Âgé de 55 ans, ce petit-fils du fondateur de la confrérie égyptienne islamiste des Frères musulmans, professeur d'Etudes islamiques contemporaines à Oxford (Grande-Bretagne), voit "une campagne de calomnie" dans les accusations de viol.
Marié depuis plus de 30 ans à une Française convertie et père de quatre enfants, il est régulièrement invité par d'autres universités en Europe, mais aussi au Maroc, au Qatar ou au Japon, et jouit d'un prestige certain parmi les étudiants musulmans européens qui se pressent à ses conférences et s'arrachent les enregistrements de ses cours.
Titulaire d'un doctorat de l'Université de Genève pour une thèse consacrée à son grand-père, Tariq Ramadan avait été frappé d'une interdiction de visa de la part des États-Unis en 2004, sous l'ère Bush, alors qu'il devait prendre un poste à l'Université de Notre Dame dans l'Indiana. L'interdiction a été levée par Washington en 2010.
S'il bénéficie d'une forte popularité dans les milieux musulmans conservateurs, il est aussi très contesté, notamment dans les sphères laïques qui voient en lui le tenant d'un islam politique.
En France, le nom de Tariq Ramadan est apparu sur la scène publique en 1995. Au lendemain d'attentats islamistes en France, le ministre de l'Intérieur Charles Pasqua lui avait interdit, sans justification précise, l'entrée sur le territoire français. Il semble que M. Pasqua l'ait confondu avec son frère Hani, nettement plus sulfureux, qui avait justifié l'application de la charia et la lapidation des femmes dans une tribune publiée par Le Monde.
L'interdiction, annulée quelques mois plus tard, avait suscité les protestations de l'abbé Pierre, grand acteur du mouvement caritatif en France, de Mgr Jacques Gaillot, très engagé dans les luttes sociales et politiques, et de défenseurs des droits de l'Homme.
Parfois taxé d'antisémitisme - une accusation qu'il récuse avec force au nom du droit à la critique de l'État d'Israël - Tariq Ramadan a aussi déjà été accusé de faire le lit du communautarisme, de pousser les jeunes filles à se voiler et de masquer son fondamentalisme religieux sous un discours moderniste.
Il réfute ces critiques, affirmant qu'il incite les jeunes musulmans à s'impliquer dans la société dans laquelle ils vivent, que le port du voile relève de la liberté individuelle, qu'il prône une lecture "contextualisante" des textes fondateurs de l'islam et réfute la violence.
Ainsi, dans son livre, "Les musulmans d'Occident et l'avenir de l'islam", ou dans "L'islam en question", dans lequel il dialogue avec le rédacteur en chef du Monde diplomatique Alain Gresh, Tariq Ramadan se réclame d'un islam réformiste.
Barbe grise et tenues soignées, ce polémiste a parfois croisé le verbe avec ses plus virulents adversaires comme les essayistes Eric Zemmour ou Caroline Fourest, qui lui reprochent son discours fluctuant selon qu'il s'exprime en arabe ou en français et en présence ou non de non-musulmans.
Le printemps arabe a constitué une "réponse cinglante et imparable" à "toutes celles et à tous ceux qui ont décrit et peint les musulmans comme impénétrables aux idées de liberté et de démocratie", écrivait-il en 2010.
A l'hiver 2015, M. Ramadan appelle les musulmans en France à tenir "un discours extrêmement clair sur l'islam" après les attentats de Paris, mais craint que l'état d'urgence ne renforce leur stigmatisation au sein de la société.
L'année suivante, dénonçant les "propos nauséabonds" entendus lors des "discours sur la déchéance" de la nationalité et un "racisme structurel" en France à l'égard des musulmans, en particulier sur le marché de l'emploi, le prédicateur annonce son intention de demander la nationalité française et de devenir franco-suisse, afin de "donner un exemple concret et positif d'adhésion aux valeurs de la République".
Le Premier ministre Manuel Valls estime en retour qu'il n'y a "aucune raison" d'accéder à cette requête, le message de M. Ramadan étant selon lui "contradictoire" avec ces valeurs