Lors d’une allocution télévisée prononcée au lendemain de censure parlementaire historique du gouvernement de Michel Barnier, trois mois seulement après sa prise de fonction, le président Emmanuel Macron a fustigé les oppositions qui ont voté la censure, en accusant la gauche et l’extrême droite de s’être unies «dans un front antirépublicain» et de vouloir «créer le désordre».
«Ils ne pensent pas à vous, à vos fins de mois, vos projets, ils ne pensent qu’à une seule chose, à l’élection présidentielle, pour la préparer, pour la précipiter, et cela avec le cynisme et un certain sens du chaos», a-t-il asséné.
La prochaine élection présidentielle est prévue en 2027, mais certains, particulièrement à gauche, réclament la démission de M. Macron. Il est «la cause du problème» et «s’en ira par la force des évènements», a d’ailleurs lancé Jean-Luc Mélenchon, membre éminent du parti la France Insoumise (LFI) juste après l’allocution du président.
Dissolution «incomprise»
La France a déjà été sans gouvernement pendant plusieurs semaines cet été, après une dissolution et des législatives anticipées ayant abouti à une Assemblée fragmentée en trois blocs (alliance de gauche, macronistes et droite, extrême droite) sans majorité absolue. Emmanuel Macron a reconnu jeudi soir que sa décision de dissoudre n’avait pas été «comprise», assumant «sa responsabilité».
Le chef de l’État recevra vendredi les chefs des groupes parlementaires du Parti socialiste, du camp présidentiel (Renaissance, Modem, Horizons...) et du parti Les Républicains (droite). LFI, le Rassemblement national (RN, extrême droite) et les Écologistes n’ont pas été invités à ce stade.
«Flou», «impasse», «cercle vicieux»: l’inquiétude et la lassitude étaient manifeste chez les Français interrogés par l’AFP. Selon un sondage Toluna Harris Interactive pour RTL, la situation laisse les Français partagés: 53% approuvent la décision de censure des députés, mais 82% sont inquiets de ses conséquences. Les marchés restaient en revanche calmes: la Bourse de Paris était en légère hausse et le taux auquel la France emprunte sur les marchés était même orienté à la baisse.
Casse-tête
L’équation de la formation d’un nouveau gouvernement s’annonce tout aussi complexe qu’elle l’a été pour nommer Michel Barnier. Tant la gauche que le centre ou la droite paraissent désunis pour s’entendre sur un nouveau gouvernement de coalition.
Pour les centristes et la droite, travailler avec les socialistes et les écologistes implique que ces derniers se détachent de LFI, avec qui ils forment le Nouveau Front populaire (NFP), première force à l’Assemblée. LFI de son côté prévenu jeudi que sa formation censurerait tout Premier ministre n’étant pas issu de cette alliance de gauche, mais réclame surtout la démission du chef de l’État et une «présidentielle anticipée».
Socialistes et écologistes, eux, se disent prêts à des compromis avec le bloc central, qui s’engagerait en retour à ne pas censurer un gouvernement de gauche. L’extrême droite, qui joue les rôles d’arbitre et a précipité la censure du gouvernement Barnier, assure qu’elle laissera «travailler» le futur chef du gouvernement pour «co-construire un budget acceptable pour tous».