Dans «L’heure de trop», Malik Bentalha endosse le costume de l’imam de Drancy, Hassan Chalghoumi, présenté ici comme l’imam de Nancy, Larsen Harbouni, qui cumule autant de titres honorifiques et d’expertises que d’inepties prononcées. Président d’honneur de la Confédération des imams de France, docteur en théologie musulmane, chercheur au CNRS, grand donateur pour l’association «un couscous, tous pour un», grand médaillé olympique d’islam, professeur de muay-thaï au Kremlin-Bicêtre, auteur des romans à succès «Pour un islam sans les Arabes» et du nouvel ouvrage «Les musulmans, stop!»… Autant d’appellations loufoques présentées par la caricature de Pascal Praud (animateur de la vraie émission «L’heure des pros»), jouée par le comédien Matthias Van Khache, qui se glisse ici dans la peau de Patrick Traud.
Autour du plateau de cette fausse émission qui ressemble pourtant étrangement à l’originale, on retrouve aussi la comédienne Anne-Élisabeth Blateau, qui s’illustre dans la série «Scènes de ménages» sur M6 et qui campe ici une Élisabeth Levy plus vraie que nature, dans le rôle de la directrice du magazine «Bleu Blanc Rouge», obsédée par Karim Benzema et ses liens avec les Frères musulmans, et qui éructe sa haine de l’islam et des musulmans entre deux gorgées d’alcool.
Dans cette vraie-fausse émission de plus de 15 minutes, les sujets débattus sont, eux aussi, plus vrais que nature, tant ceux-ci collent à l’habituelle ligne éditoriale de Cnews. «La djellaba est-elle un vêtement religieux?» ou encore «un policier attaqué dans un lycée: faut-il interdire les élèves?»… Des sujets d’actualité auxquels les invités sont sollicités de répondre par Pascal Traud.
Dans le panel, on retrouve aussi Abdelkader Ziani, présenté comme «un arabe», dont on affiche le numéro de téléphone, mais dont Patrick Traud ne présente le profil qu’à contrecœur, contraint par son invité. Et pour cause, celui-ci est «professeur en sciences islamiques de l’université de Harvard, président et fondateur de l’Islamic research foundation qui œuvre pour la cohésion des peuples et la paix dans le monde», classé par le New York Times en 2018 comme «l’une des cinq personnalités les plus influentes du monde musulman».
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Face à cet érudit qui connait les textes de loi, s’exprime parfaitement en français et affiche une solide culture générale, l’imam de Nancy, à qui l’on tend volontiers le micro pour lui permettre de déblatérer des inepties incompréhensibles, mais saluées par le présentateur et ses chroniqueurs qui flirtent avec les idéaux de l’extrême droite. Quant à Abdelkader, que l’on réduit à son prénom, celui-ci n’a pas voix au chapitre et se fait sans cesse couper la parole par un Patrick Traud qui s’écrie à tout-va «c’est insupportable, vous faites de la provocation!».
Une parodie plus vraie que nature, à laquelle n’a pas encore réagi Pascal Praud, animateur vedette de Cnews, et qui doit vraisemblablement son phénoménal succès à sa ressemblance avec sa version originale. En choisissant le format de la parodie, Malik Bentalha et ses acolytes ont réussi à dénoncer non seulement l’islamophobie qui règne en toute impunité sur les plateaux télévisés des chaînes d’information en continu en France, mais aussi l’invisibilisation des intellectuels et experts arabes et/ou musulmans au profit de personnes sans compétences, que l’on présente volontiers comme des représentants de la communauté musulmane de France. Un coup de maître qualifié de «Masterclass» par les réseaux sociaux.