Le chef de l'Etat, mutique ou presque depuis les violentes manifestations du 1er décembre et les scènes sidérantes d'affrontements sous l'Arc de Triomphe, va sortir de son silence et s'exprimer à 19h00 GMT depuis le palais de l'Elysée.
Il va jouer gros, à peine 48 heures après la fin de la quatrième journée d'action des gilets jaunes, ces Français modestes révoltés contre la politique fiscale et sociale de son gouvernement, dont la mobilisation ne fléchit pas.
Très impopulaire, pris en grippe par de nombreux manifestants qui réclament sa démission, confronté à la dégradation de l'économie française du fait des blocages des routes et des rassemblements, Emmanuel Macron a besoin de trouver une sortie de crise et d'apaiser la colère qui déchire le pays depuis plus de trois semaines.
Il "saura retrouver le chemin du coeur des Français", a affirmé dimanche le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux.
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Car la fracture semble profonde entre, d'une part, cette France des fins de mois difficile qui a le sentiment de glisser vers la pauvreté et de ne pas être écoutée des élites, et, d'autre part, le gouvernement d'Emmanuel Macron, régulièrement accusé par ses détracteurs d'être le "président des riches".
A la recherche de solutions, Emmanuel Macron, qui a bâti son accession au pouvoir en rassemblant à gauche et à droite, va consulter lundi matin "l'ensemble des forces politiques, territoriales, économiques et sociales dans ce moment grave que traverse la Nation, afin d'entendre leurs voix, leurs propositions et avec pour objectif de les mobiliser pour agir", selon le palais de l'Elysée.
Dès samedi, après la manifestation des gilets jaunes un peu partout en France, marqués par des heurts et des dégradations importants à Paris et dans plusieurs villes de province, le Premier ministre Edouard Philippe avait insisté sur la nécessité de sortir de la crise. "Le temps du dialogue est là" et "il faut désormais retisser l'unité nationale", avait-il déclaré.
Mais les attentes des gilets jaunes sont grandes et les propositions du gouvernement pas évidentes à anticiper. Le recul tardif du gouvernement sur la fiscalité des carburants, détonateur de leur colère, ne les a pas apaisé.
Le président va présenter "des mesures concrètes et immédiates", a assuré la ministre du Travail Muriel Pénicaud, qui a cependant écarté tout "coup de pouce" supplémentaire au salaire minimum.
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Plus tôt dimanche, le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, un des derniers poids-lourds du gouvernement issu de la gauche, avait jugé que M. Macron "doit fixer maintenant le grand cap" vers "un nouveau contrat social".
"Il faut réformer mais aussi accompagner les gens vulnérables. On doit leur faire sentir que les efforts sont partagés", réclame l'économiste Philippe Aghion, qui a travaillé sur le volet économique du programme présidentiel.
Mais le chef des députés de la formation présidentielle (La République en marche), Gilles Le Gendre, a mis en garde contre l'idée de "faire n'importe quoi" au nom de la justice sociale.
Parmi les pistes évoquées figurent un coup de pouce au minimum vieillesse ainsi qu'une prime mobilité pour ceux qui utilisent la voiture pour se rendre à leur travail.
Une des grandes difficultés pour le président tient à la nature de la fronde. Les gilets jaunes, mouvement populaire né sur les réseaux sociaux, a grandi hors de tous les cadres établis (partis, syndicats, associations...). C'est une dynamique protéiforme, aux revendications multiples, sans véritable leader, avec lequel il est donc par nature très délicat de négocier, et qu'il sera donc compliqué d'apaiser.