Tissu productif, retraites… Ce qu’il reste à faire selon Abdellatif Jouahri

Le roi Mohammed VI, accompagné du prince héritier Moulay El Hassan et du prince Moulay Rachid, a reçu, mardi au Palais royal à Tétouan, Abdellatif Jouahri, wali de Bank Al-Maghrib.

Revue de presseUn tissu productif morcelé, une dépendance excessive aux IDE sans retombées suffisantes, une protection sociale coûteuse à la soutenabilité incertaine et des réformes structurelles en suspens. Le dernier rapport de Bank Al-Maghrib, présenté au Roi, sonne comme un rappel à l’urgence de consolider ces fragilités. Cet article est une revue de presse tirée du quotidien L’Économiste.

Le 30/07/2025 à 19h24

Malgré une succession inédite d’années de sécheresse, l’économie marocaine continue de faire preuve d’une résilience saluée par les grandes institutions financières internationales. Un constat que n’a pas manqué de rappeler Abdellatif Jouahri, wali de Bank Al-Maghrib, en présentant au Roi Mohammed VI le rapport annuel de la banque centrale sur la situation économique, monétaire et financière du Royaume pour l’exercice 2024, à l’occasion de la fête du Trône, indique le quotidien L’Économiste dans son édition du jeudi 31 juillet.

Le rapport dresse un diagnostic complet: croissance, inflation, emploi, finances publiques, régime de change… Tous les indicateurs ont été passés au crible, avec en toile de fond un risque majeur: le changement climatique, identifié comme la principale source de chocs pour l’économie nationale. Pour Jouahri, la réponse publique doit s’articuler autour de trois axes, à savoir «renforcer la résilience face aux chocs, rehausser l’agilité pour naviguer dans un contexte incertain et préserver la stabilité macroéconomique, prérequis pour une croissance durable».

Sur le front des investissements directs étrangers (IDE), le Maroc confirme son attractivité sur le continent africain. Mais la véritable question est ailleurs: comment maximiser les retombées de ces IDE sur la croissance et surtout sur l’emploi? Le rapport appelle à renforcer l’implication des opérateurs privés et à mobiliser davantage de ressources nationales, à l’image du Fonds Mohammed VI pour l’Investissement. Un enjeu d’autant plus pressant que, pour la deuxième année consécutive, la balance en devises liée aux IDE est déficitaire. Le rapatriement de dividendes dépasse les nouveaux flux entrants.

Autre point de tension: la soutenabilité de l’aide directe, pierre angulaire de la généralisation de la protection sociale. En 2024, ce soutien mobilise plus de 24 milliards de dirhams. Or, pour éviter que ce mécanisme ne dérive vers un assistanat chronique, Bank Al-Maghrib insiste sur la nécessité de revoir régulièrement les critères d’éligibilité et de garder pour cap l’autonomisation des bénéficiaires et leur insertion dans l’emploi productif.

«La réforme du système des retraites reste, quant à elle, un chantier inachevé», relève L’Économiste. Malgré des avancées sur les financements innovants qui ont permis de soutenir les investissements et certaines réformes, Jouahri rappelle que seule une extension durable de l’assiette fiscale ou de l’activité économique pourra pérenniser les ressources publiques. Les dernières revalorisations salariales auraient pu constituer un levier de négociation avec les partenaires sociaux pour débloquer ce dossier, au point mort depuis près d’une décennie.

Autre fragilité structurelle: la forte atomisation du tissu productif. Les très petites entreprises (TPE), souvent informelles et peu productives, en constituent l’épine dorsale. Pour la banque centrale, la réponse doit être globale: éducation et formation pour renforcer les compétences, promotion de l’entrepreneuriat, encadrement des TPE et lutte renforcée contre la corruption et la concurrence déloyale de l’informel.

Côté finances publiques, le Maroc poursuit ses efforts de consolidation budgétaire depuis la pandémie. Mais la pression reste forte: chantiers d’infrastructures, réformes sociales et revendications persistantes pèsent lourdement sur les équilibres. Les ouvertures répétées de crédits additionnels depuis 2020 en témoignent. Bank Al-Maghrib plaide ainsi pour une révision de la loi organique des finances et la mise en place d’une règle budgétaire pour restaurer la prévisibilité.

Le rapport fait état des progrès enregistrés dans la réforme du régime de change et le développement de nouveaux instruments financiers, lit-on. La création d’un marché à terme interbancaire pour les swaps de change et de taux ouvre la voie à une meilleure couverture des risques pour les entreprises. Mais la levée de certains verrous juridiques et un cadre fiscal adapté restent nécessaires pour donner toute leur portée à ces instruments.

Quant au ciblage de l’inflation, Bank Al-Maghrib estime que la bande actuelle de fluctuation du dirham offre déjà une marge de manœuvre suffisante pour envisager à terme un objectif d’inflation plus explicite.

Sur le volet de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, le Royaume, qui a quitté les listes grises du GAFI et de l’Union européenne en 2023, prépare déjà la prochaine évaluation mutuelle prévue en 2026. Un enjeu crucial pour préserver la crédibilité du système financier marocain et consolider sa résilience.

Par La Rédaction
Le 30/07/2025 à 19h24