A grand renfort d'images 3D ou d'archives, d'effets spéciaux numériques (CGI) et de prises de vues aériennes à 360 degrés, "The history of the Emirates" retrace "les fondations anciennes d'un pays moderne", qui "remonte à 125.000 ans et dont le point culminant a été l'union en 1971", des sept émirats qui composent le pays.
De vestiges de la préhistoire à la découverte du pétrole, les trois épisodes de la version internationale sont diffusés cette semaine sur National Geographic TV, après une retransmission d'une version plus longue sur les chaînes locales.
Sa richesse pétrolière, son goût pour les projets gigantesques et son appétit pour les nouvelles technologies ont fait ces dernières décennies la renommée mondiale du pays, en particulier son émirat de Dubaï, mais "les gens ne connaissent pas l'histoire des premiers temps", dit à l'AFP Anthony Geffen, réalisateur du documentaire, basé à Londres.
Après un développement extraordinaire depuis leur fondation en tant qu'Etat fédéré en 1971, les Emirats s'efforcent désormais de mettre l'accent sur le passé archéologique et les traditions séculaires --comme la fauconnerie ou la pêche à la perle--, alors qu'ils souffrent, dans le monde arabe, de l'image d'un "jeune" pays artificiel et sans légitimité historique.
Le documentaire revient tout d'abord sur la présence humaine à Jebel Faya (nord-est) qui remonte à 125.000 ans, et attestée par la découverte de silex taillés sur un site ayant servi de zone de passage pour les premières migrations africaines.
Le film passe également en revue les premières habitations il y a 8.000 ans sur l'île de Marawah, au large d'Abou Dhabi, ou encore la présence britannique aux 19e et 20e siècles, rarement évoquée dans les médias.
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Paysages pittoresques vus du ciel, tolérance religieuse et émancipation des femmes, glorification des dirigeants politiques: les images du documentaire rappellent celles des innombrables clips de promotion de la fédération diffusés à la télévision ou dans les aéroports.
Le réalisateur Anthony Geffen se défend d'avoir voulu faire un documentaire "touristique". Selon lui, le film est fondé sur "la rigueur scientifique, archéologique et historique (...) mais se devait d'être accessible".
Le documentaire évite toutefois certains sujets comme le coup d'Etat fomenté par les Britanniques et la famille régnante d'Abou Dhabi pour donner le pouvoir à cheikh Zayed, père fondateur de la fédération.
Un sujet trop "sensible", explique Christopher Davidson, spécialiste des monarchies du Golfe.
A l'heure où les économies du Golfe souffrent de la chute des cours de l'or noir, "il est important que le gouvernement montre à sa population que le pays est une nation avec une identité qui va bien au-delà du pétrole et de sa capacité à redistribuer la richesse", souligne à l'AFP Christopher Davidson.
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Le pays est par ailleurs devenu l'un des centres les plus influents de la région. Il est le principal allié de l'Arabie saoudite dans la coalition qui intervient militairement au Yémen depuis 2015 pour lutter contre les Houtis soutenus par l'Iran.
Abou Dhabi est également vu comme un soutien de poids au maréchal Khalifa Haftar, l'homme fort de l'est de la Libye et farouche opposant au gouvernement reconnu par la communauté internationale, ou encore un fidèle allié à Abdel Fattah al-Sissi qui dirige l'Egypte d'une main de fer depuis la destitution du président islamiste Mohamed Morsi en 2013.
En dépit de cette influence, le pays resté peu populaire dans la région et est souvent "accusé de pas être un vrai Etat avec une vraie histoire", estime Christopher Davidson, contrairement à l'Egypte, la Syrie ou l'Irak, au patrimoine riche incontesté.
Dans leur aspiration à s'affirmer en puissance régionale, le recours à la légitimité historique est donc "très important pour les dirigeants des Emirats", confirme à l'AFP Cinzia Bianco, chercheuse sur le Golfe au Conseil européen pour les relations internationales (ECFR).