Le dossier est aussi vieux que sujet à polémique. La Caisse de dépôt et de gestion (CDG) vient de le rouvrir. Lors de la présentation du nouveau plan stratégique de la caisse à l’horizon 2022, son directeur général, Abdellatif Zaghnoun, a clairement fait savoir que l’un des objectifs majeurs de cette vision consiste à «consolider les capacités opérationnelles du métier de la prévoyance dans la perspective d’accompagner l’Etat en matière de gestion des retraites et de transfert des flux sociaux». A ce sujet, la CDG a réaffirmé son ambition d’être un acteur central dans la gestion du futur pôle public envisagé dans le cadre de la réforme des retraites.
En d’autres termes, la CDG souhaite récupérer la gestion des fonds de l’ensemble des caisses de retraite. Il s’agirait même d’une «condition sans laquelle le nouveau modèle économique ne peut pas marcher», a souligné Zaghnoun.
Cette déclaration intervient pourtant dans un contexte où la CDG fait face à de virulentes critiques de la part de la seule caisse obligée aujourd’hui de lui confier la gestion de ses fonds de retraite.
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En vertu de l’article 30 du Dahir portant loi 1-72-184 du 27 juillet 1972 relatif au régime de la sécurité sociale, la CNSS est tenue de déposer ses fonds, à l’exception de ceux nécessaires à son fonctionnement, auprès de la CDG. La rémunération de ce placement est alors fixée chaque année d’un commun accord, sans pour autant que cela ne représente le réel rendement des placements effectués grâce à cet argent. Cette configuration permet, certes, à la CNSS de sécuriser une rentabilisation de ses fonds. Mais l’expérience a montré que les autres caisses qui ne placent pas leur argent auprès de la CDG dégageaient des taux de rendement nettement plus importants. Cette situation a poussé la CNSS à demander, depuis plusieurs années, d’être libérée de cette obligation, faisant valoir un principe d’équité avec les autres caisses. Aucun gouvernement n’ose se saisir de la question.
«La CNSS a raison de demander cette équité et c’est ce que va lui assurer le transfert des fonds des autres régimes vers la CDG», argumente Abdellatif Zaghnoun. Mais la tâche ne sera pas facile, car il est peu probable que les autres caisses acceptent d’être servies à des taux de rendement inférieurs à ce qu’elles touchent aujourd’hui. La CDG pourra toujours faire valoir l’argument de la sécurité et la disponibilité des fonds, mais est-ce bien suffisant?
A la CDG, on semble croire dur comme fer que «l’Etat n’a pas d’autre choix» pour assurer une gestion optimale des fonds de retraite. «Il faut engager des discussions avec les pouvoirs publics pour que l’obligation imposée aujourd’hui à la CNSS soit généralisée aux autres caisses», insiste le DG de la CDG. Voilà de quoi porter le débat autour de la problématique des retraites au Maroc à autre niveau. Même si la question de la pérennisation des régimes de retraite n'est jamais bien loin.