Du terrain judiciaire, le dossier s'est déplacé sur celui de l'administration, le gouvernement belge relevant que l'imam est en séjour irrégulier en Belgique et n'a pas vocation à y rester.
Le projet d'expulsion, annoncé mercredi 16 novembre, par la secrétaire d'Etat belge à l'Asile et la Migration, Nicole de Moor, fait suite au refus, répété hier, mardi, par la justice belge, de remettre l'imam à la justice française en vertu d'un mandat d'arrêt européen (MAE).
Les avocats du prédicateur de 58 ans arguaient que l’infraction reprochée en France («soustraction à l’exécution d'une mesure d'éloignement») n'existait pas en droit belge, ce qui est une condition pour qu'un MAE puisse être exécuté.
Le tribunal de Tournai (ouest) fin octobre, puis la cour d'appel de Mons (sud) mardi, leur avaient donné raison.
«Nous sommes en contact avec la France pour permettre son retrait du territoire», a souligné Nicole de Moor dans un tweet, laissant entendre que l'imam pourrait être d'abord remis aux autorités françaises avant une expulsion vers le Maroc. Aucun délai n'a été précisé.
Il n'y a «pas de place pour les prédicateurs de haine étrangers dans notre pays», a ajouté cette responsable chrétienne-démocrate flamande.
Dans un communiqué, elle a aussi relevé que Hassan Iquioussen «ne donne aucun signe qu'il souhaite retourner volontairement» dans son pays et «les autorités françaises réclament toujours son retour afin de pouvoir l'envoyer au Maroc».
Lucie Simon, avocate française de l'imam, a jugé ce placement en centre fermé «purement scandaleux», estimant que le pouvoir politique contournait «une fois de plus le judiciaire» dans cette affaire.
Sur Twitter, elle a accusé l'administration belge de l’immigration de »s'être entendue avec le parquet» pour que le dossier prenne la voie administrative.
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Selon une source policière, l'imam a été placé au centre fermé de Vottem sur la commune de Liège (est).
Hassan Iquioussen, arrêté le 30 septembre dans la région de Mons, en Belgique francophone et qui était depuis la Toussaint assigné à résidence sous surveillance électronique, est au cœur d'un imbroglio politico-juridique depuis quatre mois.
Fin juillet, le ministre français de l'Intérieur, Gérald Darmanin, avait annoncé l'expulsion de ce prédicateur du Nord, fiché S (pour sûreté de l'Etat) par les services de renseignement.
L'arrêté signé de la main du ministre lui reproche «un discours prosélyte émaillé de propos incitant à la haine et à la discrimination et porteur d'une vision de l'islam contraire aux valeurs de la République».
Mais Hassan Iquioussen était introuvable au moment où cet arrêté, qu'il avait contesté devant la justice, avait été définitivement validé par le Conseil d'Etat le 31 août.
Dans une interview en forme de mea culpa diffusée par le quotidien français Le Parisien, l'imam admet qu'il a pu tenir par le passé des «propos déplacés et certaines expressions qui trompent (s)a pensée».
«Je suis disposé à accepter des reproches, un procès. Je veux bien qu’on me condamne parce qu’il est sûr et certain que j’ai dit des choses condamnables. Mais m’expulser de l’endroit où je suis né, là où j’ai toujours vécu, c’est comme déraciner un chêne», a-t-il ajouté.
Né en France, Hassan Iquioussen avait décidé à sa majorité de ne pas opter pour la nationalité française. Lui affirme y avoir renoncé à 17 ans sous l'influence de son père et avoir ensuite tenté en vain de la recouvrer. Ses 5 enfants et ses 15 petits-enfants sont eux Français et implantés en France, dans le département du Nord: un de ses fils est imam à Raismes, un autre, ex-élu PS, à Lourches.