"Il est prévu que les six personnes poursuivies entrent entre mercredi et jeudi dans des centres pénitentiaires dépendant des services pénitentiaires de la Généralité de Catalogne", a indiqué lundi 2 juillet le ministère de l'Intérieur dans un communiqué, sans donner les noms des indépendantistes concernés. Mais selon les médias espagnols, l'ex-vice-président catalan Oriol Junqueras et les dirigeants d'associations indépendantistes Jordi Sanchez et Jordi Cuixart ainsi que l'ex-présidente du parlement régional Carme Forcadell figurent parmi ces six.
Poursuivis pour rébellion pour leur rôle dans la proclamation d'indépendance du 27 octobre dernier, un chef d'accusation passible de 25 ans de prison, les neuf indépendantistes emprisonnés sont en détention provisoire depuis plusieurs mois dans des prisons près de Madrid pour pouvoir être entendus par le juge. Ce transfert leur permettra d'être plus proches de leurs familles alors que Barcelone est à environ 600 kilomètres de la capitale espagnole.
"Les trois autres inculpés en détention provisoire seront transférés plus tard, les procédures les concernant n'étant pas terminées étant donné que la demande en a été faite plus tard", a poursuivi le ministère.
Pour les indépendantistes, toujours au pouvoir en Catalogne, ces prisonniers sont des "prisonniers politiques". Pour la Cour suprême qui les poursuit et le gouvernement central, ils ont simplement violé la loi.
Lire aussi : Trois responsables catalans emprisonnés saisissent l'ONU
Le chef du gouvernement espagnol, le socialiste Pedro Sanchez, au pouvoir depuis un mois après avoir renversé son prédécesseur conservateur Mariano Rajoy, avait plusieurs fois annoncé son intention de faire ce geste au nom de "l'apaisement" en Catalogne. Depuis Lisbonne, Pedro Sanchez a assuré que son gouvernement appliquait la loi pénitentiaire, soulignant la nécessité de "transférer ces prisonniers là où résident leurs proches et où ils ont des attaches".
Le gouvernement de l'indépendantiste Carles Puigdemont, qui a organisé le 1er octobre 2017 un référendum d'autodétermination interdit provoquant la plus grave crise politique qu'a connue l'Espagne en 40 ans de démocratie, avait été destitué le 27 octobre après le vote d'une déclaration d'indépendance au parlement régional. Comme d'autres séparatistes poursuivis par la justice, Carles Puigdemont avait quitté l'Espagne. Il attend désormais en Allemagne que la justice allemande se prononce sur son extradition.
L'annonce de ces premiers transferts intervient une semaine avant la réunion à Madrid entre Pedro Sanchez et le président indépendantiste catalan Quim Torra, le 9 juillet. Une première rencontre au sommet durant laquelle les deux hommes risquent de ne pas parler le même langage.
Lire aussi : Portrait. Qui est Pedro Sanchez, le socialiste successeur de Rajoy
Si Pedro Sanchez s'est montré plus ouvert au dialogue avec le successeur de Carles Puigdemont, il est, à l'instar de Mariano Rajoy, opposé à l'indépendance de la Catalogne et à la tenue d'un référendum sur la question réclamé par une grande partie des Catalans.
Quim Torra a lui réaffirmé ces derniers jours que son objectif restait l'indépendance. "Nous devons créer un autre 1er octobre (...) dans le sens de parvenir à l'objectif auquel certains, et moi en particulier, voulons parvenir, à savoir l'indépendance de mon pays et de rendre effective cette république", a-t-il déclaré lundi dernier. Ce à quoi Pedro Sanchez a opposé une fin de non-recevoir: "Je pense que ce que représente le 1er octobre est une page qui doit être tournée", a-t-il rétorqué le lendemain depuis Berlin.
L'indépendantisme a explosé en Catalogne à partir de 2010, après l'annulation par la justice d'un statut accordant une autonomie élargie à cette riche région du nord-est de l'Espagne. La société catalane est profondément divisée sur la question de l'indépendance: aux dernières élections régionales du 21 décembre, les séparatistes ont obtenu 47,5% des voix, mais la majorité absolue des sièges au parlement catalan.