Un chirurgien italien sollicite Bill Gates pour son projet de greffe de tête

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Le Dr Sergio Canavero a présenté, dans un congrès de chirurgie américain, son idée de transplanter une tête humaine. Un projet controversé qu'il veut mener dans les deux ans à venir. Ses pairs, dubitatifs, qualifient son initiative de délire de charlatan.

Le 13/06/2015 à 20h37

Le projet d'un neurochirurgien italien de réaliser la première greffe de tête humaine a été accueilli avec scepticisme par ses confrères lors d'une conférence médicale, vendredi 12 juin, aux Etats-Unis, où il a lancé un appel aux donateurs. Un chirurgien chinois, le Dr Xiaoping Ren avait réalisé quelque 1000 greffes de ce type sur des souris, qui n'ont pas survécu longtemps.

Le neurochirurgien Sergio Canavero, directeur du Groupe de neuromodulation avancée de Turin, avait annoncé son projet fin 2013, estimant alors qu'une telle intervention pourrait être possible dans les deux ans, soit en 2016. Mais vendredi dernier, sa présentation de deux heures et demie devant la conférence de l'American Academy of Neurological and Orthopaedic Surgeons (AANOS) n'a guère convaincu, tant les obstacles paraissent multiples.

Parmi les 150 participants, se trouvait le premier volontaire pour cette greffe, un Russe de 30 ans, Valery Spiridonov, atteint de la maladie de Werdnig-Hoffmann qui se caractérise par une atrophie progressive incurable des muscles. Plein d'espoir, il se fait cobaye et espère quitter son corps pour celui d'un donneur.

Invité à prononcer le discours d'ouverture de la Conférence, le Dr Canavero a longuement décrit comment il comptait ressouder la moelle épinière sectionnée, point crucial d'une telle chirurgie, citant des avancées dans la recherche, surtout animale. Selon lui, le secret est une lame extrêmement fine permettant de trancher les fibres nerveuses sans les émousser. Il compte aussi utiliser du polyéthylène glycol, une substance chimique courante, et un courant électrique pour accélérer leur rattachement. Sa méthode miracle se résume à trois actions : refroidir la tête à 12 ou 15 °C pour protéger le cerveau du décapité, couper net à l'aide d'une nanolame, recoller les cellules grâce à la chimie et l'électricité. 

Certaines fonctions vitales ne sont pas totalement au point. Le Dr italien a à peine survolé les problèmes majeurs comme, entre autres, le rétablissement rapide de la circulation sanguine dans le cerveau, la respiration et les branchements du système nerveux parasympathique, une composante clé des fonctions automatiques de l'organisme. Sans parler des problèmes éthiques soulevés par une telle intervention. Autre entrave, le coût d'une telle opération, le médecin aurait besoin de 100 millions de dollars. C'est pourquoi il n'a pas hésité à solliciter l'aide de Bill Gates.

Le Dr Canavero se revendique comme le succésseur du Dr Robert White qui a réalisé la première greffe de la tête en 1970 aux Etats-Unis, en attachant la tête d'un singe sur le corps d'un autre primate mais sans restaurer la fonction de la moelle épinière. L'animal est mort peu après.

Si ambitieux soit-il, le projet de Sergio Canavero (baptisé "Heaven") ne manque pas de donner quelques sueurs froides.

Par Ouardigh Rahmouna
Le 13/06/2015 à 20h37