Dans un signe d’apaisement très attendu, le président chinois Xi Jinping a reçu hier lundi 19 juin son hôte au Palais du peuple, le monumental bâtiment qui sert à accueillir les dignitaires étrangers au bord de la place Tiananmen. «Les deux parties ont fait des progrès et sont parvenues à des terrains d’entente sur certains points spécifiques», s’est félicité le chef d’État chinois sans préciser ces derniers, qualifiant les avancées de «très bonne chose», selon la télévision publique CCTV.
«Nous sommes sur la bonne voie», a déclaré pour sa part Joe Biden au cours d’un déplacement en Californie, estimant que M. Blinken avait «fait un excellent travail» à Pékin. Les deux parties ont toutefois minimisé les perspectives de grande réconciliation. Selon le secrétaire d’État américain, qui s’est dit «lucide», les plus de 11 heures de discussions qu’il a menées en deux jours visaient surtout à rétablir le dialogue.
«Nous avons fait des progrès et nous allons de l’avant», a déclaré Antony Blinken devant la presse, avant de nuancer: «Aucune de ces questions ne sera résolue en une seule visite». Autre signe encourageant: le ministre chinois des Affaires étrangères, Qin Gang, a accepté une invitation à se rendre aux États-Unis, à une date qui reste à déterminer.
«Dialogue ou confrontation»
Mais Antony Blinken a reconnu que les avancées étaient pour l’heure limitées, notamment sur le rétablissement de la communication entre les deux armées, une priorité sur fond de tensions bilatérales persistantes autour de Taïwan.
«Des contacts directs et une communication soutenue au plus haut niveau constituent le meilleur moyen de gérer les différences de manière responsable et de veiller à ce que la concurrence ne dégénère pas en conflit», a indiqué M. Blinken aux journalistes. «J’ai entendu la même chose de la part de mes homologues chinois. Nous sommes d’accord sur la nécessité de stabiliser nos relations».
Les relations bilatérales restent tendues sur de nombreux dossiers: la rivalité dans les technologies, le commerce, le traitement de la minorité musulmane des Ouïghours en Chine ou encore les revendications chinoises en mer de Chine méridionale.
Lundi, le plus haut responsable du Parti communiste chinois (PCC) pour la diplomatie, Wang Yi, avait affirmé à Antony Blinken que les États-Unis devaient désormais choisir «entre dialogue et confrontation, coopération et conflit», selon CCTV. Wang Yi, qui a la haute main sur la politique extérieure chinoise et a un rang hiérarchique supérieur au ministre des Affaires étrangères Qin Gang, a également réaffirmé avec force la position de Pékin sur Taïwan. «Sur cette question, la Chine ne fera aucun compromis ni aucune concession», a-t-il dit à Antony Blinken.
Ligne dure
La Chine estime que l’île est l’une de ses provinces, qu’elle n’a pas encore réussi à réunifier avec le reste de son territoire depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949. Elle n’a pas exclu de la reconquérir par la force si nécessaire. Pékin se dit opposé à ce qu’il perçoit comme un rapprochement ces dernières années entre Washington et les autorités taïwanaises, issues d’un parti pro-indépendance.
La Chine a ainsi lancé durant l’année écoulée des exercices militaires d’ampleur autour de Taïwan après des rencontres officielles entre de hauts responsables américains et la présidente taïwanaise Tsai Ing-wen. Blinken s’est dit préoccupé par les «provocations» chinoises dans le détroit de Taïwan, mais a souligné que son pays restait opposé à une déclaration d’indépendance par Taipei. Le secrétaire d’État américain a dit avoir également évoqué ses préoccupations concernant le traitement des Ouïghours et des Tibétains, tout comme la situation à Hong Kong, où Pékin a sévèrement restreint la liberté d’expression.
Joe Biden maintient la ligne dure à l’égard de Pékin établie par son prédécesseur Donald Trump. Les États-Unis ont notamment interdit les exportations de semi-conducteurs de pointe vers la Chine. Washington ne cherche toutefois pas à «enrayer» le développement économique chinois, a assuré lundi M. Blinken. «Mais en même temps», il n’est «pas dans notre intérêt de fournir à la Chine des technologies qui pourraient être utilisées contre nous», a-t-il souligné.