Karim Adduchi est né à Imzouren, au Maroc, en 1988 et a grandi dans une famille de couturiers. Toute son enfance, il la passera entre étoffes, bobines de fil et machines à coudre, jusqu’au jour où son père décidera de s’installer à Barcelone pour démarrer une nouvelle carrière, laissant derrière lui sa famille.
L'art en guise de verbeEn 1993, le jeune Karim, âgé de 5 ans, rejoint son père en Espagne. Il y découvre un nouveau monde, plein de possibilités. Ne parlant pas la langue du pays, il compense ses lacunes par le dessin et commence ainsi ses premiers pas dans le domaine de l’expression visuelle.
Subjugué par ses dessins, l’un de ses professeurs conseillera à sa famille de le scolariser dans une école d’art, l’institut Cal’Oller, afin de perfectionner ses talents. Une véritable bouffée d’oxygène pour cet enfant qui ne sait pas s’exprimer avec des mots.
De 1995 à 2006, le jeune homme développe ainsi ses sens et se spécialise dans la peinture et le dessin de la Renaissance italienne. Après cette plongée artistique dans l’école italienne, il s’intéresse à l’art contemporain et décide de poursuivre ses études à la Pompeu Fabra Academie (P.F.A) pendant deux ans, avant de poursuivre son parcours à la Fine Arts University de Barcelone. En parallèle de ses études, il complète son expérience en travaillant au Musée d'art contemporain de Barcelone (MACBA), à la Fondation Miro et enfin au Centre de Cultura Contemporània de Barcelona (CCCB).
La mode au service de l'artEn 2011, il déménage à Amsterdam afin de compléter sa formation artistique avec des études de mode, à la Gerrit Rietveled Academie. Une manière pour lui d’élargir le spectre de l’expression visuelle, son principal moyen de communication depuis toujours. Diplômé en 2015 de cette même académie, il s’illustre auprès de ses pairs grâce à une époustouflante collection baptisée « She knows why the Cages Bird Sings», fortement marquée par la valorisation du savoir-faire amazigh. Il intègre ainsi le cercle très fermé des jeunes créateurs qui agitent la scène culturelle d’Amsterdam mais reste toutefois fidèle à sa propre vision de la mode et de l’art.
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Par la suite, il affirme son style avec une nouvelle collection, «She lives behind the Courtyard Door», qui transporte littéralement dans un autre monde, un monde où les règles et les tendances qui régissent la planète mode n’existent pas. Le mystère des savoir-faire anciens y transparaît en filigrane, laissant entrevoir un sombre pouvoir et la définition de la beauté selon le créateur. Véritable hommage à son héritage et aux femmes marocaines, cette nouvelle collection peint ses rêves mais également les barrières imposées par une culture ancestrale.
Le féminisme au bout du filCouleurs riches et vives, couvertures traditionnelles, tapis en laine de mouton… Karim fait feu de tout bois pour déconstruire son héritage et le faire revivre différemment, en conférant de nouvelles fonctions aux matières, afin de recréer un nouveau monde tout en minimalisme. Sa touche: conférer une coupe moderne et subtile à des textures brutes tout en les associant à des détails modernes. Adduchi nous invite ainsi à créer notre propre histoire, donnant à chacun le moyen de rêver à travers cette histoire qu’il raconte avec brio en véritable conteur des temps modernes. Avec lui, la mode devient un moyen de communication et une façon de dévoiler la beauté cachée.
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Dernier fait en date de cet enfant terrible de la mode, sa collection printemps-été 2018 présentée le 8 novembre à Amsterdam. Véritable ode à la femme amazighe, cette ligne baptisée « She has 99 Names» affirme encore plus l’amour et l’admiration profonde que porte le créateur aux femmes marocaines. Réalisée en collaboration avec des artisans syriens, marocains, russes et érythréens, la nouvelle ligne de Karim Adduchi évoque, avec toujours autant de profondeur, la beauté mystérieuse de ces femmes du Rif, tantôt guerrières colériques et fortes, tantôt mélancoliques et voilées de douceur.
Karim Adduchi n’en a pas moins oublié son premier amour, l’art. En parallèle de son travail de créateur de mode, il est également reconnu pour ses dessins, ses photographies et ses sculptures. A l’image de ses collections de mode, son travail artistique est une fenêtre qui ouvre vers un monde mystérieux.