À l’arrêt depuis 15 mois, le secteur du tourisme traverse une crise sans précédent. En manque de visibilité et dans le flou le plus total, notamment concernant la date de réouverture des frontières, les opérateurs touristiques tirent la sonnette d’alarme et appellent le gouvernement à se mobiliser pour sauver ce secteur important de l’économie, aujourd’hui en danger.
Organisée en collectif depuis peu, la nouvelle génération d’entrepreneurs touristiques au Maroc est née de la rencontre de jeunes professionnels du secteur désireux de partager les problématiques auxquelles ils font face depuis le début de la crise. Apolitique et indépendant, ce collectif a pour objectif d’émettre des recommandations innovantes pour sortir le secteur de la crise et d’apporter de nouvelles idées pour le développement du tourisme au Maroc.
À quelques jours du début de la saison estivale, Aziz Cherif Alami, voyagiste et président de la nouvelle génération d’entrepreneurs touristiques du Maroc, fait le point sur la situation et fait part des recomandations du collectif.
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Quelle est la situation actuelle et qu'attendez-vous du gouvernement?
L’état des lieux du secteur aujourd'hui est gravissime, on ne peut pas se permettre de rater un deuxième été. On demande au gouvernement des choses très simples. Premièrement, une visibilité avec un rétro-plan d'ouverture des frontières internationales, conditionnée avec des dispositifs sécuritaires à l’arrivée (Test PCR à l'arrivée, vaccin obligatoire…). Ensuite, la levée des restrictions internes. Il n'est pas encore logique que l’on soit au mois de juin et que les Marocains ne peuvent pas se déplacer encore librement entre les régions pour pouvoir consommer le produit touristique national.
Deuxièmement, nous appelons le gouvernement à venir en aide aux entreprises touristiques et surtout ses employés qui font face, aujourd'hui, à une crise sociale gravissime mais sourde. Nous demandons le maintien des aides au secteur touristique pour une durée de trois mois après la levée de l'état d'urgence sanitaire.
Aujourd'hui, nous naviguons à vue, nous n'avons aucune visibilité. Nous aimerions donc que le gouvernement fasse un rétro-planning honnête qui ne soit pas gravé dans le marbre. Nous demandons juste une annonce pour que les marchés émetteurs les tour-opérateurs et les grandes agences de voyages internationales et surtout européennes puissent reprogrammer le Maroc et le promouvoir.
Ce sont des choses qui prennent du temps, quelques semaines, voire quelques mois, sinon le Maroc risque de perdre des parts de marché vis-à-vis de ses concurrents méditerranéens.
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Que risque le secteur si des mesures ne sont pas prises rapidement?
Aujourd'hui, le secteur risque des faillites en cascade, pour être très clair et très simple. Si les frontières rouvrent et que le gouvernement marocain ne planche pas sur une continuité des aides, les charges vont revenir à 100% pour toutes les sociétés touristiques mais sur le chiffre d'affaires, donc, le retour des clients; nous n’avons aucune visibilité. Est-ce qu'ils vont revenir au mois de juillet, août, septembre?
Donc pendant les trois mois de la saison estivale, les sociétés touristiques devront tenir. Or, leur trésorerie a fondu comme neige au soleil depuis plus de 15 mois et donc nous sommes dans l’incapacité de pouvoir démarrer correctement. Sans aide ou soutien de l’Etat, honnêtement et sincèrement nous risquons des faillites en cascade de tout le pan de l'industrie touristique marocaine.
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Quels sont les objectifs du collectif de la nouvelle génération d’entrepreneurs touristiques?
Nous avons créé un collectif pour le renouveau du tourisme marocain composé de jeunes entrepreneurs touristiques âgés de 35 à 45 ans et nous souhaitons apporter du sang neuf.
Nous relayons notre message auprès des jeunes entrepreneurs touristiques pour qu'ils puissent se joindre à nous et trouver des solutions, lobbyer notre cause auprès du gouvernement marocain pour une reprise du tourisme sur des bases saines. Parce que ce sont les jeunes entrepreneurs touristiques d’aujourd’hui qui vont subir les séquelles du Covid dans les cinq, dix, quinze ans à venir, des conséquences financières et de l'attractivité aussi de notre capital humain. Il faut savoir que de plus en plus, nos employés quittent le secteur, nos talents aussi et donc il sera très difficile demain de les ramener.
Je précise que notre mouvement est complètement apolitique, qu'on souhaite avoir les opinions de tous bords et que nous ne nous substituons aucunement aux fédérations métier. Au contraire, nous souhaitons apporter de nouvelles idées, des solutions inédites et du sang neuf.