Libye: Benghazi, la ville où "la guerre ne s'arrête jamais"

Des enfants traversent la rue dans le quartier de Sabri à Benghazi, le 17 mai 2015.

Des enfants traversent la rue dans le quartier de Sabri à Benghazi, le 17 mai 2015. . DR

Épicentre de la révolte populaire qui a renversé Mouammar Kadhafi en 2011, Benghazi est aujourd'hui une cité meurtrie par des combats incessants où le quotidien de la population consiste à tenter de survivre.

Le 19/05/2015 à 20h42

Tout juste un an après le lancement d'une opération visant à chasser de la deuxième ville de Libye les milices islamistes qui s'y sont installées dans la foulée de la révolution, Benghazi est une zone de guerre. Les combats ont tué plus de 1.700 personnes en un an et entraîné la fuite de milliers d'autres, selon l'ONG Libya Body Count, et la ville est toujours divisée.

«Benghazi est une ville dévastée», affirme Nadine al-Sharif, une journaliste et militante. «Les habitants vivent dans l'insécurité, et leur quotidien est fait de pénuries d'essence et de produits de base, en plus d'un coût de la vie prohibitif», explique Mme al-Sharif. «Même les écoles sont bombardées», dit-elle.

L'offensive anti-islamistes, baptisée Opération dignité, a été lancée à la mi-mai 2014 par le général Khalifa Haftar, resté loyal au gouvernement libyen reconnu par la communauté internationale. Ses forces, composées de soldats, policiers et miliciens, contrôlent aujourd'hui l'essentiel de la ville, mais des poches urbaines, notamment dans le centre et le sud, leur échappent toujours.

Les miliciens lourdement armés qui tiennent tête à Haftar, devenu en mars le chef de l'armée du gouvernement, sont d'anciens insurgés ayant pris les armes contre Kadhafi en 2011.

Le principal groupe islamiste à Benghazi est le «Conseil de la choura des forces révolutionnaires», allié à la coalition «Aube de la Libye», qui a pris la capitale Tripoli en août et installé son propre gouvernement, non reconnu.

Les radicaux d'Ansar Asharia, une organisation classée «terroriste» par les États-Unis – qui la suspecte d'avoir organisé l'attentat contre son consulat en 2012 –, occupe également le terrain, tout comme les combattants ayant fait allégeance l'an dernier à Daech, lesquels ont déjà revendiqué des attaques à Benghazi.

Les déchirements que vit Benghazi sont un miroir de la situation en Libye, pays au bord du chaos, tiraillé entre deux sources d'autorité et déchiré par des combats entre milices rivales, dont les rangs ont été grossis par des insurgés de 2011 qui n'ont jamais rendu les armes, empêchant ainsi une transition politique pacifique et démocratique.

Pour les habitants de Benghazi, le danger est multiforme: attentats-suicides, enlèvements, meurtres ou bombardements aveugles de zones résidentielless.

Pour le militant Othman ben Sassi, la fin des combats à Benghazi «passe par l'établissement d'un gouvernement d'unité nationale», une hypothèse sur laquelle l'ONU travaille avec des représentants des deux autorités libyennes mais qui peine à prendre corps.

Alors que l'émissaire de l'ONU, Bernardino Leon, prépare un quatrième projet d'accord, après le rejet des trois premiers, Khalifa Haftar a marqué l'anniversaire de son Opération Dignité en promettant de poursuivre sa campagne militaire «jusqu'à ce que toutes les villes de Libye soient libérées des terroristes», en référence aux milices islamistes.

Le 19/05/2015 à 20h42