La plupart se réjouissent que Saïd Bouteflika, accusé par le mouvement d'avoir usurpé le pouvoir à la faveur de la dégradation de la santé de son frère et d'avoir orchestré ses tentatives de maintien au pouvoir, réponde de ses actes.
Mais elles se méfient aussi d'une justice expéditive ou revancharde, au service d'une lutte de clans au sommet ou destinée à endormir la colère populaire, et réclament le départ des personnalités, toujours en place, issues de l'appareil du régime Bouteflika.
L'arrestation de Saïd Bouteflika répond à "une revendication de tous les Algériens", a déclaré à l'AFP l'avocat Me Mustapha Bouchachi, une des figures de proue de la contestation. "C'est lui qui a géré le pays" depuis l'AVC dont a été victime Abdelaziz Bouteflika en 2013, a-t-il ajouté, "il a commis des crimes contre le peuple".
Mais, au delà de son cas, "l'essentiel pour nous est que les gens qui ont commis des délits soient jugés", a souligné l'avocat.
"De toutes les arrestations" récentes, ayant visé aussi plusieurs richissimes hommes d'affaires, majoritairement proches du pouvoir et accusés de malversations, celles de Saïd Bouteflika et des généraux Mohamed "Toufik" Mediene et Athmane "Bachir" Tartag "sont les plus frappantes", a admis Soufiane Djilali, chef du petit parti d'opposition Jil Jadid.
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"La détention du frère du président est symboliquement la rupture recherchée par rapport au régime de Bouteflika. Quant (à celles des) deux anciens hauts militaires, ça relève beaucoup plus de relations internes à l'institution militaire", a expliqué M. Djilali mardi dans une interview à la radio nationale, rappelant que le contenu des dossiers n'était pas connu.
Selon cet opposant ayant milité dès 2014 contre de nouveaux mandats de Bouteflika, "le pouvoir a besoin de reprendre un minimum de contact et de confiance avec la population et il donne des gages" mais, derrière "ces gages, on ne sait pas s'il y a une réelle volonté de changement".
Pour Fadéla Chitour, militante des droits humains, "ces arrestations sont une concession au mouvement populaire, mais sont aussi motivées par une évidente lutte de clans". Le pouvoir fait "d'une pierre deux coups", a-t-elle expliqué à l'AFP.
L'universitaire Fodil Boumala, fondateur en 2011 de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD), sur fond de Printemps arabe, ne voit dans les arrestations qu'"une guerre de survie" des clans au pouvoir, loin des attentes du peuple algérien.
"Ils sont tous pareils, issus du même sein. Laissons-les lutter comme des coqs, en attendant que le peuple et sa révolution (...) s'attaquent au système qui leur a donné naissance pour le changer radicalement", écrit-il sur Facebook.
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"Qu'ils sachent que tous les sacrifices offerts" à la contestation, "ne vont pas tromper le peuple ni le dévier de son but", poursuit-il.¨
Pour l'ancienne magistrate Zoubida Assoul, présidente de l'Union pour le changement et le progrès (UCP), petit parti ayant tôt pris position contre le 5e mandat au sein du mouvement Mouwatana, "l'arrestation de Saïd, ou d'autres qui ont fait beaucoup de mal, c'est un début d'effondrement du système".
Mais il est nécessaire d'avoir "une justice sereine", a-t-elle ajouté auprès de l'AFP.
Ancien patron de Mouwatana, Djilali a lui aussi mis en garde, dans son entretien à la radio nationale, contre les possibles "excès" et "dérapages" des procédures judiciaires en cours.
"Il faut des procès réels, il faut une vraie défense et que la justice soit faite", a-t-il rappelé, "il faut faire très attention, ouvrir des procès dans cette période, je ne pense pas que ce soit la décision la plus judicieuse".
"Des procès aussi complexes maintenant reviendrait à régler des comptes entre clans (...) qui, au final, étaient associés au sein du pouvoir ces 20 dernières années", a-t-il poursuivit. Il serait trop facile maintenant, après avoir bénéficié du régime de Bouteflika, qu'une partie de ce régime élimine l'autre partie en essayant de retrouver une certaine virginité".