À la question "Carles Puigdemont est-il disposé à rentrer?", l'un de ses avocats en Catalogne a répondu: "En principe, oui, mais mon conseil c'est d'évaluer la situation, car au moment où il reviendrait ici, il serait arrêté", deux mois après la proclamation d'une République catalane restée sans effets.
"Il faut mesurer si cela vaut la peine, s'il peut faire davantage dedans que dehors, il est évident que s'il vient et est emprisonné, cela génère (...) un conflit politique très important", a ajouté Me Jaume Alonso-Cuevillas au micro de Catalunya radio. "C'est une décision politique qu'il faudra prendre dans les prochains jours", a-t-il ajouté.
"Nous étudions tous les scénarios", a simplement confirmé la directrice de campagne du parti de M. Puigdemont, Elsa Artadi, interrogée à Bruxelles par la radio catalane Rac1. Elle a insisté sur l'idée que la victoire des sécessionnistes -avec 47,5% des voix, mais une majorité absolue en sièges- était celle de "tous" les partis indépendantistes qui allaient devoir parler pour la formation d'un gouvernement à Barcelone.
M. Puigdemont a maintes fois affirmé sa volonté de rétablir son gouvernement destitué par Madrid, ce qui semble compromis, certains membres ayant été placés en détention provisoire pour "rébellion" et "sédition" en Espagne, d'autres ayant choisi de s'exiler.Le vice- président catalan destitué, Oriol Junqueras, est ainsi en prison depuis le 2 novembre et avait pris la tête d'une liste séparée, qui a été devancée par celle de M. Puigdemont.
Le porte-parole de son parti de gauche indépendantiste, Joan Tarda, s'est adressé samedi à M. Puigdemont, dans un tweet en le reconnaissant comme "président": "nous vous attendons pour que vous dirigiez la Généralité (l'exécutif catalan) avec le vice-président Junqueras", a-t-il écrit, ajoutant une incitation supplémentaire à son retour.
Dans son bras de fer avec Madrid, M. Puigdemont cherche systématiquement à se placer sur le même plan que le chef du gouvernement espagnol et à pousser l'Europe à s'impliquer dans ce conflit politique, ce qu'elle refuse de faire. M. Puigdemont avait proposé vendredi à M. Rajoy de le rencontrer "à Bruxelles ou dans n'importe quel autre lieu de l'Union européenne".
Sans jamais prononcer son nom, le Premier ministre conservateur lui avait répondu indirectement: "la personne avec laquelle je devrais m'asseoir, c'est celle qui a remporté ces élections, Mme (Inès) Arrimadas", tête de liste du parti Ciudadanos, qui a obtenu le plus de voix (25%) et de sièges (37). "Je devrai parler avec la personne qui exercera la présidence du gouvernement régional, mais pour cela elle doit prendre ses fonctions", a averti M. Rajoy.
La directrice de campagne de M. Puigdemont a au contraire appelé M. Rajoy à commencer à parler "avec les partis souverainistes, qui sont clairement vainqueurs de ces élections".
"La première force politique en Catalogne, c'est Ciudadanos, une force constitutionnaliste", a souligné de son côté samedi Inès Arrimadas, forte de son 1,1 million de voix, dans un entretien publié par El Mundo. "C'est fondamental pour mettre en lumière le fait qu'il n'y a pas une majorité sociale en Catalogne en faveur de l'indépendance", a-t-elle insisté.
Elle ne dispose cependant pas d'alliés pour former une coalition de gouvernement: les socialistes n'ont que 17 sièges et le Parti populaire (PP, conservateur) de M. Rajoy s'est effondré, ne recueillant que 4% des voix dans la région (3 sièges).
La situation économique dans la région risque de pâtir de la poursuite de l'incertitude politique, alors que plus de 3.100 entreprises ont déménagé leurs sièges sociaux ailleurs et que le tourisme et les investissements faiblissent.