Le Conseil des prud'hommes de Paris a reconnu coupable lundi la SNCF accusée de "discrimination dans l'exécution du contrat de travail" et "dans les droits à la retraite" de plusieurs centaines de Chibanis marocains. Embauchés au début des années 70 comme contractuels, ces 832 cheminots d'origine marocaine, qui ont déposé une requête, assurent avoir été bloqués dans leur carrière du fait de leur origine et ainsi pénalisés au moment de prendre leur retraite.
Selon un conseiller prud'homal, la SNCF été condamnée dans neuf dossiers sur dix. Les condamnations sont en moyenne assorties de dommages et intérêts d'environ 200.000 euros, a indiqué de son côté à l'AFP l'avocate Clélie de Lesquen. La fourchette s'étalerait de "150.000 à 230.000 euros", selon Abdelkader Bendali, professeur marocain au côté des Chibabis. Ces derniers réclamaient en moyenne 400.000 euros pour le préjudice causé par l'entreprise.
"On a travaillé honnêtement et on a été discriminés", expliquait en mars dernier Abdelkader Kardoudi, 61 ans, agent d'accueil à Saint-Lazare. Recruté en 1973 pour assembler les trains à la gare de triage de Longwy, en Lorraine, "où personne ne voulait travailler", ce cheminot dit attendre "la justice".
DiscriminationAu moment de leur embauche dans l'entreprise publique, ces 832 agents ont signé un CDI reposant sur un contrat de droit privé. Aujourd'hui à la retraite, ou proches de l'être, ils ne relèvent pas du statut particulier accordé aux cheminots. Plus avantageux, ce statut n'est accordé qu'aux ressortissants européens ou aux jeunes embauchés. Mais même pour ceux qui ont été naturalisés, et ayant obtenu le fameux statut, ils estiment avoir été cantonnés à des postes au bas de l'échelle. Les 113 plaignants dans cette situation reprochent également à la SNCF de ne pas leur avoir reconnu leur ancienneté.
A la lecture du premier jugement, l'avocate des 800 plaignants s'est retournée vers les 150 personnes qui étaient présentes ce lundi matin au Conseil de prud'hommes de Paris. Le silence a laissé place aux applaudissements et quelques cris de : "vive la République, vive la France, vive la justice". Ahmed Katim, recruté en 1972 comme contractuel, était en larmes : "c'est une énorme satisfaction, la dignité pour les Marocains" et "la fin d'un combat de 15 ans", a-t-il dit.
Le 4 avril dernier, la chaîne France 3 avait consacré un reportage à ce sujet: