La Kabylie proclame son indépendance: un revers historique pour le régime algérien

Ferhat Mehenni, président du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK).

Le Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie a annoncé dimanche dernier, à Paris, la création d’une République fédérale kabyle dont le président est Ferhat Mehenni. . DR

Le Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie a annoncé dimanche dernier, à Paris, la création d’une République fédérale kabyle. Cette décision met en lumière les contradictions du régime militaire algérien, longtemps autoproclamé défenseur des droits des peuples, et risque de raviver les tensions internes dans un pays déjà fragilisé. Cet article est une revue de presse tirée du quotidien Al Ahdath Al Maghribia.

Le 15/12/2025 à 20h14

La carte de la séparation, longtemps brandie par le régime algérien et utilisée comme levier dans ses conflits avec ses voisins, se retourne aujourd’hui contre lui. La décision annoncée dimanche dernier à Paris par le Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie, proclamant officiellement l’indépendance de la région vis-à-vis de l’Algérie, marque un tournant symbolique fort, mis en scène lors d’une cérémonie festive.

Cette décision, dont la date était connue depuis un certain temps, a été précédée par un climat de fébrilité, indique le quotidien Al Ahdath Al Maghribia dans son édition du mardi 16 décembre. La région de Kabylie a vécu au rythme d’un important déploiement sécuritaire et d’un état d’alerte décrété par les autorités militaires, face à la détermination affichée par la direction du mouvement, majoritairement installée à l’étranger, d’annoncer la proclamation d’une République fédérale kabyle le 14 décembre. Une annonce finalement concrétisée en présence de nombreux militants et de personnalités se déclarant solidaires de la cause.

L’événement constitue un coup dur pour le régime militaire algérien, qui n’a cessé de se présenter comme un fervent défenseur des peuples opprimés et de leur droit à l’autodétermination, mobilisant à cette fin les ressources de l’État. Il se retrouve désormais face à une contradiction majeure. Soit il confirme son attachement affiché à ce principe en reconnaissant le droit du peuple kabyle à décider de son avenir, soit il est contraint, a minima, d’ouvrir un débat ou une consultation sur le maintien de la région au sein de l’Algérie, lit-on.

Ironie du sort, cette situation frappe au cœur une doctrine politique algérienne historiquement fondée sur le soutien aux mouvements séparatistes, notamment au Maroc. Alger est même allée jusqu’à accueillir récemment des militants séparatistes kurdes, arborant leur drapeau aux côtés de celui du Polisario, une initiative qui a provoqué l’ire de la Turquie et de la Syrie. Dans le même registre, l’Algérie est accusée d’encourager ouvertement des dynamiques séparatistes au Mali, où des organisations touarègues de l’Azawad ont annoncé la création d’une nouvelle alliance politique baptisée « Coalition des forces pour la République », placée sous la direction du religieux Mahmoud Dicko, installé en Algérie depuis la fin de l’année 2021, énumère Al Ahdath Al Maghribia.

De son côté, le Maroc s’est abstenu, jusqu’à présent, d’exploiter la question kabyle en réponse à la politique algérienne de soutien au séparatisme. Rabat a privilégié une approche prudente, mettant en garde contre les dangers de ce type de stratégie. Le représentant permanent du Maroc auprès des Nations unies, Omar Hilale, n’a cessé, dans ses interventions, d’alerter sur le coût élevé que pourrait représenter pour l’Algérie le recours systématique à cette carte.

Malgré ces avertissements, le régime militaire algérien est resté inflexible, allant même plus loin en autorisant récemment l’ouverture d’un bureau de représentation de ce qu’il a appelé la « république rifaine ». Une initiative qui s’est retournée contre Alger.

Plusieurs observateurs de la scène algérienne avaient déjà averti que ces choix politiques risquaient d’attiser les tensions internes, en ravivant des dossiers sensibles, notamment en Kabylie, à l’ouest du pays et dans le sud, où la question de l’Azawad reste particulièrement inflammable. Ces dynamiques s’inscrivent dans un contexte de crispation politique persistante, qui fait planer des doutes sur la capacité du pouvoir à se maintenir.

Pour de nombreux analystes cités par Al Ahdath Al Maghribia, le recours répété par le régime algérien à la carte du séparatisme traduit un épuisement de ses marges de manœuvre politiques. En misant sur des stratégies externes risquées, il aurait sacrifié la stabilité interne au profit de la survie du système.

Les signaux actuels laissent entrevoir une possible déstabilisation intérieure, certains n’excluant pas, à terme, une fragmentation du pays, avec la Kabylie au nord et les régions touarègues du sud en première ligne. Un opposant algérien a d’ailleurs qualifié cette démarche du pouvoir de « folle et irresponsable », estimant qu’elle pourrait ouvrir une période de graves turbulences pour l’Algérie.

Par La Rédaction
Le 15/12/2025 à 20h14