Dans une longue interview parue dans les colonnes du quotidien Assabah de ce mercredi 23 juin, Mohand Laenser, l’inamovible secrétaire général du Mouvement Populaire, qu’il dirige depuis maintenant 30 ans, refute le rôle secondaire qu’on a l’habitude d’attribuer à son parti sur l’échiquier politique.
Revendiquant d’être historiquement le premier parti marocain à faire front, dans l’opposition, à ce qu’il appelle «le parti unique», une référence à peine voilée à l’Istiqlal, parti qui l’a enfanté par césarienne, Laenser affirme que son parti reste incontournable. Mais à la question de savoir pourquoi son parti, qui a plus de 60 ans d’existence, n’a jamais dirigé un gouvernement, à l’instar de l’Istiqlal, de l’USFP, du PJD, etc., il répond en réfutant tout simplement la posture qu'on lui accolle, selon laquelle son parti est condamné à jouer un éternel rôle, celui de «compléter les majorités gouvernementales».
D’ailleurs, Assabah lui rappelle sa récente rencontre avec les dirigeants du PJD, en lui demandant s’il ne s’agirait pas d’une nouvelle manœuvre politicienne du MP, dont l’objectif serait de «réserver» une place au sein d’une éventuelle et prochaine coalition dirigée par le PJD.
Laenser a répondu qu’effectivement certains adversaires politiques, dans l’actuelle coalition gouvernementale, ont qualifié cette rencontre comme une tentative de sceller une «coalition tribale» entre le PJD et le MP. Mais il s’en défend, affirmant qu’il est prématuré de parler de renouvellement de l’alliance gouvernementale entre ces deux partis.
Cependant, celle-ci reste bien possible en fonction des résultats des prochaines élections, surtout, ajoute Laenser, qu’il ne faut pas oublier qu’elle n’est pas contre-nature, car le MP et le PJD sortent de la même matrice, vu la proximité qui liait leurs fondateurs respectifs, feus Mahjoubi Aherdane et Abdelkrim El Khatib.
Reconnaissant que le Mouvement populaire a perdu beaucoup de ses élus depuis 2009, soit 1800 conseillers communaux et 27 parlementaires, qui lui ont été «tractés» par ce qu’il appelle «un nouveau parti», Laenser estime que son parti garde intact son poids sur l’échiquier politique national.
Niant toute lutte intestine pour briguer le poste de secrétaire général du parti, il reconnaît qu’une scission pointe à l’horizon, car explique-t-il, il est du droit de n’importe quel dirigeant du MP de créer un parti politique, dans le respect des lois et procédures en vigueur dans le pays. Mais à condition aussi que ce dirigeant n’usurpe pas le nom de son parti d’origine. En d’autres termes, Laenser estime que la dénomination «Mouvement populaire», ou «Union des Mouvements populaires», est une «marque déposée» historique que personne ne peut s’approprier.
Concernant d’éventuelles craintes qu’il soit lui-même éjecté de sa circonscription électorale traditionnelle de Boulemane par la féroce concurrence de la candidature du Rassemblement national des indépendants (RNI), Laenser estime que le pluralisme est sacré, mais la compétions électorale doit être loyale. «Ce qui me dérange en particulier, et qui porte atteinte à l’action politique en général, c’est quand la concurrence devient déloyale, à travers certaines pratiques qui portent atteinte à la démocratie et à la transparence. Je veux parler ici de certaines œuvres dites sociales ou de bienfaisance, que l’on n’a pas vues depuis 5 ans, et qui interviennent subitement au risque de peser sur le choix des citoyennes et citoyens. Mais rassurez-vous, Boulemane restera une citadelle du MP».