Le coronavirus a mis à genoux l’économie mondiale, et le Maroc, comme tous les autres pays touchés par la pandémie, s’est plié à la règle de l’entorse budgétaire, utilisant tous les mécanismes à sa disposition pour soutenir une activité économique fortement chahutée, fait remarquer Finances News dans sa livraison en kiosque cette semaine.
L’hebdomadaire rappelle que le Royaume a fait le choix, le 7 avril dernier, de tirer un montant de 3 milliards de dollars sur la Ligne de précaution et de liquidité (LPL), remboursable sur une période de 5 ans, avec une période de grâce de 3 ans. Force est de souligner qu’en dépit des explications données par le ministre des Finances pour justifier la décision, l’opération suscite néanmoins des interrogations au sein de la communauté des experts et observateurs.
Pour l’économiste Driss Effina, cette décision du gouvernement a été hâtive et prématurée, estimant qu’elle engendrera des coûts additionnels dans ce contexte difficile. Il justifie sa position par le fait que l’encours des réserves internationales nettes du Maroc se situe au 3 avril à 255 milliards de DH, hors LPL, dans un contexte caractérisé par une réduction de la demande, avec comme conséquence moins d’importations et d’exportations.
Pour Finances News, certains indicateurs vont être rudement impactés, comme les principaux pourvoyeurs de devises pour le Royaume tels que le tourisme, les investissements directs étrangers et les transferts des Marocains résidant à l’étranger. «Sur la base d’une hypothèse de recul de 50% du solde voyage, de 30% des transferts des MRE, ainsi qu’une baisse similaire à celle de 2019 des IDE, soit -42 %, le flux net global émanant de ces trois sources devrait reculer de 54,5 Mds de DH à 87,3 Mds de DH estimés pour l’année 2020», ajoute le journal, citant la dernière étude de CDG Capital.
Même si Driss Effina reconnaît que les recettes touristiques et les transferts des MRE vont diminuer, il estime néanmoins que la pression sur le solde courant, en tenant compte des éléments précédemment cités, va être moins importante qu’on pourrait le croire. Et c’est pour cette raison qu’il estime que la décision de recourir à la LPL a été prématurée, ajoutant que ce qui s’impose aujourd’hui, «c’est de bien gérer les importations en fixant une liste noire de produits et services à ne pas importer pour protéger les réserves en devises du pays».
A contrario, l’économiste Najib Akesbi n’est pas de cet avis, souligne Finances News, estimant que l’utilisation de la LPL était «la moindre des choses», d’autant que le Maroc y a souscrit depuis presque 8 ans. «Et depuis, le Maroc paye pour cette LPL sans l’utiliser», précise Najib Akesbi, qui estime qu’elle a coûté jusqu’en 2018 au moins 750 millions de dollars. «Si le Maroc paye au taux du marché, c'est scandaleux car cela voudrait dire que pendant 8 ans, nous avons dépensé pour rien; si le taux est inférieur au marché, c’est donc une formule trompeuse et l’on peut comprendre que les responsables restent muets sur le sujet», conclut-il.