La participation du ministre chargé des Affaires générales du gouvernement à un sit-in organisé, dans la nuit de mardi à mercredi, par les employés de Centrale-Danone devant le Parlement, n’a laissé personne indifférent. Et les plus virulentes des critiques qu’il s’est attirées émanent de son propre clan, le PJD. Le geste de Lahcen Daoudi a suscité la colère de plusieurs membres de la direction de son parti, affirme ainsi le quotidien Al Massae dans son édition du jeudi 7 juin. Certains ont qualifié sa sortie d’«irresponsable», alors que d’autres parlent de «faute grave» pouvant motiver un renvoi du gouvernement et du parti.
C’est ainsi que le secrétaire général-adjoint du parti, Slimane El Omrani, s’est dit étonné de voir le ministre manifester parmi les employés de Centrale Danone contre la campagne de boycott. Un ministre ou un parlementaire, a-t-il expliqué, dispose de suffisamment de moyens et d’outils pour faire face à une telle situation à l’intérieur des institutions. Il ne convient pas à un membre du gouvernement, ajoute-t-il, de manifester dans la rue, à moins qu’il ne s’agisse de grandes questions impliquant toute la Nation ou la «Oumma».
Pour sa part, Nabil Chikhi, chef du groupe parlementaire du PJD à la deuxième Chambre, a qualifié d’absurde le comportement du ministre de son parti. Il estime que ce comportement n’est pas pas digne d'un membre du gouvernement, d'autant que Daoudi prend position aux côtés des employés d’une entreprise privée qui protestent contre une campagne de boycott suivie par une tranche appréciable de la population. On peut comprendre que le gouvernement puisse prendre position via des déclarations officielles, mais de là à ce que l’un de ses membres sorte dans la rue pour manifester! Cela relève de l’aberration et d’un mépris des responsabilités qui lui incombent, a ajouté Chikhi.
La députée de Casablanca et vice-présidente de la région de Souss-Massa, Amina Maelainine s’est, de même, jointe au clan des dirigeants mécontents, en accusant implicitement le ministre de contribuer à un processus de mise à mort symbolique du parti et de dilapidation de son capital de popularité. D’après le quotidien Al Akhbar, qui aborde également le sujet dans son édition du 7 juin, les réactions ne se sont pas arrêtées à ce stade. D’autres parlementaires et dirigeants du parti ont tout bonnement appelé au limogeage de Lahcen Dadoui, après l’avoir contraint à s'expliquer sur son comportement.
Bref, affirme Al Akhbar, la sortie de Daoudi risque bel et bien de provoquer un séisme ravageur au sein du PJD. Le comportement du ministre chargé des Affaires générales du gouvernement est d’autant plus incompréhensible, estime le journal, qu’il a pris part à une manifestation organisée par l’UGTM, syndicat affidé à l’Istiqlal, et la CDT, deux entités de l’opposition. Ce qui lui a d’ailleurs valu des réactions peu amènes de la part des manifestants eux-mêmes qui l’accusent, notamment, d'avoir voulu surfer sur leur manifestation pour engranger des profits politiques et électoraux.
De son côté, le quotidien Al Ahdath Al Maghribia, qui revient également sur la question dans son numéro du 7 juin, affirme que le ministre se rendait initialement au Parlement pour assister à une réunion de la commission des secteurs productifs, consacrée aux retombées de cette campagne de boycott sur le secteur laitier. Et, quand il est passé devant les contestataires, il les a rejoints spontanément. Le journal affirme qu’une fois mis au courant, le chef du gouvernement a piqué une colère. Il a fait savoir à son ministre que ce comportement était irresponsable et inadmissible.
Lahcen Daoudi, poursuit Al Ahdath Al Maghribia, affirmera plus tard, pendant la réunion de la commission, qu’il avait agi en tant que citoyen. «Cette campagne a causé beaucoup de dégâts aux éleveurs et à la société et risque de porter atteinte à l’attractivité du Maroc pour les investisseurs; aussi est-il est du devoir de tout un chacun de tout tenter pour mettre fin à cette campagne», a-t-il déclaré.