Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a réagi vendredi soir, soulignant que les alliés, dont il a relevé qu'ils avaient promis de soutenir l'Ukraine «autant que nécessaire», devraient inévitablement se rendre à l'évidence.
«Oui, nous devrons encore nous battre pour la fourniture de chars modernes, mais chaque jour, nous rendons plus évident le fait qu'il n'y a pas d'autre solution», que de les fournir à l'Ukraine, a-t-il déclaré depuis Kiev dans un message vidéo, à l'issue d'une réunion sur la base américaine de Ramstein, en Allemagne, d'une cinquantaine de pays destinée à coordonner l'aide militaire contre l'invasion russe.
Les choses pourraient en effet évoluer dans les semaines à venir, ont laissé entendre les Etats-Unis.
«Nous avons ici une fenêtre d'opportunité entre maintenant et le printemps», pour livrer des chars occidentaux quand l'Ukraine commencera «sa contre-offensive», a ainsi dit le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin.
Son homologue polonais Mariusz Blaszczak s'est dit «convaincu», que les alliés finiraient par s'unir en une coalition pour livrer des chars allemands Leopard 2 à l'Ukraine.
D'ici là, les divers paquets d'aides militaires supplémentaires promis par plusieurs pays offrent aux forces ukrainiennes «la capacité dont elles ont besoin pour remporter des succès», sur le terrain, a jugé le chef du Pentagone.
Volodymyr Zelensky s'est lui aussi félicité des autres résultats de cette réunion, notamment de «plusieurs centaines de véhicules de combats ajoutés à l'arsenal», ukrainien, et de «résultats significatifs concernant les roquettes et systèmes antiaériens», demandés par Kiev.
Lire aussi : En Allemagne, réunion cruciale vendredi des ministres de la Défense des pays soutenant militairement l'Ukraine
Les Etats-Unis, le Royaume-Uni, la Suède ou encore le Danemark ont en effet annoncé de nouvelles livraisons substantielles d'armes quelques heures avant la réunion.
Washington va ainsi débloquer une tranche de 2,5 milliards de dollars, comprenant 59 blindés Bradley, qui s'ajouteront aux 50 véhicules blindés légers de ce type promis le 6 janvier, et 90 blindés de transport de troupes Stryker. Le Royaume-Uni s'est engagé à envoyer à l'Ukraine 600 missiles supplémentaires Brimstone, le Danemark 19 canons Caesar de fabrication française, et la Suède des canons automoteurs Archer. La Finlande a elle annoncé vendredi une aide militaire de 400 millions d'euros à l'Ukraine, sa plus large contribution à ce jour, qui comprend de l'artillerie et des munitions.
Le gouvernement néerlandais a à son tour annoncé vendredi soir qu'il allait aider l'Ukraine à s'équiper en système de défense antiaérienne Patriot, en l'occurrence de «deux lanceurs et de missiles», pour l'aider à se défendre des attaques de missiles russes sur ses villes et ses infrastructures.
«Changer le cours de la guerre»Le ministre de la Défense ukrainien Oleksii Reznikov s'est félicité sur Twitter de ces nouvelles livraisons, remerciant notamment son «ami et collègue», américain Lloyd Austin et assurant que «Bradleys et Patriots vont changer le cours de la guerre».
Quant aux blindés lours réclamés par Kiev, les Allemands, dont dépend la possibilité de reexportation du char Leopard 2, de loin le plus représenté dans les armées européennes, «n'ont pas pris leur décision», a sobrement déclaré le secrétaire américain à la Défense.
Selon les experts, des chars lourds modernes et de conception occidentale seraient pourtant un avantage crucial pour Kiev dans les batailles qui s'annoncent dans l'Est de l'Ukraine, où la Russie reprend l'offensive après avoir subi de lourds revers cet hiver.
La Pologne et la Finlande ont proposé de livrer des chars Leopard qu'ils possèdent, mais Berlin rechigne à ce stade à donner son feu vert.
Lire aussi : Zelensky enverra aux soldats «tout le nécessaire» pour défendre Soledar et Bakhmout, à l'est de l'Ukraine
Le nouveau ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius, a toutefois démenti «l'impression», que son pays bloquait la décision, assurant que Berlin agissait et lançait un inventaire des stocks de Leopard dont disposent son armée et l'industrie.
Le ministre ukrainien de la Défense a écrit vendredi soir sur Twitter avoir eu «une franche discussion», à ce sujet avec son homologue allemand.
A l'ouverture de la réunion, le président Zekensky avait exhorté les alliés par liaison vidéo à accélérer leurs livraisons d'armes lourdes pour «arrêter le mal».
Le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov avait immédiatement affirmé que cela ne changerait rien sur le terrain, accusant les Occidentaux d'entretenir l'«illusion», d'une possible victoire ukrainienne «sur le champ de bataille»,.
«Organisation criminelle»Vendredi, la ville assiégée de Bakhmout (est), actuel épicentre des combats, a de nouveau été violemment bombardée, ont constaté des journalistes de l'AFP.
«Regardez, regardez, c'est mon appartement, c'est le seul appartement que j'ai», se désolait Olga Tomak, 70 ans, contemplant avec Mykola, son mari, son immeuble en train de brûler après une frappe.
Lire aussi : Dans l'armée ukrainienne, une très symbolique légion de combattants russes
A Washington, un haut responsable de l'administration américaine a estimé, sous couvert de l'anonymat, que l'Ukraine ne devrait pas chercher à défendre coûte que coûte cette ville en grand partie détruite, mais se concentrer sur la préparation d'une contre-offensive d'envergure dans le sud du pays.
Les autorités d'occupation russe ont d'ores et déjà dit noter une «forte hausse de l'intensité», des combats dans la région de Zaporijjia, dans le sud, où des affrontements ont lieu «sur toute la ligne de front»,.
L'ONU a de son côté annoncé vendredi l'arrivée d'un premier convoi humanitaire dans les environs de Soledar, une ville proche de Bakhmout dans l'est de l'Ukraine dont la prise a été revendiquée la semaine dernière par l'armée russe et les mercenaires du groupe Wagner.
Ce groupe a été désigné vendredi par les Etats-Unis comme une «organisation criminelle», responsable d'atrocités, a annoncé vendredi la Maison Blanche.
Enfin les services de sécurité ukrainiens (SBU) ont affirmé avoir arrêté «sept agents russes», dans la région de Dnipro (est), où une frappe de missile a fait 46 morts la semaine dernière.