Diapo. Qui était l’homme derrière l’attentat de Tunis?

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Daech a revendiqué l'attentat qui a frappé un bus de la sécurité présidentielle, mardi dernier, faisant au moins douze morts. L’auteur de l’attaque, Abou Abdellah Tounsi, était une figure salafiste connue de la Tunisie. Il avait même été reçu par l'ex-président Moncef Marzouki.

Le 26/11/2015 à 09h45

«Selon les premiers détails, l'attaquant portait un sac dans le dos. Il avait un manteau et portait des écouteurs. Il s'est fait sauter en montant à bord du bus», avait déclaré à la station de radio Shems FM Hichem Gharbi, responsable de la sécurité présidentielle.

Mercredi 25 novembre, Daech a publié un communiqué, revendiquant son attaque et dévoilant par la même occasion le nom de son auteur, ainsi que sa photo. Un homme habillé de blanc et portant une ceinture d'explosifs, le doigt levé, la tête et le visage couverts par un foulard. C’était Abou Abdallah Tounsi.


Reçu par le président

Abou Abdallah Tounsi, de son vrai nom Imed Ben Saleh, faisait partie de la fine fleur du salafisme jihadiste tunisien. Il avait été reçu en grande pompe par le président provisoire de la république, Moncef Marzouki, au Palais de Carthage, le jeudi 11 octobre 2012, moins d’un mois après l’attaque de l’ambassade américaine survenue le 14 septembre. A l’issue de sa rencontre avec le président, Abou Abdallah Tounsi avait tenu une conférence de presse en présence d’une délégation de cheikhs de la mouvance salafiste. Dans la vidéo ci-dessous, ils racontent leur rencontre avec Marzouki et disent avoir déploré la répression du pouvoir à l’encontre des salafistes, surtout depuis l’attentat contre l’ambassade.

«Abou Abdallah Al Tounsi reçu par Marzouki arrêté dans traficImed Ben Salah (alias Abou Abdallah Al Tounsi) à droite, reçu par Moncef Marzouki a été arrêté au Caire par les autorités Égyptienne dans un réseau de trafic de passeportsPosté par Tunis Tribune sur vendredi 22 mars 2013»

(Abou Abdallah Tounsi, à droite, lors d'une conférence.)

(Abou Abdallah Tousni, à gauche, lors de sa rencontre avec Moncef Marzouki.)

Des menaces à peines voilées

Les personnes, arrêtées suite à cette attaque, ont été torturées, privées de visite et même privées du Coran, selon le site Kapitalis. C’était d’après lui une «pratique à laquelle même l’ancien président Ben Ali n’a pas recouru dans sa politique répressive du mouvement islamiste», a rapporté la même source. Abou Abdallah Tounsi aurait même averti: «Nous craignons que des actes criminels ou terroristes soient commis et attribués aux salafistes, afin de justifier une campagne contre notre mouvement et instaurer dans le pays une guerre entre des milices militaires et policières ou autres, ce qui aboutirait à une situation ingérable».

Le 21 mars 2013, Abou Abdallah Tousi est arrêté en Egypte pour avoir falsifié des passeports avec un complice libyen, puis extradé vers la Tunisie. Son rapatriement avait suscité beaucoup d’inquiétudes. Dès l’atterrissage de son avion à l’aéroport Tunis-Carthage jeudi 4 avril 2013, il est arrêté puis remis en liberté, quelque temps après.

«Tout le monde sait qui sont les terroristes »

Après les derniers attentats de Tunis, le site Kapitalis a publié la lettre ouverte de Raouf Dakhlaoui, un libraire, au président Caïd Essebsi. Dans son texte, l’homme tient pour responsables les islamistes du parti Ennahda et regrette le laxisme du dirigeant tunisien. “Monsieur le président de la République, tout le monde, dans notre pays, sait qui sont les terroristes, vous le premier. Personne ne doute de votre sentiment national ni de votre attachement profond à la patrie. Mais pour des calculs politiques, vous ne voulez pas les dénoncer et agir contre eux. Vous combattez les sous-fifres et laissez en paix les têtes pensantes. Pensez-vous que vous arriverez par la raison à les combattre ?”, a-t-il écrit.

En juillet dernier, les autorités tunisiennes ont annoncé la construction d'un mur de sable d'environ 200 km, sur la frontière avec la Libye, afin notamment de lutter contre la contrebande d'armes. En attendant, le spectre du terrorisme n’est pas prêt de disparaître. En moins d’un an, la Tunisie a connu trois attentats. En mars dernier, plusieurs individus ont tué 21 touristes au musée national du Bardo, à Tunis, et en juin, un tireur a abattu 38 étrangers sur une plage et dans un hôtel à Sousse. Daech avait revendiqué ces deux attaques.

Par Rania Laabid
Le 26/11/2015 à 09h45