Plus de deux ans après le début de la guerre en Ukraine, la très grande majorité des participants au premier sommet sur la paix en Ukraine, qui s’est tenu les 15 et 16 juin au Bürgenstock, en Suisse, est parvenue à s’entendre sur un communiqué final dessinant des pistes pour mettre fin au plus grand conflit européen depuis la Seconde Guerre mondiale.
Mais la question sur «comment et quand impliquer la Russie» reste ouverte, a reconnu la présidente de la Confédération helvétique et hôte du sommet, Viola Amherd. «Il faudra trouver une méthode permettant» à la Russie et à la Chine «de se joindre à ces délibérations», a renchéri à ses côtés le président ghanéen Nana Akufo-Addo.
Selon un décompte officiel, environ 80 pays soutiennent la déclaration finale. Le Brésil, l’Inde et l’Arabie saoudite notamment n’en faisaient pas partie. Le chef de la délégation indienne, Pavan Kapoor, a souligné que la paix ne pouvait être obtenue qu’en «amenant les deux parties au conflit à un engagement sincère».
Le texte réaffirme «les principes de souveraineté, d’indépendance et d’intégrité territoriale de tous les Etats, y compris l’Ukraine». Il dénonce «la militarisation de la sécurité alimentaire» et appelle au retour des enfants ukrainiens déportés par la Russie. Il appelle aussi «à impliquer toutes les parties» au conflit pour faire cesser les hostilités, alors que la Russie a été exclue de ce sommet, et que son allié chinois a préféré ne pas y participer en raison de cette absence.
Second sommet
«Nous savons que la paix en Ukraine ne sera pas obtenue en un coup. C’est un chemin à parcourir. Ce (sommet) n’était pas une négociation de paix. Parce que Poutine ne veut pas sérieusement mettre fin à la guerre», a souligné dimanche la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen.
Le président ukrainien Volodymyr Zelenskya expliqué que le sommet serait suivi de réunions au niveau technique et ministériel, avant un second sommet de paix «pour mettre fin à cette guerre et avoir une paix juste et durable». Son objectif est de fédérer la communauté internationale autour d’une proposition de paix qui pourrait être présentée à Moscou.
La réunion s’est tenue alors que l’Ukraine est en difficulté sur le plan militaire, mais M. Zelensky a assuré que «ce n’est pas parce que nous devenons plus faibles que nous commençons à parler de paix».
Les «réalités du terrain»
L’appel à la reddition lancé vendredi par le président Vladimir Poutine a d’ailleurs été rejeté par une majorité des participants. Mais le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a estimé dimanche que l’Ukraine devrait «réfléchir» à la proposition du président russe, assurant qu’il ne s’agissait pas d’un «ultimatum» mais «d’une initiative de paix qui tient compte des réalités du terrain».
Le président ukrainien a qualifié le sommet de «succès», venant s’ajouter notamment au déblocage de l’aide militaire américaine, après des mois de tergiversation et d’un prêt de 50 milliards de dollars garanti par les avoirs russes gelés.
Sécurité alimentaire et nucléaire
La journée de dimanche a été consacrée à la sécurité nucléaire et à la sécurité alimentaire mondiale, notamment en assurant la liberté de navigation en mer Noire.
Les discussions sur la sécurité alimentaire ont porté sur la crise de la production et des exportations agricoles, qui a créé un choc alimentaire et inflationniste au début de la guerre, l’Ukraine étant l’un des greniers à céréales du monde. Le communiqué final souligne que «la sécurité alimentaire ne doit être en aucune manière être militarisée» et qu’il faut garantir la liberté de navigation sur la mer Noire et la mer d’Azov.
Le communiqué final demande par ailleurs que l’Ukraine récupère un «contrôle souverain total» sur la centrale nucléaire de Zaporijjia, la plus grande centrale nucléaire d’Europe occupée par les Russes. L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a mis en garde à de nombreuses reprises contre le risque d’une catastrophe nucléaire majeure dans cette installation.
La «situation critique» de la centrale «n’est pas une menace théorique mais très réelle», en raison notamment des déchets qui doivent être refroidis en permanence, a répété le directeur de l’AIEA, Rafael Grossi, dans une interview au journal russe Izvestia, affirmant qu’il était important «de maintenir un dialogue constructif avec les deux parties» au conflit.