Cétait une cérémonie sobre mais pleine de signification, quand on se rappelle que le 28 septembre 2013, une attaque-suicide à l’entrée du camp des FaMa (forces armées maliennes) a secoué Tombouctou, causant des dommages à plusieurs habitations, mais aussi aux bibliothèques familiales des imams Essayouti et Al-Wangari. Les vibrations de ce malheureux évènement ont fragilisé davantage la structure de ces bâtiments qui n’avaient pas bénéficié d’entretien depuis 2010. Grâce aux efforts du gouvernement malien et de ses partenaires techniques et financiers, cette page noire de la vie de tout un peuple, se tourne définitivement.
Les activités inaugurales ont démarré par la visite de deux des bibliothèques, à savoir Al-Wangari et celle de la famille de Hamed Bularaf, toutes deux situées au quartier de Badjindé de la mystérieuse Tombouctou. Pour la première, les travaux ont consisté en la reprise des marches d’accès au bâtiment et des murs affectés par des fissures, dont une partie abritant un mausolée s’était effondrée sous l’effet de l’explosion de septembre 2013. Ainsi, le pan de mur cassé de la dernière demeure du Saint Mohamed Bagayoko a été reconstruit et revêtu de l’extérieur en pierres d’alhor.
Déambulant à travers une ruelle étroite de la cité médiévale, l’équipe a débouché sur la bibliothèque familiale Bularaf, située à près de deux cents mètres de la précédente. Là, les travaux de rénovation ont essentiellement porté sur la toiture totalement refaite et désormais étanche. La bibliothèque de la famille Ben Essayouti a vu ses fenêtres et ses portes voler en éclat et des pans de mur s’affaisser en raison de sa proximité (à moins de centmètres) avec le camp FaMa où l’attaque avait été perpétrée.
“L’ensemble des travaux de réhabilitation ont été exécutés dans le respect des techniques traditionnelles de maçonnerie tombouctienne avec des matériaux locaux, en vue de garder ces patrimoines tels qu’à l’origine”, a fait savoir Sébastien Diallo, spécialisé en architecture de terre, mandaté par l’UNESCO et la mission culturelle de Tombouctou pour la supervision technique des travaux. “Chaque famille responsable des bibliothèques a désigné son maçon et son électricien”, a ajouté le chef de la Mission culturelle de Tombouctou, Al Boukhari Ben Essayouti, faisant l’historique du projet.
Il faut noter que l’ensemble des trois bibliothèques familiales ne compte pas moins de 15.000 manuscrits, dont les plus anciens datent du XIe siècle. Les bibliothèques Al-Wangari et Bularaf en comptent au moins 3.500 chacune et pas moins de 8.000 pour la plus grande, celle de la famille Ben Essayouti.
Travailler à la paix et à la stabilité passe inévitablement par le dialogue, le retour de la sécurité et la reprise des activités économiques. La restauration des activités et du patrimoine culturel revêt également une importance capitale car il permet, tel un ciment, de consolider les aspects sécuritaires, économiques et sociaux. Ceci est d’autant plus valable à Tombouctou qui abrite un patrimoine culturel immatériel basé sur la paix et un autre matériel qui appartient, non plus aux seuls habitants de la ville mais à l’humanité tout entière.