Luiz Inacio Lula da Silva a été remis en liberté au lendemain d'un arrêt de la Cour suprême qui affecte des milliers de détenus, après plus d'un an et demi d'incarcération.
Portant une veste sombre sur un T-shirt, Lula, 74 ans, est sorti à pied, souriant aux côtés de sa nouvelle compagne, la sociologue Rosangela da Silva, embrassant chaleureusement des sympathisants et saluant la foule d'un poing levé.
Des milliers de militants l'ont acclamé, certains en larmes, devant le siège de la Police fédérale de Curitiba, où il purgeait une peine de huit ans et dix mois de prison pour corruption.
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Combatif, il a rapidement harangué la foule de sa voix rauque. "Je veux continuer à lutter pour améliorer la vie du peuple brésilien", a-t-il dit, attaquant d'emblée le gouvernement du président d'extrême droite Jair Bolsonaro.
"Le peuple a de plus en plus faim, il est au chômage, le peuple travaille pour Uber ou livre des pizzas", a lancé Lula, qui avait pu, au cours de ses deux mandats (2003-2010) extraire près de 30 millions de Brésiliens de la pauvreté dans une période de forte croissance économique.
Vous avez apporté "la démocratie dont j’avais besoin pour résister aux canailles du côté pourri de l'Etat brésilien, de la justice brésilienne, qui a tout fait pour criminaliser la gauche", a poursuivi Lula, dont le discours a été interrompu à plusieurs reprises par des "Lula je t'aime !".
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Emue, sa campagne a posé plusieurs fois sa tête sur son épaule tandis qu'il parlait. Quand la foule a crié "un bisou, un bisou !", il s'est rapidement exécuté, embrassant sur la bouche celle qu'il souhaite rapidement épouser. "Tout le monde a hâte, ça fait 580 jours, on est très heureux, c'est une grande victoire", avait expliqué auparavant à l'AFP Pedro Carrano, un de ses sympathisants.
"Hier, je ne voulais même pas assister au vote (des juges de la Cour suprême), je n'y croyais pas. Mais quand j'ai vu le résultat, j'ai crié, j'ai pleuré et maintenant je suis ici", devant le siège de la Police fédérale, a raconté Lucia Fernandes, 58 ans, arborant une casquette signée par Lula lui-même.
Polarisation
Après ce premier bain de foule à Curitiba, Lula doit aller samedi près de Sao Paulo, au syndicat des métallurgistes de Sao Bernardo do Campo, où il était resté retranché avec ses partisans avant de se rendre aux autorités pour commencer à purger sa peine en avril 2018.
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Au-delà de l'ex-président de gauche, d'autres détenus pourraient bénéficier de l'arrêt pris jeudi soir par la Cour suprême : ils sont près de 5.000 à être concernés par cette décision qui sera appliquée au cas par cas et change radicalement l'application des peines au Brésil.
Sur un score serré de six voix contre cinq, les magistrats de la haute cour ont mis fin tard jeudi à une jurisprudence selon laquelle une personne peut être emprisonnée avant l'épuisement de tous ses recours si sa condamnation a été confirmée en appel, comme c'est le cas pour Lula.
De nombreux autres détenus condamnés dans le cadre de l'opération anticorruption "Lavage Express", une enquête tentaculaire qui a fait trembler l'ensemble de la classe politique, pourraient prochainement eux-aussi recouvrer la liberté.
Adulé par une partie des Brésiliens fascinés par cet ex-ouvrier métallurgiste arrivé au sommet de l'Etat, Lula est aussi détesté par une partie de la population pour qui il incarne la corruption de grande ampleur qui mine le Brésil.
"Caravanes" en vue
"La Cour suprême a voté contre le peuple", a déploré Major Olimpo, le leader au Sénat du PSL, la formation du président Jair Bolsonaro animée par une farouche haine du PT, le parti des Travailleurs fondé par Lula en 1980.
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Le président Bolsonaro, habituellement très disert sur Twitter, est resté muet sur le sujet, préférant tweeter sur l'action de son gouvernement. En 2018, il avait lâché en pleine campagne qu'il souhaitait voir Lula "pourrir en prison". Son fils député, Eduardo, a, quand à lui, déploré sur Twitter qu'"on libère les brigands".
Lula a déjà fait part de son intention de participer à de grandes tournées à travers le Brésil, les fameuses "caravanes" qui lui ont permis d'accroître sa popularité auprès des plus pauvres, pour incarner l'opposition à M. Bolsonaro.
Si la justice l'autorise à quitter son pays, il compte également voyager à l'étranger : le journal O Globo croit même savoir qu'il a été invité à l'investiture du nouveau président péroniste argentin, Alberto Fernandez, le 10 décembre.
Des rebondissements judiciaires sont aussi possibles ces prochaines semaines : Lula est mis en cause dans d'autres affaires et la Cour suprême doit rendre de nouveaux arrêts le concernant. Mais il ne risque pas d'être incarcéré de nouveau prochainement.
Le président élu argentin, le péroniste de centre gauche, Alberto Fernandez, a salué sa sortie de prison, soulignant son "courage" et son "intégrité" et dénonçant le "processus judiciaire arbitraire auquel il a été soumis".
"Le peuple vénézuélien est heureux et salue la libération du frère Lula", s'est quant à lui exclamé le président du Venezuela Nicolas Maduro.
Cuba s'est aussi félicité de sa libération après "580 jours de détention injuste".