C’est à travers un éditorial pour le moins obscur que le site Algérie patriotique a annoncé, hier, mercredi 24 avril 2019, sa fermeture. Après 7 ans d’existence. Particulièrement haineux envers le Maroc et ses institutions, le site aura multiplié désinformation et propagandes en tous genres pour tirer à boulets rouges, sans même y mettre les manières, contre le royaume.
Propriété de Lotfi Nezzar, fils de l’ancien ministre de la Défense, Khalid Nezzar, le journal était proche du clan de l’ancien patron du Département du renseignement et de la sécurité (DRS), Mohamed Mediène, dit général Toufik, ennemi juré du nouvel homme fort de l’Algérie, le chef de l’armée Ahmed Gaïd Salah.
En fermant boutique, les Nezzar cherchent-il à conjurer un châtiment du chef d’état-major? On le sait, si Ahmed Gaïd Salah a gravi les échelons au fil du temps, c’est au détriment de ce même général Toufik, dont il a récupéré non seulement les attributions mais aussi le rôle politique axial du voisin de l’Est. Aujourd’hui désormais seul aux commandes, Gaïd Salah a entamé une purge qui n’épargne ni les soutiens du système Bouteflika, ni ses détracteurs.
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Manipulant à souhait la Justice algérienne, Gaïd Salah a réussi à mettre derrière les barreaux des personnages aussi emblématiques que l’homme d’affaires et première fortune du Maghreb Issad Rebrab, celui-là même que le régime de l’ancien président ne cessait de malmener, notamment en bloquant depuis près d'un an, au port d'Alger, des équipements industriels destinés à des investissements pour son conglomérat. Totalement à l’opposé de Rebrab, les puissants frères et managers algériens Kouninef et Ali Haddad, proches des Bouteflika, ont également été réduits au silence et arrêtés.
Autant dire que Gaïd Salah fait le vide autour de lui. Et c’est tout naturellement qu’il peut orienter la Justice vers les milieux proches du général Toufik ainsi que ceux qui critiquent sa toute-puissance. On s’en souvient, le 16 avril dernier, dans un discours, le chef de l’armée s’en était directement pris à l’ancien patron et omnipotent chef du DRS. «J’ai déjà évoqué, lors de mon intervention du 30 mars 2019, les réunions suspectes qui se tiennent dans l’ombre pour conspirer autour des revendications du peuple et afin d’entraver les solutions de l’Armée Nationale Populaire et les propositions de sortie de crise», avait alors clamé, d’emblée, Gaïd Salah.
Puis de désigner directement «ces parties, à leur tête l’ex-Chef du Département du Renseignement et de la Sécurité», qui ont tenté, «en vain, de nier leur présence dans ces réunions, et d’induire en erreur l’opinion publique, en dépit de l’existence de preuves irréfutables sur ces faits abjects». Et de lancer «à cette personne un dernier avertissement, et dans le cas où il persiste dans ses agissements, des mesures légales fermes seront prises à son encontre», avait-il menacé.
Jusque-là le site “Algériepatriotique“ a joué sur la vague des manifestations populaires pour demander le dégagisme de tout le système, y compris de Gaïd Salah, cible selon ce site de la colère des manifestants. Quand on sait que les Nezzar se sont gavés dans un système algérien en bénéficiant de marchés publics et de monopoles dans plusieurs secteurs de l’économie, y compris les télécoms, on peut légitimement gamberger sur les raisons de la mise à l’arrêt brutale de leur organe d’expression. Gaïd Salah a-t-il brandi la menace du recours à la justice contre le général Nezzar et ses enfants ? C’est plus que plausible compte tenu de la soudaineté de la mise à mort du site.
A la veille d’un dixième vendredi de manifestations pour chasser tout le système, Gaïd Salah démontre chaque jour un peu plus sa volonté de se maintenir au pouvoir, de contrôler toutes les institutions et écarter les voix dissonantes. Il est sur la même voie que le maréchal Al Sissi a empruntée. Comme tous les adversaires du chef d’état-major trainent des casseroles, la main de la Justice peut frapper partout dans un régime où la prévarication et la corruption sont une pratique courante. Cela promet un grand déballage dans les jours à venir et une chasse aux sorcières. Les Nezzar ont préféré montrer patte blanche au nouvel homme fort en Algérie en se mettant hors-jeu de l’influence de l’opinion publique.