La montée en puissance des encours, la sophistication croissante des stratégies de gestion et l’exigence accrue des investisseurs ont progressivement mis en lumière les limites du cadre juridique des organismes de placement collectif en valeurs mobilières. C’est dans ce contexte de maturité du marché que s’inscrit la promulgation de la loi 03.25, publiée au Bulletin officiel. «Plus qu’une simple mise à jour technique, ce nouveau texte marque une refonte profonde du cadre régissant l’épargne collective», explique le quotidien Les Inspirations Eco dans son édition du 26 décembre. Il traduit un changement de philosophie dans la régulation des OPCVM, désormais conçue comme un levier structurant du marché financier et un instrument central de protection des investisseurs.
Le dahir de 1993 avait été élaboré dans une logique de construction. Il posait les règles essentielles de constitution et de fonctionnement des fonds, tout en instaurant un contrôle encore limité. Trente ans plus tard, le paysage a radicalement changé. Les OPCVM occupent une place significative dans la mobilisation de l’épargne, les profils de risque se sont diversifiés et les standards internationaux en matière de gouvernance et de transparence se sont imposés comme des références incontournables. La loi 03.25 répond à ces mutations par une réécriture complète, plus lisible et mieux structurée. Les concepts y sont définis avec davantage de précision, les zones d’incertitude de l’ancien texte sont clarifiées et l’ensemble du dispositif gagne en cohérence.
«L’une des innovations les plus marquantes réside dans l’introduction formelle d’une classification des OPCVM en six catégories distinctes», souligne Les Inspirations Eco. Cette typologie, qui distingue notamment les fonds actions, obligataires, diversifiés, monétaires, contractuels et participatifs, offre une nouvelle grille de lecture du marché. Elle permet de mieux structurer l’offre, de clarifier les stratégies d’investissement et de faciliter la comparaison entre produits pour les épargnants. Chaque catégorie est assortie de règles spécifiques en matière de composition de l’actif, de niveaux de risque et de contraintes de gestion, renforçant ainsi la lisibilité et la prévisibilité du cadre réglementaire.
La reconnaissance explicite des OPCVM participatifs constitue une autre avancée majeure. Absente du dispositif de 1993, la finance participative trouve désormais une place clairement définie dans le droit marocain. Les fonds concernés peuvent investir dans des instruments conformes aux principes de la finance islamique, tels que les sukuk ou certaines catégories d’actions, sous réserve d’un avis de conformité des instances compétentes. Cette intégration répond à une demande croissante du marché tout en soumettant ces produits à des exigences prudentielles comparables à celles des autres OPCVM.
La loi 03.25 accorde également une attention particulière à la gestion des risques. Les notions de liquidité, de risque global et de risque de contrepartie sont désormais encadrées juridiquement. Les règles de diversification et les plafonds de concentration sont maintenus, mais affinés, avec des exceptions précisément définies, notamment pour les titres souverains ou les fonds indiciels. L’utilisation des instruments financiers à terme est autorisée, mais strictement encadrée, afin de prévenir les dérives spéculatives. Cette approche s’inscrit dans un alignement assumé sur les standards internationaux, en particulier ceux inspirés des directives européennes, et vise à renforcer la résilience d’un marché devenu plus complexe et interconnecté.
Le renforcement de la transparence et de la gouvernance constitue un autre pilier de la réforme. L’information fournie aux investisseurs fait l’objet d’un encadrement plus rigoureux, avec l’instauration d’une note d’information formellement visée par l’Autorité marocaine du marché des capitaux. Toute communication est désormais strictement réglementée et toute modification substantielle des caractéristiques d’un OPCVM doit être validée par l’autorité de supervision. Les obligations d’information continue sont renforcées, tandis que les responsabilités respectives des sociétés de gestion, des dépositaires et des commissaires aux comptes sont plus clairement définies. L’accent est mis sur la séparation des fonctions, la traçabilité des opérations et la protection effective des intérêts des porteurs de parts.
Cette réforme consacre par ailleurs la montée en puissance de l’AMMC, dont les prérogatives sont sensiblement élargies. L’autorité dispose désormais de pouvoirs renforcés en matière d’agrément, de contrôle permanent et de sanction. Les procédures sont précisées, les manquements clairement qualifiés et les sanctions proportionnées aux risques encourus. La régulation ne se limite plus à un cadre déclaratif, mais s’inscrit dans une logique proactive et préventive, avec pour objectif de renforcer durablement la confiance dans le marché financier.
«La loi 03.25 referme un cycle historique et ouvre une nouvelle étape pour l’industrie de la gestion collective», résume Les Inspirations Eco. Elle ne se contente pas de corriger les insuffisances du passé, mais redéfinit les règles du jeu pour un secteur appelé à jouer un rôle clé dans le financement de l’économie et la mobilisation de l’épargne nationale. En modernisant l’encadrement des OPCVM, en intégrant la finance participative et en plaçant la transparence au cœur du dispositif, le Maroc se dote d’un cadre juridique à la hauteur de ses ambitions financières. Reste désormais à mesurer, dans la pratique, la manière dont les acteurs du marché s’approprieront ce cadre exigeant et comment il se traduira par une offre plus claire, plus diversifiée et mieux sécurisée pour les épargnants.







