Syrie: Ahmed al-Charaa arrive à Washington en visite officielle, symbole d’un renversement historique

Le dirigeant syrien Ahmad al-Charaa, connu auparavant sous son nom de guerre Abou Mohammad al-Jolani, le dimanche 22 décembre au Palais présidentiel à Damas. (Photo: AFP)

Le président intérimaire syrien, Ahmed al-Charaa, est arrivé samedi aux États-Unis pour une visite officielle inédite, a rapporté l’agence de presse officielle syrienne. Ce déplacement intervient au lendemain de son retrait de la liste américaine du terrorisme.

Le 09/11/2025 à 06h31

Le président intérimaire syrien, Ahmad al-Charaa, est arrivé aux États-Unis pour une visite officielle inédite, a rapporté l’agence de presse officielle de son pays, au lendemain de son retrait de la liste noire américaine du terrorisme.

Le chef d’État par intérim, dont les forces rebelles ont renversé Bachar al-Assad à la fin de l’année dernière, doit rencontrer le président américain Donald Trump au cours de sa visite. Selon Tom Barrack, émissaire américain pour la Syrie, Damas devrait signer un accord pour rejoindre la coalition internationale antijihadiste dirigée par Washington.

Il s’agit de la première visite bilatérale d’un chef d’État syrien aux États-Unis depuis l’indépendance du pays en 1946.

Le groupe État islamique (EI), militairement défait en 2019 en Syrie par la coalition et les Forces démocratiques syriennes (FDS) à majorité kurde, reste actif à travers des cellules dormantes. Les FDS négocient actuellement leur intégration dans la nouvelle armée syrienne.

D’après une source diplomatique à Damas citée par l’AFP, les États-Unis envisagent d’établir une base militaire près de la capitale syrienne.

Sortie de treize années de guerre civile, la Syrie cherche désormais à mobiliser des fonds pour sa reconstruction, un chantier colossal estimé à plus de 216 milliards de dollars par la Banque mondiale.

Fin des sanctions et reconnaissance internationale

Jeudi, le Conseil de sécurité de l’ONU a levé les sanctions visant M. al-Charaa, qui nécessitait jusqu’ici des dérogations spéciales pour voyager. La résolution américaine saluant son engagement à «lutter contre le terrorisme» marque un tournant: il y a un an encore, Ahmed el-Charaa dirigeait Hayat Tahrir al-Cham (HTS), l’ancienne branche syrienne d’Al-Qaïda.

Le ministère syrien de l’Intérieur a annoncé samedi avoir mené «61 raids et 71 arrestations» dans une «campagne proactive pour neutraliser la menace que représente l’EI», selon l’agence Sana. Ces opérations ont visé notamment Alep, Idlib, Hama, Homs, Deir ez-Zor, Raqqa et Damas.

Inscrit depuis 2013 sur la liste des sanctions de l’ONU pour son rôle à la tête du HTS, Ahmed el-Charaa a conduit en décembre 2024 la coalition islamiste qui a renversé Bachar al-Assad.

Bouleversement géopolitique

Dès son accession au pouvoir, M. al-Charaa a rompu avec son passé jihadiste, multipliant les signaux d’ouverture vers l’Occident et les puissances régionales, y compris Israël, avec lequel la Syrie est pourtant toujours en état de guerre.

Le président américain Donald Trump l’avait déjà rencontré lors d’un voyage dans le Golfe, en mai dernier, annonçant alors la levée des sanctions américaines contre Damas. Les deux dirigeants devraient à présent aborder la normalisation progressive entre la Syrie et Israël, dans le cadre des accords d’Abraham, qui avaient entériné en 2020 la reconnaissance d’Israël par plusieurs pays arabes.

La nouvelle doctrine américaine

Pour Michael Hanna, analyste au Crisis Group, «Le président Trump a bouleversé, de manière inattendue, la politique de longue date des États-Unis sur la Syrie. Il a choisi de soutenir le nouveau gouvernement de Damas, malgré les épisodes d’instabilité et de violence sectaire qui entament la confiance envers les nouveaux dirigeants.»

À son arrivée, M. el-Charaa a échangé des passes de basketball avec le commandant des forces américaines aux Moyen-Orient, Brad Cooper, ainsi qu’avec le chef de la coalition internationale anti-jihadistes, Kevin Lambert, selon des images qu’il a postées sur les réseaux sociaux.

La visite d’Ahmed el-Charaa à la Maison-Blanche constitue, selon lui, «un témoignage supplémentaire de l’engagement des États-Unis envers la nouvelle Syrie» et «un moment hautement symbolique pour le dirigeant, marquant sa transformation d’ancien chef militant en homme d’État mondial».

Avant son arrivée à Washington, M. al-Charaa avait rencontré Emmanuel Macron en marge du sommet sur le climat à Belém, au Brésil. Le président français avait alors déclaré espérer que «la Syrie devienne un acteur plein et entier de la lutte contre le terrorisme».

Par Le360 (avec AFP)
Le 09/11/2025 à 06h31