer sur «l'interdiction du cumul des fonctions».
Autrement dit, «il faut un amendement de la loi organique et non une proposition de loi pour régler ce problème». Il faut donc aller à la source pour couper l'eau, explique-t-il.
Lire aussi : Cumul des fonctions: Ces ministres qui veulent le beurre et l’argent du beurre !
L'USFP est consciente du bien-fondé de ce processus législatif, affirme-t-on au sein du parti de la Rose. Mais pourquoi les socialistes tiennent-ils mordicus à cette proposition qui n’a pourtant pas la moindre chance d’aboutir?
«A supposer que cette proposition sur l'interdiction du cumul soit adoptée par la commission de l'Economie et des finances, la Cour constitutionnelle la rejetterait en dernier ressort car c'est la commission de l'Intérieur qui est compétente en la matière», assurent plusieurs députés.
Quid du cumul des salaires?
Reste la question du cumul des salaires, une proposition de loi avancée par le PJD et visant à mettre fin à ce cumul.
«Quand on interdit le cumul des fonctions, on interdit automatiquement le cumul des indemnités», a-t-on souligné. Mais il existe une autre solution, plus efficace, pour limiter le cumul des salaires: le chef du gouvernement peut réduire les hauts salaires sur la base d'un décret imposant un plafonnement.
Lire aussi : Interdiction du cumul des indemnités: un préalable indispensable pour la moralisation de la vie publique
Saâd-Eddine El Othmani a les moyens d'intervenir pour réduire le train de vie des élus et des hauts responsables et fonctionnaires de l'Etat en plafonnant les salaires à un total de 1.2 million dirhams par an.
Il y a actuellement 100 députés et conseillers dont le salaire peut atteindre 80.000 dirhams par mois, dépassant ainsi celui d'un ministre.
«Il suffit donc au chef de l’Exécutif de faire montre de bonne volonté en publiant un décret plafonnant les indemnités de ces représentants qui perçoivent un double salaire, voire plus», estime un député de la majorité.