Le gouvernement fait peu de cas des propositions de loi déposées par les parlementaires. Ce n’est pas propre au gouvernement El Othmani; la prééminence de l’Exécutif en matière de législation est une réalité de notre système politique. La priorité est donc donnée aux projets de loi élaborés et présentés par le gouvernement, et ce depuis toujours. Même si cela doit lui coûter une fortune de booster la production législative des députés pour ne pas en tenir compte à la fin. D’après le quotidien Al Akhbar qui rapporte l’information dans son édition du lundi 3 mai, le gouvernement dépense, en effet, pas moins de 60 millions de dirhams en subventions accordées aux groupes parlementaires. Lesquelles subventions, note le quotidien, servent, en théorie, à encourager les groupes parlementaires à améliorer leur productivité au niveau de la législation.
En clair, relève Al Akhbar, le gouvernement verse des subventions aux députés pour produire des propositions de loi qui finissent à la trappe, faute, justement, d’avis favorable de l’Exécutif pour leur programmation, examen et adoption. Dans le jargon législatif, on parle d’«interaction positive» du gouvernement. Sans cela, les propositions déposées par les parlementaires resteraient en l’état jusqu’à leur abandon à la fin de la législature.
Concrètement, le gouvernement aura interagi positivement à seulement 4% des propositions de loi déposées par les parlementaires depuis le début de l’actuelle législature, il y a plus de quatre ans. Bien sûr, le gouvernement a ses raisons de rejeter le reste, soit 96% des textes présentés par les élus. Entre autres raisons invoquées, et non des moindres, la qualité législative de ces propositions qui laisse à désirer. Nos parlementaires ne sont pas assez outillés, en termes de connaissances légales, pour produire un texte législatif de qualité.
Autre motif de rejet des propositions de loi invoqué par l’Exécutif: leur caractère décalé par rapport à l’agenda législatif. En d’autres termes, le gouvernement ne peut admettre qu’il agit et légifère dans un sens et les parlementaires dans un autre. Ce qui fait que, sur les 260 propositions de loi que les députés ont présentées à la première Chambre, le gouvernement n’a donné son feu vert qu'à 12 textes qui ont d’ailleurs été injectés dans le circuit législatif et dont un peu plus de la moitié a déjà été adoptée définitivement.