Lundi dernier, Mohamed Benattou, ambassadeur d’Algérie en Mauritanie, a publié un communiqué officiel dans lequel il a qualifié certains journalistes mauritaniens de «gang médiatique ignoble», «vendus», «mercenaires» au service du Royaume du Maroc.
Le crime de ces derniers est tout simplement d’avoir dénoncé le scandale entourant la Foire d’exposition des produits algériens qui se tient actuellement à Nouakchott. En effet, pas un seul opérateur évènementiel mauritanien n'a été impliqué et la manifestation se déroule, selon la presse mauritanienne, comme s’il s’agissait d’une exposition en plein territoire algérien.
En attendant une réaction officielle, suite à la saisine des autorités mauritaniennes compétentes par l’Association des journalistes mauritaniens et le Syndicat des journalistes mauritaniens, un groupe de journalistes locaux a déjà pris les devants et réagi, à travers un communiqué commun, pour dénoncer vigoureusement le contenu du communiqué de l’ambassade algérienne à Nouakchott.
Ainsi, les journalistes mauritaniens estiment que ce communiqué est «l'une des déclarations les plus stupides de l'histoire de la diplomatie, la plus idiote et la plus dangereuse», écrit le correspondant mauritanien du site libanais Elalph, qui relate la réaction des journalistes mauritaniens.
Sous le titre «Des journalistes mauritaniens dénoncent un communiqué de l’ambassade d’Algérie à Nouakchott», le site libanais ajoute que la sortie de l’ambassadeur, lundi dernier, est qualifiée de «tentative manifeste d'impliquer Nouakchott dans des guerres fictives», car cette sortie diplomatique semble cacher «des injonctions adressées aux autorités mauritaniennes» de façon indirecte, estiment les signataires mauritaniens.
Déjà, lundi dernier, le site mauritanien rapideinfo a rapporté une lettre du journaliste et chercheur mauritanien, El Hacen Ould Madik, qui a été le premier à réagir au communiqué de l’impénitent diplomate algérien, lettre intitulée «Non, votre excellence l’ambassadeur, la Mauritanie n’est pas une wilaya algérienne pour y exercer votre tutelle étrangère».
Mohamed Benattou est sollicité pour expliquer «pour quelle raison il se permet de dénier et critiquer la liberté des journalistes mauritaniens qui ont le droit d’exprimer leur opinion ou leur positionnement politique». Et de lui demander, sur le ton du défi: «Croyez-vous que la Mauritanie est une wilaya algérienne ou un simple prolongement des camps sahraouis de Lahmada près de Tindouf?». «Ou bien pensez-vous que les Chinguittois (nom ancien des Mauritaniens, Ndlr) ne doivent avoir comme opinion que celle de vos généraux que vous érigez en pharaons et qui guident vos pensées, réflexions et vision des choses?», questionne encore le journaliste mauritanien.
Tout en conseillant à l’ambassadeur algérien de présenter des excuses officielles pour le tort fait à toute la Mauritanie, l’auteur de la lettre lui conseille également de prendre exemple sur l’ambassade du royaume du Maroc à Nouakchott, qui n’a jamais, même pas une seule fois, porté atteinte à la liberté d’expression des journalistes mauritaniens, ni manqué de respect aux citoyens et responsables du pays d’accréditation.
Pour sa part, le site anbaa.info revient sur la réaction des journalistes mauritaniens au communiqué. Il y rapporte que ses auteurs ont mis en garde contre «un plan algérien qui vise toute la Mauritanie, et qui commence déjà avec les journalistes».
Ces derniers ajoutent qu’il «il est clair que l'Algérie, qui est sous l'emprise des généraux de l'armée depuis des décennies, ne comprend pas que la Mauritanie lui soit supérieure en matière de liberté de la presse, de médias, de liberté d'expression, de respect de l'opinion de l’autre, de choses qui ne s'achètent pas mais qui se gagnent, et les Mauritaniens les ont gagnées grâce à la longue lutte de leur presse contre l'oppression, l'autoritarisme, la dictature et l'emprisonnement».
Ils ont également accusé l’Algérie de tenter de «contrôler, mépriser et asservir la presse mauritanienne au service de son agenda politique, bien qu'il s'agisse d'une tentative risible, mais qui révèle le vrai visage de cette ambassade algérienne, qui suscite crainte et répulsion, et appelle à la plus grande vigilance de notre part.»