Dmitri Peskov, le porte-parole du président russe, a qualifié de «mensonge absolu» les insinuations de dirigeants occidentaux selon lesquelles le Kremlin avait orchestré le crash de l’avion qui transportait M. Prigojine mercredi.
«Actuellement, autour de la catastrophe aérienne et des morts tragiques de passagers, notamment d’Evguéni Prigojine, il y a beaucoup de spéculations et on sait bien dans quelle direction on spécule en Occident», a-t-il aussi dit.
Nombre des détracteurs du régime russe ou de ses ex-partisans tombés en disgrâce ont été tués ou ciblés par des tentatives d’assassinat. Le Kremlin a toujours démenti toute implication.
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Les enquêteurs ont, de leur côté, affirmé que les investigations suivaient leur cours. Ils ont annoncé en début de soirée avoir récupéré les dix corps des victimes sur les lieux du crash ainsi que les enregistreurs de vol et ont indiqué que des «analyses génétiques moléculaires» étaient en cours pour établir leur identité.
«L’enquête vérifiera minutieusement toutes les versions possibles de ce qui s’est passé», a insisté le Comité d’enquête russe sur Telegram.
«Trop brutal»
Le plus proche allié du Kremlin, le président du Bélarus Alexandre Loukachenko, a lui soutenu le Kremlin en affirmant «ne pas pouvoir imaginer» Vladimir Poutine donnant l’ordre d’assassiner le patron de Wagner.
«Je connais Poutine», a déclaré M. Loukachenko, cité par l’agence de presse d’Etat Belta. «C’est un homme réfléchi, très calme» et le crash était «un travail trop brutal et amateur».
Et Moscou n’a pas attendu très longtemps pour recadrer les milliers de paramilitaires, obligés par un décret présidentiel depuis vendredi de prêter serment comme le font les soldats de l’armée régulière.
Ils devront notamment jurer «fidélité» et «loyauté» à la Russie, «suivre strictement les ordres des commandants et des supérieurs» et «respecter de manière sacrée la Constitution» russe.
De son côté, le Bélarus a dit vouloir garder «le noyau» dur de Wagner selon un schéma «bâti» avec Evgueni Prigojine avant le crash.
«Wagner a vécu, Wagner est vivant et Wagner vivra au Bélarus», a-t-il martelé, sans préciser pour quelle mission et pour combien de temps ces mercenaires serviraient au Bélarus.
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Vladimir Poutine avait qualifié Evguéni Prigojine, qu’il côtoyait depuis les années 1990, de traître en raison de sa rébellion armée des 23 et 24 juin.
Il a évoqué jeudi soir, après 24 heures de silence, un homme «talentueux» qui avait commis des «erreurs», et aussi loué le rôle joué par Wagner sur le front en Ukraine.
«Un ami, un frère»
Evguéni Prigojine avait renoncé à sa mutinerie après un accord qui prévoyait son exil avec ses hommes au Bélarus et l’abandon des poursuites.
Pourtant, il a continué à se rendre en Russie et a été reçu au moins une fois au Kremlin en juin. Le mois suivant, il était à Saint-Pétersbourg en marge du sommet Russie-Afrique, continent sur lequel Wagner est particulièrement actif.
Dmitri Peskov a néanmoins nié vendredi toute rencontre récente entre MM. Poutine et Prigojine.
Jeudi, des habitants de Saint-Pétersbourg, où le groupe était basé, ont défilé pour déposer des fleurs sur un mémorial improvisé, signe de la popularité du chef de guerre auprès de certains, qui appréciaient son nationalisme et son franc-parler volontiers critique des élites russes.
«Pour nous, c’était un ami, un frère. Je pense que pour tous les soldats c’est un moment très important», a dit Natalia, 31 ans, allée à vélo mettre son bouquet à l’ombre du bâtiment de verre où Wagner a établi son QG.
A Washington, Paris, Berlin ou Kiev, de hauts responsables ont sous-entendu que leurs soupçons se portaient sur le Kremlin.
Le Pentagone a pour sa part dit n’avoir «aucune information indiquant qu’un missile sol-air» avait été tiré contre l’appareil, alors que des groupes sur Telegram proches de Wagner mentionnent cette piste.
Wagner, qui a quitté l’Ukraine après sa rébellion, reste actif en Afrique mais son avenir est désormais en suspens. Partout où il a été déployé, ce groupe est accusé d’exactions, d’exécutions extrajudiciaires et de tortures.