Abdelhak El Mrini, porte-parole du Palais et historiographe du royaume, à coeur ouvert

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Revue de presseKiosque360. Abdelhak El Mrini, porte-parole du Palais et historiographe du royaume raconte comment il est passé du statut de professeur de lycée à celui de haut cadre de la maison royale.

Le 13/06/2019 à 20h41

Dans l’imaginaire collectif des Marocains, le docteur Abdelhak El Mrini représente le cérémonial protocolaire très rigoureux du Palais royal. Il est le gardien des traditions établies que ce soit en tant qu’ex-directeur du protocole et de la chancellerie, ou aujourd’hui en tant que porte-parole du palais et historiographe du Royaume. Mais cette rigueur qui l’habite en servant le trône, s’estompe quand on découvre l’homme. Le prestige de la fonction n’éclipse aucunement sa bonté et sa cordialité tout comme son érudition n’occulte pas sa modestie innée. 

Né en 1934 à Rabat, El Mrini est issu d’une famille qui a vécu à Fès et dont le grand père avait occupé plusieurs postes au Palais royal du temps du sultan Moulay Youssef. Il est écrivain et historien qui a pour seule passion l’écriture et la lecture: «je trouve un immense plaisir dans la recherche et l’écriture. Le célèbre poète arabe El Mutanabbi n’avait-t-il pas dit que le livre est le meilleur compagnon de l’homme que ce soit par la lecture, le commentaire, le résumé ou la déduction», argumente ce fou du savoir, lors d’un entretien accordé à l’hebdomadaire Al Ayyam, publié dans son édition n° 856 du 13 au 19 juin.

Il est passé par le mssid (école coranique) avant de rejoindre l’école primaire à Salé puis le célébrissime collège Moulay Youssef de Rabat par où sont passés plusieurs élites dont notamment Abderrahmane El Youssouf et Abderrahim Bouabid. Il a décroché sa licence puis son diplôme de hautes études avant de soutenir un doctorat à Strasbourg et un autre à la faculté des lettres de Fès. 

Cet ex-professeur de lycée est d’une polyvalence rarissime puisqu’il peut traiter des sujets qui vont de l’histoire de l’armée marocaine à la planification familiale en passant par la poésie du Jihad et l’épopée Mohammed V. Al Ayyam rapporte que cet auteur de plusieurs ouvrages a remporté le prix littéraire du Maroc en 1968 pour son livre «l’armée marocaine à travers l’histoire». El Mrini raconte cette distinction avec fierté d’autant, ajoute-t-il a été primé «en compagnie de professeurs émérites comme Mohamed Aziz Lahbabi (pour son livre le personnalisme musulman), Abdelkrim Ghallab (le passé enterré) et Abdelouahab Benmansour (les tribus du Maroc)». 

Très porté sur les études de langues et de la poésie, Abdelhak El Mrini a même préparé et présenté plusieurs émissions. C’est d’ailleurs suite à ces quelques passages à la télévision qu’il fut remarqué et appelé en 1965 pour intégrer la direction du protocole royal où il fera toute sa carrière jusqu’à aujourd’hui.

El Mrini raconte ce changement dans sa vie en employant une belle métaphore: «ma vie a pris un virage à 360 degrés puisque je suis passé du statut d’un professeur de lycée à celui d’un élève qui apprend dans la grande école de la vie». On le connaît très discret, mais il devient de plus en plus réservé quand quelqu’un le questionne sur sa fonction d’ex-directeur du protocole. Il ne pipe pas mot et sur son visage on découvre tout le sérieux et la rigueur qu’exige le métier d’un serviteur du trône. 

Il s’est, par contre, confié sans gêne, sur ses prérogatives en tant qu’historiographe du royaume: «ma mission consiste à acter les diverses activités royales ainsi que les déplacements du souverain au Maroc et à l’étranger en plus d’autres événements qui ont des rapports avec la famille royale et ses activités. Je dois en outre préparer des réponses aux questions qui, le cas échéant, seraient posées à l’historiographe du royaume sur un événement important qui jalonne l’histoire du Maroc».

L’historien s’est toutefois étalé sur le titre du commandeur des croyants que portent les sultans du Maroc depuis la nuit des temps. «La Commanderie des croyants est une charge dévolue au souverain marocain que l’on ne trouve nulle part ailleurs dans les pays musulmans. Elle constitue un pilier essentiel pour notre pays vu la synergie qui caractérise ses composantes ethniques et l’unicité du rite malékite tant au niveau doctrinal, du soufisme ou de la récitation du coran», explique-t-il. Et Abdelhak El Mrini de préciser que la dynastie alaouite a donné une grande importance à ce titre pour que ses rois préservent l’essence de la religion musulmane qui prône la tolérance et bannit le radicalisme. Autant dire, ajoute le porte-parole du palais que «le commandeur des croyants (Amir Al Mouminine) garantit la liberté de culte car le terme “Mouminoune” englobe tous les gens du livre». 

Cet homme qui est féru de la littérature, de la poésie et de l’étude des langues aurait pu devenir un militaire si la chance lui avait souri: «J’ai fait deux tentatives pour être enrôlé dans l’armée à Saint-Cyr en France et l’école militaire de Meknès. Mais le destin en a voulu autrement pourtant j’ai réussi dans les concours d’admission. Aujourd’hui, je suis devenu militaire avec ma plume et non pas avec mon arme». 

El Mrini l’historien garde dans son cœur deux idoles qu’il n’oubliera jamais en l’occurrence Mohammed V et De Gaulle. Deux combattants, dit-il, qui ont sacrifié tout pour libérer leurs pays de la colonisation et de l’humiliation. Quant à l’homme discret et pacifiste, il ne départit jamais de sa devise: «Celui qui me fait du mal je le lui rends en bien jusqu’à ce que mon bien gagne son mal».

Par Hassan Benadad
Le 13/06/2019 à 20h41